« quartier », définition dans le dictionnaire Littré

quartier

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quartier

(kar-tié ; l'r ne se prononce pas et ne se lie pas ; au pluriel, l's se lie : des kar-tié-z éloignés) s. m.

Résumé

  • 1° La quatrième partie de certains objets.
  • 2° En boucherie, poids en quatre quartiers. En tannerie, dresser un cuir de quatre quartiers.
  • 3° Nom de divers instruments d'observation.
  • 4° La quatrième partie d'une aune.
  • 5° Ce qu'on paye de trois mois en trois mois.
  • 6° La quatrième partie du cours de la lune.
  • 7° Portion d'un tout qui n'est pas divisé exactement en quatre parties.
  • 8° Quartiers de pierre.
  • 9° Quartier, dans les arts de construction.
  • 10° Quartier de soulier.
  • 11° Quartier, dans le langage des vétérinaires.
  • 12° Certaines parties d'une ville.
  • 13° Au plur. Environs, en parlant des provinces et de la campagne.
  • 14° En termes de guerre, le bâtiment dans une ville où une troupe est casernée.
  • 15° Le campement ou le cantonnement d'un corps de troupes.
  • 16° Quartier d'hiver.
  • 17° En termes de marine, quartier des classes.
  • 18° Endroit désigné pour quelque chose, comme logement des veneurs, des chiens.
  • 19° Résidence.
  • 20° Dans les colléges, salle d'étude.
  • 21° Espace de trois mois, quart d'année.
  • 22° Chaque degré de descendance en une famille noble.
  • 23° La quatrième partie d'un écusson écartelé ; franc-quartier.
  • 24° Vie sauve ou traitement favorable fait aux vaincus.
  • 25° En architecture, quartier tournant.
  • 26° Morceau de métal laminé. Peau qui doit être ajoutée à un soufflet.
  • 27° Franc-quartier, dans une ardoisière.
  • 28° À quartier, à part.
  • 1La quatrième partie de certains objets. Un quartier de mouton, de pomme. L'attaquer [un chien], le mettre en quartiers, Sire loup l'eût fait volontiers, La Fontaine, Fabl. I, 5. Leurs complices ajoutaient qu'ils avaient assassiné la Dupin par son ordre [de Lesage], qu'ils l'avaient coupée en quartiers, et jetée dans la rivière, Voltaire, Louis XIV, 26.

    Son corps a été mis en quartiers, en quatre quartiers, se dit d'un supplicié dont on expose les membres en différents endroits. Frère Oldecorn et frère Garnet furent mis en quartiers à Londres pour la fameuse conspiration des poudres, Voltaire, Facéties, Balance égale.

    Fig. Je me mettrais en quatre quartiers pour lui, ou, par ellipse, je me mettrais en quatre pour lui, c'est-à-dire il n'y a rien que je ne fisse pour lui. Si je ne les refuse, il me faut mettre en quatre, Corneille, l'Illusion, III, 3.

  • 2 Terme de boucherie. Poids des quatre quartiers, poids net d'un animal abattu, c'est-à-dire poids des parties débitables par le boucher.

    Terme de tanneur. Dresser un cuir de quatre quartiers, le plier en prenant les quatre pieds.

    Le dresser des quatre faux quartiers, le plier des quatre coins, un peu en biaisant.

  • 3 Terme de marine. Quartier de réduction, carton gradué dont on se sert pour réduire les routes obliques, c'est-à-dire celles dont la direction n'est ni un méridien ni un parallèle à l'équateur. Le quartier de réduction n'est plus d'usage que sur quelques petits navires de commerce ; partout ailleurs on le remplace par des tables calculées d'avance, Legoarant

    Quartier sphérique, instrument nautique à l'aide duquel, connaissant la latitude du lieu et la déclinaison du soleil, on trouve l'heure de son lever, de son coucher, etc. Le quartier sphérique est également abandonné, et on lui substitue de même l'emploi des tables.

    Quartier de réflexion, voy. OCTANT.

    Quartier anglais, synonyme de quart de nonante.

