« pierre », définition dans le dictionnaire Littré

pierre

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pierre

(piè-r') s. f.
  • 1Corps dur et solide, de la nature des roches, qu'on emploie, entre autres, pour bâtir. Allons briser ces dieux de pierre et de métal, Corneille, Poly. II, 6. Alger [bombardé par du Quesne] … tes maisons ne sont plus qu'un amas de pierres, Bossuet, Mar.-Thér. Aux accords d'Amphion les pierres se mouvaient, Et sur les murs thébains en ordre s'élevaient, Boileau, Art p. IV. Jacob consacra la pierre qui lui avait servi de chevet pendant le songe mystérieux de l'échelle, et nomma Galaad le monceau de pierres qui fut le signe de son alliance avec Laban, Fleury, Mœurs des Israél. t. II, 1re part. La persuasion où était Tournefort que les pierres végétaient, Bonnet, Consid. corps organ. Œuvr. t. v, p. 374, dans POUGENS. On rapporte que, la 2e année de la 78e olympiade, il tomba du ciel, en plein jour, une pierre auprès du fleuve Égos, dans la Thrace, Bailly, Hist. astr. anc. p. 203. Les pierres sont des combinaisons naturelles des divers oxydes, renfermant quelquefois, mais comme principes accessoires, des acides, des combustibles et des sels, Thenard, Traité de chimie, t. IV, p. 115. dans POUGENS. Certaines pierres ont la propriété d'être sonores, presque à la manière des métaux ; cette propriété a surtout été remarquée par les Chinois, qui ont fait avec ces pierres des instruments de musique, Brongniart, Traité de min. t. I, p. 265, dans POUGENS. Le rayon qui blanchit ses vastes flancs de pierre [du Colisée], Lamartine, Méd. II, 20.

    Ouvrage à pierre perdue, voy. PERDU.

    Pierres sèches, pierres posées l'une sur l'autre sans mortier. Un mur en pierres sèches.

    Il n'y reste pas pierre sur pierre, l'édifice est détruit de fond en comble. Voyez-vous tous ces grands bâtiments ? ils seront tellement détruits qu'il n'y demeurera pas pierre sur pierre, Sacy, Bible, Évang. St Marc, XIII, 2.

    On dit dans le même sens : ne pas laisser pierre sur pierre. Le premier exploit de ce jésuite féroce et fougueux fut la destruction de Port-Royal, où l'on ne laissa pas pierre sur pierre, D'Alembert, Dest. des Jésuit. Œuvr. t. v, p. 225, dans POUGENS.

    Geler à pierre fendre ; une douleur qui fend les pierres, voy. FENDRE, n° 3.

    Être comme une pierre, demeurer muet, immobile, stupéfait. Nous demeurâmes tous comme des gens de pierre, Sévigné, 68. À tous ces beaux discours j'étais comme une pierre, Ou comme la statue est au Festin de Pierre, Boileau, Sat. III.

    Un cœur de pierre, une âme de pierre, une personne très dure. Des âmes dures comme des pierres, des âmes insensibles, et que rien ne peut émouvoir, Bourdaloue, Exhort. char. env. les pauv. t. I, p. 45.

    Fig. Remuer toutes les pierres, voy. REMUER.

  • 2Pierre en chantier, celle qui est disposée pour être taillée.

    Pierre nette, celle qui est équarrie et atteinte jusqu'au vif.

    Pierre verte, ou pierre velue, celle qui est encore telle qu'on l'a tirée de la carrière.

    Pierre retournée, celle dont les parements opposés sont d'équerre et parallèles.

    Pierre pleine, pierre qui ne renferme ni coquillages, ni trous, ni nœuds.

    Pierre parpaigne, voy. PARPAING.

    Pierre d'attente, voy. ATTENTE.

    La pierre d'attente est aussi une pierre en bossage, pour recevoir quelque ornement ou quelque inscription.

    Pierre angulaire, voy. ANGULAIRE.

    Pierre fondamentale, voy. FONDAMENTAL. n° 1.

    Pierre de taille, voy. TAILLE.

