« éprendre », définition dans le dictionnaire Littré
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éprendre (s')
- 1Se mettre à, s'attacher à, en parlant du feu.
Si quelquefois le feu s'éprend en ces corps
, Descartes, Météor. 2. - 2 Fig. Se laisser entraîner par quelque passion, quelque sentiment. Il s'est épris d'une belle passion pour cette femme.
On a touché mon âme, et mon cœur s'est épris
, Corneille, Cinna, I, 2.Ah ! lorsqu'elle m'a vu, si son âme surprise, D'une ombre de pitié du moins s'était éprise
, Voltaire, Scythes, III, 1.Je m'épris pour elle de l'inclination la plus tendre
, Marivaux, Marianne, 7e part.Qu'il étudie les plus grands maîtres, qu'il s'éprenne davantage de la simplicité
, Diderot, Salon de 1767, Œuvres, t. XIV, p. 318, dans POUGENS. - 3 V. a. Éprendre, inspirer amour, amitié.
Et l'amour qui pour lui m'éprit si follement
, Corneille, Mél. III, 5.Beauté, le cher souci de tant de beaux esprits, Qui d'une douce flamme avez mon cœur épris
, Racan, Berg. II, 5.Sa vertu, sa douceur, sa politesse, tout m'avait épris de lui
, Saint-Simon, dans GODEFROY, Gloss. de Corn.
REMARQUE
Éprendre, v. actif, qui n'est pas dans l'Académie, ne se trouve qu'au figuré, et est très bon.
HISTORIQUE
XIe s. Saut en li fus [l'étincelle], que l'erbe en fait esprendre
, Ch. de Rol. CCLXXXVII.
XIIe s. Ou cierge espris ou lanterne embrasée
, Ronc. p. 157. Ses blanches mains, ses doigts lons et tretis, Qui font l'amour enflamer et esprendre
, Couci, v. Ce est la riens dont je sui plus espris
, ib. XVII. Et se je sui de vostre amour espris, Douce dame, ne m'en doit estre pis
, ib. D'ire et de mautalent [il] esprent tous [tout entier] et atise
, Sax. XXIII. Maintenant li esprist [rougit] la chiere
, Lai d'Ignaurès.
XIIIe s. Si commença li feus si grant à esprendre que…
, Villehardouin, LXXX. Et la vile [Constantinople] commença à esprendre et alumer mout durement, et ardi toute cele nuit et l'en demain jusques à la vesprée
, Villehardouin, CVI. Tant sont espris de joie que nuls d'eus ne parla
, Berte, CXXII. Toz reverdis et esprendans, [elle] Li a geté ses iex [yeux] es suens [siens]
, Lai de l'ombre. De son lit saut toz estordiz ; Si a une chandoile prise ; Au feu en vient, si l'a esprise
, Ren. 3412. Tant est graindre la covoitise Qui esprent mon cuer et atise
, la Rose, 3798.
XIVe s. Je me doubte forment qu'au jour d'ui ne perdez ; Trop voi vos ennemis espris et alumez
, Guesclin. 14778.
XVe s. Le clocher s'esprenoit à ardoir
, Froissart, II, II, 95. La bonne femme esprinse de joie
, Louis XI, Nouv. XI. Avoit ung chevalier au dehors du tournoy, esgardant et esprenant l'alaine de son pis
, Perceforest, t. I, f° 141.
XVIe s. Esprins d'une extreme passion de honte
, Montaigne, I, 11. Il faut tenir, tirer et pousser la partie qui est ici esprise de douleur
, Paré, Introd. 2. La fureur, qui esprent ceulx qui sont inspirez d'esprit prophetique
, Amyot, Rom. 33. Toute la ville se trouva esprise d'une superstitieuse crainte
, Amyot, Solon, 19. Tous espris de sommeil et de vin
, Amyot, Cam. 42. Il fut incontinent espris par un regard et un parler affetté, comme si c'eust esté quelque jeune garson
, Amyot, Sylla, 72.
ÉTYMOLOGIE
É- pour es- préfixe, et prendre ; wallon, esprende, allumer ; provenç. esprendre.