  • 4La quatrième partie d'une aune (acception vieillie). Un quartier d'étoffe. Un quartier de ruban. Plus de coiffures élevées jusqu'aux nues… les princesses ont paru de trois quartiers moins hautes qu'à l'ordinaire ; on fait usage de ses cheveux, Sévigné, 15 mai 1691.
  • 5Ce qu'on paye de trois mois en trois mois pour loyers, rentes, pensions. Il doit deux quartiers de son loyer. Il a mangé d'avance un quartier de sa pension. Plus pâle qu'un rentier à l'aspect d'un arrêt qui retranche un quartier, Boileau, Sat. III. Il [Richelieu] fut obligé de retrancher trois quartiers d'arrérages que le roi devait aux rentiers de l'hôtel de ville, Voltaire, Hist. parl. LIII.

    Il se dit quelquefois de la demi-année lorsqu'il s'agit de payements. On n'a pas encore payé le premier quartier des rentes sur l'État.

  • 6La quatrième partie du cours de la lune. Tout change dans votre pays à chaque quartier de lune, Voltaire, Lett. M. de la Carpe, 25 oct. 1777. Les astronomes disent alors que la lune est dichotome, c'est-à-dire coupée par le milieu ; cette phase s'appelle aussi le premier quartier… le 22e jour, la lune est de nouveau dichotome, c'est ce qu'on nomme le dernier quartier, Delambre, Abr. astron. 14e leçon.
  • 7Portion d'un tout qui n'est pas divisé exactement en quatre parties. Un quartier de gâteau. Un quartier d'orange. Coupant un morceau de viande qu'il met sur un quartier de pain, La Bruyère, Théophr. IX. On emploie six et jusqu'à huit bœufs dans les terrains fermes et surtout dans les friches qui se lèvent par grosses mottes et par quartiers, Buffon, Bœuf.

    Un quartier de terre, un champ d'une certaine étendue. Tu nous étales quelques quartiers de terre que tes parents ont possédés auprès de Besançon, Voltaire, Mél. litt. Lett. à Nonotte.

    Bois de quartier, bois à brûler fendu en quatre.

    Échalas de quartier, échalas faits de bois de chêne fendu, par opposition à ceux de bois blanc.

    Quartier de lard, grande pièce de lard tirée de dessus un cochon.

  • 8Quartiers de pierre, gros morceaux de pierre dont une ou deux font la charge d'une charrette à quatre chevaux.

    On dit de même : quartier de rocher, quartier de marbre. La ville est ornée d'édifices superbes ; d'énormes quartiers de marbre forment son enceinte, Barthélemy, Anach. ch. 76.

    Absolument. J'y écris maintenant cette lettre sur un quartier que les glaces ont détaché du rocher voisin, Rousseau, Hél. I, 26.

    Quartiers de pierre, se dit aussi des pierres de taille dont il y a un certain nombre au mètre cube.

  • 9Dans l'art des constructions, donner quartier à une pièce de bois ou à une pierre de taille qui repose sur un plan horizontal par une de ses faces, c'est la faire tourner autour d'une des arêtes adjacentes, de manière à la faire reposer sur une des faces perpendiculaires à la première.

    En stéréotomie, c'est effectuer les constructions graphiques à l'aide desquelles la pièce de bois ou la pierre de taille se trouvera représentée dans sa nouvelle position.

    Ancien terme de marine. Chacune des trois parties en lesquelles les charpentiers partageaient un navire en construction.

  • 10Quartier de soulier, la pièce ou les deux pièces de cuir qui environnent le talon.

    Quartiers d'un habit, les quatre morceaux principaux qui, quand ils sont assemblés, forment le corps et les basques.

    Terme de sellier. Les quartiers d'une selle, les parties sur lesquelles portent les cuisses du cavalier.

  • 11 Terme d'art vétérinaire. Partie latérale tant interne qu'externe du sabot du cheval.

    Faux quartier, le quartier du sabot du cheval dont la corne est inégale, rugueuse, fendillée.

    On dit d'un cheval à qui l'on a coupé ou qui a perdu un des quartiers de la corne, qu'il fait quartier neuf.

  • 12Certaine partie d'une ville. Commissaire du quartier, de quartier. La populace de son quartier tint conseil, Hamilton, Gramm. IX. Ce quartier [le Palais-Royal], qui est à présent un des plus peuplés de Paris, n'était que des prairies entourées de fossés, lorsque le cardinal de Richelieu y fit bâtir son palais, Voltaire, Comm. Corn. Rem. Menteur, II, 5. Il y a des quartiers entiers à Londres qui ne formaient autrefois qu'un seul couvent, et qui sont peuplés aujourd'hui d'un très grand nombre de familles, Voltaire, Mœurs, 134. Les nations, dit Cicéron, devraient ne se regarder que comme les différents quartiers d'une même cité ; la nature a établi une société générale entre tous les hommes, Condillac, Étud. hist. I, 5.