    Première pierre, gros quartier de pierre dure ou de marbre, qu'on place dans les fondements d'un grand édifice, avec quelques médailles dans une entaille, ou une inscription sur une table de bronze. Poser la première pierre d'un édifice.

    Dernière pierre, celle où l'on grave quelque inscription, ou un chronogramme, pour faire connaître le temps auquel l'édifice a été achevé.

  • 3Nom de pierres employées à divers usages.

    Pierre à aiguiser, pierre qui sert à rendre les instruments de fer plus pointus, plus tranchants.

    Pierre d'artillerie, pierre arrondie qui servait primitivement de boulet.

    Pierre d'autel, la pierre sur laquelle le prêtre consacre, et qui a été consacrée auparavant par un évêque.

    Pierre à broyer, pierre d'un grain très fin et très serré, dont on se sert pour broyer les couleurs.

    Pierre à brunir, caillou taillé en coude, dont on se sert pour polir l'or.

    Pierre d'évier, synonyme d'évier.

    Pierre à laver, pierre plate dont le dessus est légèrement creusé, et qui sert à laver la vaisselle.

    Pierre milliaire, borne placée dans les grands chemins, pour faire connaître les distances.

    Pierre à papier, morceau de marbre, qui a un bouton pour le prendre, et dont on se sert pour mettre sur les papiers.

    Terme de paveur. Pierre coupée ou biseau, pavé coupé triangulairement pour terminer une rangée posée diagonalement.

  • 4Nom donné à diverses pierres suivant leur apparence, leur usage, leur provenance, etc.

    Pierre d'aigle, voy. AÉTITE.

    Pierre d'aimant, synonyme d'aimant.

    Pierre d'Arménie. On nomme pierre d'Arménie des pierres ou quartzeuses ou calcaires, pénétrées et colorées par le cuivre azuré, Brongniart, Traité de min. t. II, p. 221, dans POUGENS.

    Pierre calcaire, toute pierre que l'action du feu réduit en chaux ; pierre à chaux, la pierre dont on fait ordinairement la chaux.

    Pierre de foudre, pierre de l'air, aérolithe.

    Pierre à fusil ou pierre à feu, caillou qu'on frappe avec le briquet, avec le fusil, pour faire du feu, nom vulgaire du silex pyromaque. Le caillou propre à faire des pierres à fusil n'est pas commun dans la nature ; beaucoup de pays en sont entièrement privés ; et peut-être même pourrait-on dire que la France possède presque seule la variété du silex exigée pour être facilement taillée en pierres à fusil, Dolomieu, Instit. Mém. sc. t. III, p. 352.

    Pierre de gallinace, obsidiane ou agate d'Islande.

    Pierre gypseuse, toute pierre que l'action du feu réduit en plâtre ; pierre à plâtre, chaux sulfatée dont on fait le plâtre.

    Pierre d'Italie, schiste argileux à grains serrés dont on se sert pour le dessin.

    Pierre de jade, synonyme de jade.

    Pierre de Labrador, espèce de feldspath.

    Pierre de lard, pierre à magots, voy. STÉATITE.

    Pierre lithographique, voy. LITHOGRAPHIQUE.

    Pierre de la lune, agate nébuleuse à reflets.

    Pierre de meule, pierre de meulière, pierre meulière, voy. MEULE 1, et MEULIÈRE.

    Pierre de mine, pierre dont on tire le métal.

    Pierre noire, nom donné par les menuisiers et les charpentiers au schiste argileux charge de carbone (nommée ampélite, s. f., par les minéralogistes modernes), et qu'ils emploient pour faire leur tracé.

    Pierre noire, nom d'une pierre qui fait partie du temple de la Mecque bien avant Mahomet, et qui est vénérée par les pèlerins ; on croit que c'est un aérolithe ; elle a été brisée par les Wahabites. Abou-taher, chef des Karmates, avait, en l'année de 317 de l'hégire, inondé la Mecque et son temple sacré du sang des pèlerins et enlevé la pierre noire, Silvestre de Sacy, Inst. Mém. hist. et litt. anc. t. IV, p. 5.

