« éprouver », définition dans le dictionnaire Littré
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éprouver
- 1Reconnaître par une opération si une chose a la qualité requise. Éprouver une arme à feu, une cuirasse. C'est un remède que j'ai éprouvé.
Je les épurerai comme on épure l'argent, et je les éprouverai comme on éprouve l'or
, Sacy, Bible, Zachar. XIII, 9. - 2Mettre à l'épreuve, en parlant des personnes. Éprouver son ami.
Celui qui n'a point été éprouvé, que sait-il ?
Bossuet, Politique, X, II, 7.Il [Théophraste] avait coutume de dire qu'il ne faut pas aimer ses amis pour les éprouver, mais les éprouver pour les aimer
, La Bruyère, Disc. sur Théoph.Il se dit aussi des choses.
Sans doute qu'il voulait éprouver votre zèle
, Racine, Esth. I, 3.Tranquillisez mon cœur, vous l'éprouvez sans doute
, Gresset, Méchant, v, 7. - 3Hasarder, risquer.
Va contre un arrogant éprouver ton courage
, Corneille, Cid, I, 5.Quand tu vins du monstre éprouver l'aventure
, Th. Corneille, Ariane, III, 4.Et qu'en me réduisant à la nécessité D'éprouver contre lui ma faible autorité
, Racine, Brit. I, 2. - 4Faire subir des épreuves, mettre en des difficultés ou des souffrances qui donnent occasion au mérite.
Dieu nous éprouve en toutes manières
, Bossuet, Lett. Corn. 33.Jupiter vous éprouve, mais il ne veut pas votre perte ; au contraire, il ne vous éprouve que pour vous ouvrir le chemin de la gloire
, Fénelon, Tél. IX. - 5Apprendre par sa propre expérience. J'éprouvai, mais trop tard, que…
- 6Ressentir. On éprouve sur cette montagne un froid très rigoureux. Éprouver du plaisir.
Pensez-vous avoir seul éprouvé des alarmes ?
Racine, Andr. II, 2.La Middleton allait éprouver comme il s'y prenait pour tourmenter, après avoir éprouvé ce qu'il savait pour plaire
, Hamilton, Gramm. 7.Mon cœur Éprouve à son nom même une secrète horreur
, Voltaire, Fanat. III, 2.J'éprouvais ses plaisirs, ses peines, ses goûts, ses aversions
, Diderot, Règne de Claude et Néron, liv. II, § 1.Éprouver, suivi d'un qualificatif.
Quoi qu'il en soit, depuis que je vous vois chez elle, Toujours de plus en plus je l'éprouve cruelle
, Corneille, Illus. com. II, 1.Je lui dois d'un ami le secours et la foi ; Il ne l'éprouvera légère ni perfide
, Crébillon, dans DESFONTAINES. - 7Subir. La forme du gouvernement éprouva de grandes altérations.
Dieux ! que le crime seul éprouve enfin vos coups !
Voltaire, Œdipe, I, 3. - 8S'éprouver, v. réfl. Être éprouvé.
L'or et l'argent s'épurent par le feu ; mais les hommes que Dieu veut recevoir au nombre des siens s'éprouvent dans le fourneau de l'humiliation
, Sacy, Bible, Ecclésiastique, II, 5.Se mettre soi-même à l'épreuve.
Portant partout le trait dont je suis déchiré, Contre vous, contre moi, vainement je m'éprouve
, Racine, Phèd. II, 2.Saint Paul ordonnait aux fidèles de s'éprouver avant que de venir manger le pain de vie
, Massillon, Car. Parole.Tout homme qui est l'esclave d'un tempérament fâcheux, aigri par la malignité, poussé par des motifs déshonnêtes, n'est capable ni de s'éprouver lui-même ni de découvrir la vérité, ni de la faire entendre aux autres
, D'Holbach, Ess. préj. ch. 8, dans DUMARSAIS, Œuvres, t. VI.Se mettre l'un l'autre à l'épreuve. Ils ne voulaient pas se battre, mais seulement s'éprouver.
Tenter aventure.
Contre un si grand courage il voulut s'éprouver
, Racine, Alex. v, 2.
HISTORIQUE
XIe s. De vasselage [vaillance] [il] est souvent esprovet
, Ch. de Rol. CCXVII.
XIIe s. [Elle le fait] Por esprover se por mal [je] recreroie [renoncerais]
, Couci, VIII. Tant [j']ai d'amor mon fin cuer esprové, Que jà sans li n'aurai joie certaine
, ib. XI. N'esprovez plus sur moi vostre vengeance
, ib. XVII. Car au besoin est amis esprovez
, Bat. d'Aleschans, v. 2635.
XIIIe s. Je di que c'est grant folie D'essaier ne d'esprover Ne sa fame ne s'amie
, Auboins de Sezanne, Romanc. p. 126. Mais, espoir [sans doute], ce m'a grevé, Qu'on ne connoit boin servise, Tant qu'on ait autre esprové
, ib. p. 127. Bien est vos traïsons veüe et esprovée
, Berte, XVI. Le punt vus estuet [il vous faut] espruver, Cum vus porrez outre passer
, Marie de France, Purgat. 1276. Entor le jardin va et vient Por veoir et por Sesprover e jà peüst partuis trover, Par où il se peüst enz metre
, Ren. 4999. Par Diex, compains, gardés-vous en, Et vous efforciez bien de croire Ma parole esprovée et voire
, la Rose, 8030.
XIVe s. Et tel jugement font ceulx qui espreuvent les vins et qui assaveurent et confisent les salses [sauces] et les potages
, Oresme, Eth. 94. Se vous avez perdu, n'aiez le cuer marri ; Dieux vous veult esprouver se vous estes à lui
, Guesclin. 12326. C'estoient toute gent d'estoffe souffisant, Qui esprouvé avoient esté en combattant
, ib. 10758.
XVe s. Ils s'esprouverent si bien et si vassalement qu'ils obtinrent la place et l'eau [dans un combat naval]
, Froissart, I, I, 122. Et s'avisa qu'il se viendroit eprouver à celui qui estoit plus prochain de sa baniere
, Froissart, I, I, 140. Ce Croquart chevauchoit une fois un jeune coursier fort embridé, que il avoit acheté trois cents escus, et l'esprouvoit au courir
, Froissart, I, I, 325. Le vaillant et gentil chevalier Bouciquaut et ses bons et esprouvés compaignons, Dieu merci, n'eurent mal ne blessure
, Bouciq. I, 16.
XVIe s. Et si dit d'avantage qu'il ne falloit pas que les bestes sauvages mesmes de l'Afrique demourassent sans esprouver la force et la fortune des Romains
, Amyot, Pomp. 20. …Comme s'il eust eu à s'esprouver à l'encontre d'un Isocrates ou d'un Anaximenes, et non pas à manier et redresser un peuple
, Amyot, Cic. et Dém. Elle luy monstra sa bleceure, et luy compta comment elle se l'avoit faitte pour s'esprouver elle mesme
, Amyot, Brutus, 14. Ce qui plus espreuve et qui plus descouvre la nature de l'homme, c'est la licence et l'authorité d'un magistrat [le pouvoir]
, Amyot, Cic. et Dém. 4. Ou voir Meduze, ou au cours [à la course] s'esprouver Avecques Atalante…
, Du Bellay, J. VII, 25, verso.
ÉTYMOLOGIE
É- pour es- préfixe, et prouver ; Berry, épreuver ; bourguig. eprovai ; provenç. esproar.