    Aujourd'hui, Paris est divisé en arrondissements, et chaque arrondissement en quatre quartiers.

    Une certaine étendue de voisinage. Un quartier solitaire. Je suis ravie qu'il soit ici ; je voudrais qu'il y pût demeurer, du moins il ne quittera pas le quartier, Sévigné, 462. Ce perruquier superbe est l'effroi du quartier, Et son courage est peint sur son visage altier, Boileau, Lutr. I. Chez des femmes de bien dont l'honneur est entier, Et qui de leur vertu parfument le quartier, Regnard, le Distrait, I, 6. M. de Fontenelle, qui n'a jamais recherché que les habitants de son quartier, me voyait alors fort souvent, Staal, Mém. t. I, p. 295.

    Faire les visites du quartier, faire des visites de quartier, faire visite aux personnes qu'on veut voir parmi celles qui demeurent dans le quartier où l'on vient s'établir.

    C'est le plaisant de son quartier, le plaisant du quartier, se dit de celui qui est regardé dans son quartier comme un homme réjouissant.

    C'est la gazette du quartier, se dit d'une personne qui rapporte toutes les petites nouvelles, toutes les médisances qu'elle entend dire.

    Nouvelles, bruit de quartier, certaines nouvelles, certains bruits qui n'ont guère cours hors du quartier où on les débite. Malebranche disait qu'il ne faisait pas plus de cas de l'histoire que des nouvelles de son quartier, Voltaire, Mél. litt. Observ. mém. Noailles.

    Médecin de quartier, médecin dont la clientèle est circonscrite dans son quartier.

    Tous ceux qui demeurent dans un quartier. Le quartier était en émoi.

  • 13 Au plur. En parlant des provinces et de la campagne, environs, voisinage. Que son bien la plupart n'est point en ces quartiers, Molière, L'Ét. II, 3. Plus d'un savant persiste à croire qu'il n'y avait aucune ville fermée de murailles dans ces quartiers [la contrée de Jéricho], Voltaire, Philos. Bible expl. Josué.

    Il se dit aussi, au pluriel, du voisinage dans une même ville. Une jeune personne qui loge depuis peu en ces quartiers, Molière, l'Av. I, 2. Ville non fermée, où il y a de la troupe en garnison. Être en quartier. Nous tenons garnison en tel endroit, ce n'est pas une place de guerre, ce n'est qu'un quartier.

  • 14 Terme de guerre. Dans une ville, le bâtiment où une troupe est casernée. Quartier de cavalerie, d'infanterie. Il est tombé sur un quartier de huit cents dragons suédois, les a défaits, et a encloué le canon qu'il ne pouvait emmener, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 348.

    Aujourd'hui, quartier se dit d'un local occupé par des troupes à cheval ; le mot caserne est réservé pour le local occupé par des troupes à pied.

  • 15Le campement ou le cantonnement d'un corps de troupes. Il sera en état de prendre des quartiers en Allemagne, et ne manquera de rien pour vivre, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 226.

    Quartiers de campement, les emplacements qu'occupent dans un camp les corps qui le composent, les parcs d'artillerie, des vivres et fourrages, les ambulances, etc.

    Quartiers de cantonnement, différents lieux, comme petites villes, bourgs et villages, à portée les uns des autres, dans lesquels on partage l'armée.

    Le corps de troupes lui-même, qui est campé ou cantonné. Quatre jours après que M. le Prince eut taillé en pièces quatre quartiers de l'armée du roi…, Retz, IV, 125. M. de Luxembourg a assemblé ses quartiers, et son armée est de seize mille hommes ou environ, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 32.

    Quartier de siége, campement sur l'une des principales avenues d'une place que l'on assiège. Veux-tu que nous te menions au quartier de M. de Turenne [au siége d'Arras] ? Hamilton, Gramm. 5.

    Quartier des vivres, le lieu où est logé l'équipage des munitions de bouche.

    Quartiers de fourrage, espèces de quartiers de cantonnement où l'on met les troupes lorsqu'elles ne peuvent pas rester ensemble, au commencement ou à la fin de la campagne, à cause de la disette de fourrage.