    Pierre ponce, voy. PONCE.

    Pierre rouge, sanguine.

    Pierre de tonnerre, voy. TONNERRE.

    Pierre de touche, voy. TOUCHE.

    Pierre de violette, nom donné à certaines roches qui ont cette odeur, dont la cause est inconnue ; telles sont : le gneiss de Mittelberg en Allemagne, et le granit rose des Vosges.

    Pierre vitrescible ou vitrifiable, toute pierre que l'action du feu réduit en verre.

    Pierre de Volvic, lave semi-poreuse d'un beau gris

  • 5Le morceau de pierre ou de marbre qui recouvre la fosse d'un mort. Mon âme est tombée dans la fosse, et ils ont mis sur moi une pierre, Sacy, Bible, Jérémie, Lament. III, 53. Je ne demande qu'une pierre sur ma tombe avec ces mots : Le grand Frédéric l'honora de ses bienfaits et de ses bontés, D'Alembert, Lett. au roi de Prusse, 12 août 1770. Sous le chêne on creusa sa tombe ; Mais son amante ne vint pas Visiter la pierre isolée, Millevoye, la Chute des feuilles. Malheur à qui des morts profane la poussière ! J'ai fléchi le genou devant leur humble pierre, Lamartine, Méd. I, 22.
  • 6Pierre levée, voy. PELVAN.
  • 7 Terme mystique. Le fondement de l'Eglise. Et moi aussi je vous dis que vous êtes Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon église, Sacy, Bible, Évang. St Matthieu XVI, 18. Il a bâti son Église sur la pierre, Bossuet, Hist. II, 9.

    La pierre de l'angle, le soutien essentiel ; locution prise de la pierre de l'angle, qui, faisant le coin des maisons et appartenant à deux murs, est nécessairement plus solide que les autres. Jésus-Christ, qui est lui-même la principale pierre de l'angle, Sacy, Bible, St Paul, Ép. aux Éphés. II, 20.

    Pierre de scandale, chose ou personne qui scandalise. Cet esprit d'infidélité qui serait pour elles une pierre de scandale et un écueil où elles iraient échouer, Bourdaloue, 15e dim. après la Pentec. Dominic. t. III, p. 452.

  • 8La pierre considérée comme un fragment, un morceau. Certain fou poursuivait à coups de pierre un sage, La Fontaine, Fabl. XII, 22.

    Les pierres du chemin, les cailloux qui sont dans le chemin

    Fig. Je suis toujours à trouver certaines choses fort mal arrangées parmi les événements de notre vie : ce sont de grosses pierres dans le chemin, trop lourdes pour les déranger, Sévigné, 30 mai 1672.

    Fig. Trouver des pierres en son chemin, voy. CHEMIN, n° 1.

    Fig. Mordre la pierre, s'en prendre dans ses maux à celui qui n'en est pas la véritable cause (comme les chiens mordent la pierre dont ils sont frappés).

    Pierre d'achoppement, voy. ACHOPPEMENT.

    Fig. La pierre en est jetée, s'est dit au lieu de : le sort en est jeté. Il n'en faut plus parler, la pierre en est jetée, Racan, Arténice, II, 3.

    Jeter des pierres, lancer des pierres avec la main.

    Fig. La première pierre qu'on jeta suffit pour renverser ce grand monument [l'Église catholique en Angleterre] dès longtemps ébranlé par la haine publique, Voltaire, Mœurs, 135. Jeter le premier la pierre, jeter la première pierre, s'est dit, au propre, dans la lapidation chez les Juifs, de celui qui jetait le premier la pierre au condamné. Que celui d'entre vous qui est sans péché lui jette le premier la pierre, Sacy, Bible, Évang. St Jean, VIII, 7.

    Fig. Jeter la première pierre, être le premier à attaquer, à accuser quelqu'un. Monseigneur sera paqueté contre son fils [le duc de Bourgogne], et le premier à lui jeter la pierre, Saint-Simon, 195, 113. Quelle femme aurait le droit de jeter la première pierre à l'infortunée qui ne justifie point sa faute ? Staël, Corinne, XVII, 2.