    Quartier du roi, quartier impérial, quartier du général, et, plus communément, quartier général, lieu choisi au centre du camp ou de la position, et où est établi le logement du roi ou du général qui commande en chef. Je vais demain au quartier général, Hamilton, Gramm. 3. La plus grande mortification qu'ils eurent fut d'être obligés de le suivre au quartier du roi de Suède, Voltaire, Charles XII, 3. Plusieurs imprudences venaient d'être commises : on ignore par quel ordre, au quartier impérial, on avait osé retenir à leur passage, et pour la garde, plusieurs convois de vivres qui appartenaient à d'autres corps, Ségur, Hist. de Nap. V, 2.

    Le quartier général est aussi la réunion des officiers qui composent l'état-major général. Le quartier général arrive ici demain.

    Quartier d'assemblée, le lieu où les troupes se rendent pour de là marcher en corps, et aussi où les différents corps doivent se rendre toutes les fois qu'il faut prendre les armes, et en cas d'alarme.

    Le quartier d'assemblée est aussi une ville où les soldats d'un corps se rendent pour y passer la revue.

    Mettre l'alarme au quartier, avertir les troupes qui composent le quartier de se tenir sur leurs gardes.

    Fig. Mettre ou donner l'alarme au quartier, débiter quelque nouvelle qui donne de l'inquiétude à ceux qui y ont intérêt.

    On dit de même : l'alarme est au quartier.

  • 16Quartier d'hiver, l'intervalle de temps entre deux campagnes.

    Le lieu où on loge les troupes pendant l'hiver. Voilà tout le Palatinat et quasi tout le Rhin à nous, voilà de bons quartiers d'hi ver, voilà de quoi attendre en repos les résolutions de l'empereur et du prince d'Orange, Sévigné, Lett. à Bussy, 3 nov. 1688. M. de Turenne a bien envie de revenir, et de mettre l'armée où se trouve mon fils dans les quartiers d'hiver, Sévigné, 169. Je ne sais si tout ce que dit Tite Live des suites funestes qu'eurent les quartiers d'hiver passés par l'armée carthaginoise dans cette ville délicieuse [Capoue] est bien juste et bien fondé, Rollin, Hist. anc. Œuvr. t. I, p. 446, dans POUGENS.

    Fig. La philosophie est entrée en quartier d'hiver ; Dieu veuille qu'on l'y laisse respirer ! D'Alembert, Lett. à Voltaire, 18 oct. 1760.

    Quartier de rafraîchissement, le lieu où des troupes fatiguées vont se remettre pendant que la campagne dure encore. Leur armée [des ennemis] est entre Diest, Malines et Louvain, et ils la vont mettre en des quartiers de rafraîchissements, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 344.

  • 17 Terme de marine. Quartier des classes, se dit de certaines divisions de la population maritime. Les arrondissements maritimes sont divisés en sous-arrondissements, et ceux-ci en quartiers.

    Sur les galères, chacune des trois parties de la chiourme, ramant à son tour. Quartier de proue. Quartier du milieu. Quartier de poupe.

  • 18 Endroit désigné pour quelque chose, comme logement des veneurs, des chiens et de l'équipage de chasse, Massé, 1766.
  • 19Résidence. …Ayez soin qu'on la mène Comme fille royale au quartier de la reine, Mairet, Sol. III, 9. Prépare ton départ, et pense à ta retraite ; Pour en délibérer et choisir le quartier, De grâce ma bonté te donne un jour entier, Corneille, Méd. II, 2. Le roi scythe… remercia son libérateur, et, après l'avoir tendrement embrassé, rentra dans son quartier pour appliquer le dictame sur ses blessures, Voltaire, la Princ. de Babyl. I.

    Rentrer au quartier, rentrer chez soi, se retirer. Bacchus m'appelle et je rentre au quartier, Béranger, Ode à la gloire.

    Il se dit aussi, en termes de chasse, du lieu où est la bête. 30 octobre 1686 : Le roi, au sortir de table, alla tirer en volant ; il trouva, en cherchant des perdrix, un gros sanglier dans son quartier ; il mit une balle dans son fusil et le tua, Dangeau, I, 407.

  • 20Dans les colléges, les salles d'étude des écoliers. Le quartier de rhétorique.

    Maître de quartier, maître chargé de surveiller les écoliers dans leur quartier.

    Les élèves d'un quartier. Le quartier de seconde se révolta.

  • 21Espace de trois mois, quart d'année, servant à désigner des fonctions où l'on se relève de trois en trois mois. L'année est divisée en quatre quartiers. Les quartiers de janvier, d'avril, de juillet, d'octobre. Le duc de Noailles arriva pour servir son quartier de capitaine des gardes, Saint-Simon, 189, 30.

    Cet officier est de quartier, ou en quartier, il sert actuellement les trois mois pendant lesquels il est obligé de servir. Le roi régla que le poêle serait tenu par l'évêque nommé de Metz, et par l'aumônier du roi du quartier qui se trouverait de jour, Saint-Simon, 51, 106.

    Fig. Il [M. de Grignan] devrait bien… renvoyer toutes les fantaisies ruineuses qui servent chez lui par quartier, Sévigné, 5 juin 1680.

    On dit dans le même sens : entrer en quartier, sortir de quartier.

    Officiers de quartier, ceux qui servent par quartier, par opposition à ceux qui sont ordinaires et qui servent toute l'année.

    Médecin par quartier, médecin qui sert auprès d'un souverain par quart d'année.

    Fig. et par plaisanterie. Un sien amant étant lors de quartier, La Fontaine, Gag.

    Fig. Avoir des amants par quartier, avoir des amants qui n'occupent chacun qu'une partie du cœur. L'on ne doit point avoir des amants par quartier ; Alidor a mon cœur et l'aura tout entier, Corneille, Place Roy. I, 1.

  • 22 Terme de généalogie. Chaque degré de descendance dans une famille noble, tant du côté paternel que du côté maternel. Il faudrait ramasser en deux mots tout ce qu'on trouve de grand dans toutes les histoires qui parlent de l'illustre maison de Bavière, passer de même les cent vingt-quatre quartiers dont les preuves paraissent dans un livre nouvellement imprimé, Scudéry, les Conversations, dialogue. Eh bien je m'adoucis, votre race est connue ; Depuis quand ? répondez ; depuis mille ans entiers, Et vous pouvez fournir deux fois seize quartiers, Boileau, Sat. v. Le besoin d'argent a réconcilié la noblesse avec la roture, et a fait évanouir la preuve de quatre quartiers, La Bruyère, XIV. Vous, insolent ! répondit le baron, vous auriez l'impudence d'épouser ma sœur, qui a soixante-douze quartiers, Voltaire, Candide, 15. Un baron allemand, un écuyer d'un abbé de Fulde n'eût point épousé Catherine ; mais Pierre le Grand ne pensait pas que le mérite eût auprès de lui besoin de trente-deux quartiers, Voltaire, Russie, anecdotes.
  • 23 Terme de blason. La quatrième partie d'un écusson écartelé. Il porte au premier quartier de… au second de… etc. On place dans le premier quartier les armes de la maison principale, et dans les autres quartiers les alliances. Je suis persuadé que vous ne désavoueriez pas pour parents les princes de ces maisons, que vous en porteriez le deuil quand ils viendraient à mourir, et que vous mettriez leurs armes dans vos quartiers, Caillères, Bon et mauv. usage, convers. 1.

    Parties d'un grand écusson qui contient des armoiries différentes, bien qu'il y en ait plus de quatre. Ce prince porte dans ses quartiers les armes de plusieurs royaumes. Des chiffres à l'entour et de grands écussons, Qui par divers quartiers nous marquent les maisons Des illustres aïeux dont est sorti Lisandre, Hauteroche, Bourg. de qual. I, 2.

    Franc-quartier, premier quartier d'un écusson, à droite du chef, et qui offre quelques autres armes que celles de l'écu.

  • 24Vie sauve ou traitement favorable fait aux vaincus. Il vaut mieux prendre quartier que de s'exposer à une mort certaine, Descartes, Pass. 211. Ils ne donnaient point de quartier, et ne faisaient point de prisonniers, Perrot D'Ablancourt, Tac. 457. Vivant de rapt, faisant peu de quartier, La Fontaine, Cal. On lui demanda s'il voulait quartier ; il dit que non, Sévigné, 214. Il avait le mousqueton haut, et lui criait de loin bon quartier, Hamilton, Gramm. 5.