    Fig. Jeter la pierre à quelqu'un, dire du mal, le rendre l'objet d'accusations. Tous presque lui jettent la pierre, Massillon, Carême, Médis.

    Fig. Jeter la pierre et cacher le bras, se dit d'un homme qui fait du mal si secrètement qu'on ne le soupçonne pas.

    Il a jeté des pierres dans mon jardin, voy. JARDIN, n° 1.

    Fig. Faire d'une pierre deux coups, se dit quand on fait deux affaires du même coup, ou d'une chose qui sert à deux fins. On a fait d'une pierre deux coups : on s'est ménagé des effets de lumière pour le dessous de ces arcades, et l'on a masqué l'unique défaut d'un des plus beaux morceaux d'architecture qu'il y ait au monde, Diderot, Salon de 1767, Œuv. t. XIV, p. 280, dans POUGENS.

    Par exagération. Les pierres mêmes parleront, se dit de quelque fait révoltant qui soulève la conscience publique.

    Dans un sens analogue. Je vous réponds que votre commission sera bien faite, et que les pierres mêmes le sauront, D'Alembert, Lett. à Voltaire, 12 janv. 1773.

    Fig. Je le mènerai par un chemin où il n'y a point de pierres, voy. CHEMIN, n° 1.

    Populairement. Être malheureux comme les pierres, être très malheureux.

  • 9Pierres précieuses ou gemmes, nom donné à des minéraux d'origine ignée, précieux à cause de leur rareté, de leur belle couleur ou de leurs formes cristallines, formés en général d'alumine et de silice, et colorés par des oxydes métalliques, tels que ceux de fer, de manganèse, de cuivre, etc. Mille pierres de prix sur ses bords étalées, D'un mélange divin éblouissant les yeux, Corneille, Médée, II, 5. Son fait, dit-on, consiste en des pierres de prix : Un grand coffre en est plein, fermé de dix serrures, La Fontaine, Fabl. X, 10. Le diamant, le rubis, la vermeille, la topaze, le saphir et le girasol sont les seules pierres précieuses du premier rang, Buffon, Min. t. VII, p. 408.

    Fig. Notre âme est un trésor caché, c'est un or très fin dans de la boue ; c'est une pierre précieuse parmi les ordures, Bossuet, 2e sermon, Passion, 2.

    Pierres fines, les agates, les onyx, les cornalines, etc.

    Pierres fausses, celles qui imitent les pierres précieuses.

    Pierres de couleur, les rubis, les saphirs et autres pierres colorées.

    Pierre, absolument, se dit quelquefois du diamant. Voilà une belle pierre.

    Pierre sur cire, se disait des pierres fines, non montées, que l'on fixait, comme on le fait de nos jours, dans de la cire appliquée sur des feuilles de carton, De Laborde, Émaux, p. 441.

    Terme de lapidaire. Pierres taillées en table, ou pierres faibles, se dit de diamants qui ont de la superficie sans être épais, et dont on se contente de dresser les deux principales faces.

  • 10Pierres gravées, pierres fines ou compositions imitant les pierres fines sur lesquelles on a gravé des figures. Quelques pierres gravées de Gai, qui étonneront les antiquaires à venir, Diderot, Salon de 1765, Œuv. t. XIII, p. 27, dans POUGENS.

    Pierres d'affection, nom donné aux pierres curieuses, et, particulièrement, aux diamants de couleurs vives et riches.

    Pierre figurée, toute pierre qui représente les traits de différents corps organisés.

    Pierre de Florence, marbre jaune ou verdâtre chargé de dessins en forme de ruines. Il a expliqué la formation des pierres de Florence, qui sont des tableaux naturels de plantes, de buissons, quelquefois de clochers et de châteaux, Fontenelle, Lafaye.

  • 11Nom donné vulgairement aux concrétions qui se forment dans les reins, dans la vessie et dans quelques autres organes du corps. Pierre rénale. Pierre vésicale. Pierre biliaire.