    Fig. et familièrement. Demander quartier, demander grâce. Le chevalier de Vendôme a demandé quartier de plaisanterie à M. de Vivonne, qui ne s'épuisait point sur l'horreur qu'il avait de se battre ; l'accommodement s'est fait, Sévigné, 15 déc. 1673. Vous êtes malade, ma chère enfant… cette pauvre tête si bonne, si bien faite… vous demande quartier, Sévigné, 1er avr. 1689. Ne veillez plus, n'imprimez plus, le public vous demande quartier, La Bruyère, VIII.

    Fig. Point de quartier, sans quartier, d'une façon inexorable. Point de quartier ; immuable est la loi, Molière, Amphitr. III, 7. Sied-il bien de tenir une rigueur si grande, De vouloir sans quartier les choses qu'on demande ? Molière, Tart. IV, 5.

    Fig. Ne point faire de quartier, ne pas épargner. Je respecterai toujours, comme de raison, la religion, le gouvernement, et même les ministres ; mais je ne ferai point de quartier à toutes les autres sottises, et assurément j'aurai de quoi parler, D'Alembert, Lett. à Voltaire, 27 fév. 1765.

    L'origine de cette locution n'est pas certaine. De Brieux dit qu'elle vient de ce que les Hollandais et les Espagnols étaient autrefois convenus que la rançon d'un officier ou d'un soldat se payerait d'un quartier de sa paye ; de sorte que, quand on ne voulait point recevoir à merci, on disait à l'ennemi : c'est en vain que tu offres un quartier de tes gages, on n'en veut point, il faut mourir. Cela ne paraît pas vraisemblable, à cause que les intermédiaires manquent. Si l'on prend en considération les anciennes locutions prendre quartier, donner quartier, donner bon quartier, on sera porté à croire que quartier au sens de vie sauve provient de quartier au sens de logis, résidence ; donner quartier, serait donc recevoir en son logis, à sûreté.

  • 25 Terme d'architecture. Quartier tournant, les marches qui sont dans l'angle d'un escalier et qui tournent autour du noyau.

    Quartier de vis suspendue, portion d'escalier destinée à raccorder deux appartements qui ne sont pas de plain-pied.

  • 26Morceau de métal laminé que le batteur d'or soumet à l'action du marteau.

    Peau qui doit être ajoutée à un soufflet.

  • 27 Terme d'ardoisière. Franc-quartier, banc où se tient l'ardoise de bonne qualité.
  • 28À quartier, loc. adv. à part. Je pouvais demeurer à quartier, et regarder le combat sans être de la partie, Malherbe, le Traité des bienf. de Sénèque, IV, 12. … Écoute Quatre mots à quartier…, Corneille, Mélite, V, 6. Un fourneau que les ennemis avaient fait à l'un des bastions, n'a fait aucun mal, parce que les soldats virent la terre branler et se jetèrent à quartier, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 316. Elle m'a dit tout bas Qu'à vous prendre à quartier je ne manquasse pas, Th. Corneille, Baron d'Albikrac, IV, 1. Monsieur Villot (vous savez qui c'est) y était aussi à côté de la porte, où il se tenait comme à quartier, et dans une humble contenance, Marivaux, Marianne, Part. 6.

    Tirer à quartier, prendre à part. Mais un page du roi tire Osman à quartier ; Ne désespérons pas ; il lui donne un papier, Mairet, Soliman, V, 8. Voilà ton maître et la marquise qui s'approchent ; tire-le à quartier, lui, pendant que je m'éloigne, Marivaux, l'Heur. stratag. III, 2.

    Mettre à quartier, mettre de côté, écarter. On ne prend point pour incroyables les incidents de ces deux tragédies [Héraclius et Nicomède] ; et ceux qui savent le désaveu qu'en fait l'histoire la mettent aisément à quartier pour se plaire à leur représentation, Corneille, Disc. tragéd. Mettons à quartier les généalogies de tous ces dieux, aussi fausses que celles qu'on imprime tous les jours des hommes, Voltaire, Dict. phil. Polythéisme.

    Ne rien laisser à quartier, ne rien omettre. Ne m'importunez point de votre tablature ; Sans vos instructions, je sais bien mon métier, Et je n'en laisserai pas un trait à quartier, Corneille, la Suiv. II, 1.

HISTORIQUE

XIIe s. [Il] Fiert [frappe] l'amoraive [l'émir] sur l'escu de quarter, Ronc. p. 62. Dedans [il] l'en [lui en] boute [de la lance] une aune et un quarter [quart], ib. p. 97. Cuivers, bastars, je ne t'en quier mentir ; à mon quartier te convient revenir, As escuiers te covient revertir, Raoul de C. 89.

XIIIe s. Quiconques est liniers à Paris, il puet et doit vendre soulement en gros par poignées, par pesiaus, par cartiers, Liv. des mét. 145. Jehans proposa contre Pierre, et dist à Pierre qu'il li devoit un quartier de blé, Beaumanoir, XXVI, 2.

XIVe s. Regardez si le cheval a piés gras et combles, piés fendus, faulx quartiers, Ménagier, II, 3. Et seroient payés tous ceux qui en ce voyage iroient pour un quartier d'an, Froissart, II, III, 18. Ils firent tendre et traire les voiles contre mont, et vinrent au vent de quartier [vent qui souffle un peu à côté de la pouppe], sur destre, pour avoir l'avantage du soleil, Froissart, I, I, 12. Si tost que le chevalier vit le pillier, il le recongneut ; car aultreffois avoit esté au quartier, Perceforest, t. VI, f° 56. Si chevaucherent tout le jour jusques sur le vespre ; car le soleil estoit entré en son dernier quartier, ib. t. II, f° 36. Le chemin estoit trop malaysé pour le secourir, pour ce que en ce quartierlà sont tous rochiers, Commines, II, 3. Si fit tailler une robe qui lui trainoit plus de trois quartiers [trois quarts d'aune], Louis XI, Nouv. XCIV.

XVIe s. Il [un habit] n'estoit pas si neuf comme il l'avoit prins ; car il l'avoit fait servir ses trois quartiers, Despériers, Contes, XXVI. Ledict marquis, voyant mettre le feu [à un canon], se lancea à quartier [à l'écart], Montaigne, I, 49. Au quartier par où les Portugalois escornerent les Indes, Montaigne, I, 54. Un gentilhomme de ce quartier de Gascoigne, Montaigne, I, 344. On l'estrangla, puis on le meit à quartiers, Montaigne, II, 130. C'est l'orgueil qui jecte l'homme à quartier des voyes communes, Montaigne, II, 224. Un bon quartier [étendue] de pays, Lanoue, 599. Quelques soldats rapporterent que, vers le quartier des lansquenets, on n'y faisoit pas trop bonne mine, Lanoue, 600. La cavallerie alla prendre quartier ailleurs, Lanoue, 667. Il fallut affermir le marets à force cailloux et gros quartiers, que l'on jetta au fond à pierre perdue, Amyot, Cimon, 24. La beste estoit desja immolée et les quartiers dessus l'autel, Amyot, Agésil. 8. Les mutins se saisirent d'un quartier de la ville, ou est le temple de Diane, Amyot, ib. 52. Si le feit fortifier [son camp] de tranchées, et departir par quartiers, Amyot, Eum. 30. Grombac fut mis vif à quatre quartiers, D'Aubigné, Hist. I, 235. Les cinq navires qui suivoient celui du comte, voulant prendre à quartier [se retirer] du combat, s'eschouent, D'Aubigné, ib. II, 210. Ayant commandé aux valets de se tenir aussi en bataille, le long de la dite compaignie, un peu à quartier, et non derriere comme on a accoustumé, Carloix, III, 15. Il faut la levée de mil arpens ou quartiers de bois taillés pour entretenir lesdites fournaises, Palissy, 259. Au quartier [dans le coin] dudit theatre et joignant le costé de l'autel y avoit une table dressée, Bellievre Et Sillery, Mém. p. 412, dans LACURNE. Tous le trouverent bon, et ne voulurent pas faire quartiers [se séparer], mais que tous deux iroient ensemble, Montluc, Mém. t. II, p. 402, dans LACURNE. Avoir un quartier de la lune en la teste, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. catei ; provenç. quartier, cartier ; du lat. quartarius, qui est proprement une certaine mesure, dérivé de quartus (voy. QUART 1).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

QUARTIER.
2Ajoutez :

Le cinquième quartier, nom donné à Paris aux issues des animaux de boucherie, Journ. offic. 19 janv. 1872, p. 410, 2e col. Pour le cinquième quartier, composé des suif, cuir et abats rouges, Extr du Journ. d'Agr. prat. dans Journ. offic. 17 fév. 1874, p. 1319, 2e col.