    Absolument. La pierre, se dit de la pierre de la vessie. Elle est accablée de douleur et d'une néphrétique qui fait craindre qu'elle n'ait la pierre, Sévigné, 524. Sous prétexte de le faire tailler de la pierre, Bossuet, Hist. I, 9. Le fameux remède de la pierre, connu sous le nom de mademoiselle Stéphens, Mairan, Éloges, Bremond.

    Fig. et familièrement. Il a une mauvaise pierre dans son sac, c'est-à-dire il est en danger, il est en proie à quelque mal, locution que disent non rarement ceux qui sont affectés de la pierre, et qui provient probablement de cette maladie.

  • 12Pierres d'écrevisse, voy. ÉCREVISSE.

    Pierre de bézoard, synonyme de bézoard.

    Terme de pêche. Nom d'os durs, plats, qu'on trouve dans le cerveau des merlans.

  • 13Espèce de concrétion qui se trouve dans quelques fruits. Les poires de Saint-Germain ont souvent des pierres.

    S'est dit pour noyau. Là, la pomme et la poire, et la guigne et la prune, D'une bonté de goût en ce lieu peu commune, Font peine à bien juger quel est de meilleure eau Ou bien le fruit à pierre, ou le fruit au couteau, Corneille, Poés. div. Presbyt. d'Hénonv.

  • 14Nom donné à divers composés artificiels.

    Pierre de Bologne, synonyme de phosphore de Bologne. À Bologne, il travailla sur la pierre qui porte le nom de cette ville, et lui rendit toute sa lumière, car le secret en avait été presque perdu, Fontenelle, Homberg.

    Pierre à cautère, composé d'hydrate et de carbonate de potasse, de protoxyde et de chlorure de potassium qui sert à faire des cautères.

    Pierre à détacher, sorte de composition dont la base est de la glaise, et qui sert à enlever les taches des habits.

    Pierre divine, composé de sulfate de cuivre, d'azotate de potasse et de sulfate d'alumine, à parties égales, qu'on fait fondre dans un creuset en ajoutant du camphre à la masse fondue, et qu'on emploie en collyre.

    Pierre infernale, azotate d'argent, qui sert à cautériser.

    Pierre de lait, substance argileuse qui sert à dégraisser.

  • 15Pierre philosophale, voy. PHILOSOPHAL.
  • 16Pierre artificielle, se dit des briques.

    Pierre pourrie, argile qui a perdu son liant et dont on se sert pour polir les métaux.

    Terme de verrerie. Pierres de sable, concrétions qui se trouvent dans les matières en fusion, au moment de la coulée.

    Terme d'ardoisier. Pierre rude, veine d'ardoise contenant une telle proportion de pyrite que la fabrication devient difficile et onéreuse.

    Terme de peinture. Pierre de fiel, couleur jaune qui tire un peu sur le brun.

    Pierre bleue, poudre de pastel, formée en très petites briques, dont on se sert quelquefois au lieu d'indigo pour donner au linge une légère teinte bleue.

    PROVERBE

    Pierre qui roule n'amasse pas de mousse, c'est-à-dire celui qui change souvent de métier, de profession, ne fait pas fortune.

HISTORIQUE

XIe s. Pierre n'i a qui toute ne seit neire, Ch. de Rol. LXXVI.

XIIe s. Que eve seut [a coutume de] percer la piere bise, Couci, X. E Deus [Dieu] dist à saint Piere e as clers, bien le sai : Tu ies Pieres, e sur ceste piere ferai M'iglise, e ma meisun i edifierai, Th. le mart. 79.

XIIIe s. Tybers, ce dist Morans, dur cuer as comme pierre, Berte, X. Une pierre precieuse qui estoit aussi grosse comme un oef, Chr. de Rains, p. 237. Pierre volanz ne quelt mouce [ne recueille pas de mousse], Prov. du vilain, ms. de St-Germain, f° 76, dans LACURNE. Partonopex et Melior S'entretiennent com pierre en or, Partonop. ms. de St-Germ. f° 163, dans LACURNE. Elle n'est pas com autre dame, Si com je pens, de cors et d'ame, Ains est ou de pierre ou de fier, Car tant a le cuer dur et fier, Baudouin de Condé, t. I, p. 375.

XIVe s. Pour ce loyaument faire par les sermens que j'ai faits, je n'ay ne entens porter sur moy ne sur mon cheval paroles, pierres, herbes, charmes, Ordonn. de Philippe le Bel sur les duels. Cy après s'ensuyvent plusieurs pierres entaillées, lesquelles sont appelées pierres d'Israel, selon les saiges philosophes, les aucunes sont artificielles, c'est à dire qu'elles ont esté ouvrées, De Laborde, Émaux, p. 443. Une attache, qui fut à la royne Jehanne de Bourbon, garnie de pierres faulces, c'est assavoir doublaiz rouges et voirres verds, à xv troches de perles chacune de iiij perles, De Laborde, ib. p. 442. Une petite croix d'or, à pierres de voirre, De Laborde, ib. Une petite boeste où dedans sont pendans, à une chaisnette d'or chacune, deux pieres en or, bonnes contre le venin, c'est assavoir une petite teste de serpent noire, nommée lapis albazahan, et un autre petit osselet blanc quarré, De Laborde, ib. p. 445. Les cueurs ne sont pas toujours en un estat : pierre vire et cheval chiet [tombe], Le Chev. de la Tour, Instr. à ses filles, f° 34, dans LACURNE.

XVe s. Dame, dist le chevalier, toute personne doit doubter sa perte ; car la pierre chet voulentiers sur le plus malheureux, Perceforest, t. III, f° 74. Certaine quantité de cire que l'on nomme une pierre, pesant treize livres, Du Cange, petra. Un grant tableau d'une pierre à toucher or, De Laborde, Émaux, p. 445. L'une luy dit un brocard, l'autre luy jette des pierres en son jardin, Les quinze joyes du mariage, p. 49, dans LACURNE. Plus de semblant ne fait [au commerce des femmes] que si de pierre estoit, Bouciq. IV, 7.

XVIe s. La pouldre, la pierre, le rouet d'une pistole, Montaigne, I, 362. La plus aspre de toutes [les douleurs], c'est la pierre à la vessie, Montaigne, II, 31. Ce legier present, pour mesnager d'une pierre deux coups, servira aussi, s'il vous plaist, à vous tesmoigner l'honneur et reverence que je porte à votre suffisance, Montaigne. Lettre au chancelier de l'Hospital, 30 avril 1570. Il fallut affermir le marets à force cailloux et gros quartiers que l'on jetta au fond à pierre perdue, Amyot, Cimon, 24. Ce fut à vous de vous retirer en diligence par des chemins esgarez, où il n'y avoit point de pierres, Sat. Mén. p. 144. Les bachats remuerent toutes pierres, pour que leur empereur ne receut pas affront à sa premiere besongne, D'Aubigné, Hist. III, 428. Puisque la pierre est jettée, il n'y a plus de remede, Des Accords, Bigarrures, Avant-propos, p. v, dans LACURNE. Et le feit loger en l'esvesché, où chascun jour estoit traité comme la pierre en l'or, Hist. du chev. Bayard, p. 328, dans LACURNE. Il est fort aisé à faire des expeditions et des grands miracles de guerre avec de grandes armées où rien ne manque et où il y a tout à souhait ; mais de faire de pierre pain comme on dit, ainsi que fit Dragut, c'est là où est la peine, Brantôme, Cap. estr. t. II, p. 75, dans LACURNE. Pierre en puis n'est pas pourrie, Cotgrave Il n'est pas masson qui pierres refuse, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Bourg. piarre ; wallon, pîr ; provenç. petra, peira, peya ; catal. pedra ; espagn. piedra ; ital. pietra ; du lat. petra ; grec, πέτρα.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

PIERRE.
4Ajoutez :

Pierre d'évêque, l'améthyste. On sait que cette pierre précieuse [l'améthyste] est un quartz hyalin coloré par de l'oxyde de manganèse et offrant toutes les nuances du violet ; on l'appelle vulgairement pierre d'évêque, parce qu'elle sert à orner les bagues des prélats, Journ. offic. 11 avril 1876, p. 2621, 2e col.