« solide », définition dans le dictionnaire Littré

solide

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

solide

(so-li-d') adj.
  • 1Qui a de la consistance, dont les particules demeurent naturellement dans la même situation, par rapport les unes aux autres ; il est opposé à liquide et à gazeux. Les parties solides du corps animal sont les os, les cartilages, les muscles, les tendons, les vaisseaux, les nerfs, les membranes, les ligaments, etc. La mécanique des corps solides n'étant appuyée que sur des principes métaphysiques et indépendants de l'expérience, D'Alembert, Œuvr. t. XIV, p. 196.

    Terme de géométrie. Angle solide, figure formée par plusieurs plans qui se coupent au même point.

  • 2Aliment solide, par opposition à aliment liquide. Le médecin lui a interdit tous les aliments solides ; il ne prend rien de solide.

    Fig. Ils auraient besoin de lait, et ils exigent de nous une nourriture solide, Massillon, Carême, Élus.

  • 3Qui a une consistance capable de résister au poids, au choc, au temps ; par opposition à fragile et peu durable. Bâtir sur des fondements solides. Cet édifice est beau, mais il n'est pas solide. Voilà des meubles solides. L'édifice n'est pas plus solide que le fondement, Bossuet, Duch. d'Orl.

    En termes d'architecture, il se dit quelquefois pour massif, plein.

    Terrain solide, terrain consistant, sur lequel on peut bâtir en toute sécurité.

    Terme de minéralogie. Roche solide, roche dont les parties sont liées fermement entre elles.

    Terme de zoologie. Antennes solides, celles dont les articles sont soudés de manière à ne présenter aucun intervalle.

  • 4Dans la conversation, on donne souvent à solide le sens de fort. Des bras solides. Un solide gaillard. Un solide coup de poing. Poignet solide. Si je veux définir ces vents glacés tellement solides qu'ils renversent des tours, Cyrano de Bergerac, Contre l'hiver.
  • 5En termes militaires, il se dit d'une troupe capable de tenir ferme devant l'ennemi. C'étaient [les soldats des cohortes] des soldats de vingt-deux à vingt-sept ans, gens robustes, un peu raisonneurs, mais destinés à former une infanterie solide et intrépide, Thiers, Consul. et Emp. XLVII. Notre armée [à Wagram], toujours aussi brave, était cependant moins expérimentée que celle d'Austerlitz ou de Friedland, et trop nombreuse, mêlée d'éléments trop divers, pour être ferme, solide, manoeuvrière autant qu'autrefois, Thiers, ib. XXX.
  • 6Il se dit des couleurs de bon teint. Une couleur solide.

    Terme de peinture. Coloris solide, coloris dont les tons sont nets et vigoureux.

  • 7 Fig. Réel, effectif, durable, par opposition à frivole, chimérique. La solide vertu dont je fais vanité…, Corneille, Hor. II, 4. Des solides plaisirs je n'ai suivi que l'ombre, La Fontaine, Poés. mêl. LXIX. Quelques secours puissants qu'on promette à ma flamme, Mon plus solide espoir, c'est votre cœur, madame, Molière, F. sav. IV, 8. Je paye mes ouvriers en blé, et je ne trouve rien de solide que de s'amuser et de se détourner de la triste méditation de nos misères, Sévigné, 228. Si vous demeurez sur la frontière, l'amitié solide y trouvera son compte ; et, si vous revenez, l'amitié tendre sera satisfaite, Sévigné, à Bussy, 25 nov. 1655. La solide gloire dont il [Turenne] était plein, sans faste et sans ostentation, Sévigné, 16 août 1675. On dit de solides biens de Mme la Dauphine, Sévigné, 22 mars 1680. Tout ce qui paraît de plus solide [dans le monde] n'est qu'une figure qui passe quand on en veut jouir, qu'une ombre fugitive qui disparaît, Bossuet, Sermons, Oblig. de l'état relig. I. La température toujours uniforme du pays [Égypte] y faisait les esprits solides et constants, Bossuet, Hist. III, 3. Je ne crois pas qu'il y ait rien de solide dans les bruits qui ont couru, Bossuet, Lett. 143. Le solide et l'admirable discours que celui qu'on vient d'entendre ! La Bruyère, XV. Les plus vils métiers ont une fin solide, Fénelon, Dial. 1er sur l'éloq. Des agitations éternelles où il n'entre rien de plus solide que d'en connaître le néant, Massillon, Profess. relig. Sermon 4. Il acheta une grande quantité de livres solides, des livres de morale et de théologie, Lesage, Estev. Gonz. 6. Clément XI, qui occupait alors le saint-siége et qui joignait l'amour des belles-lettres à une solide piété, Mairan, Él. du card. de Polignac.
  • 8Doué de qualités effectives, en parlant des personnes. Vous vous ennuyez des histoires et de tout ce qui n'applique point ; c'est un malheur d'être si solide et d'avoir tant d'esprit, on ne s'en porte pas mieux, Sévigné, à Mme de Grignan, 17 mai 1680. Faites choix d'un censeur solide et salutaire, Boileau, Art poét. IV. Elle aurait souvent voulu qu'on la crût moins solide, pour la laisser se divertir, Mme de Caylus, Souvenirs, p. 24, dans POUGENS. Malheur à ceux qui cherchent des phrases et de l'esprit, et qui veulent éblouir par des épigrammes, quand il faut être solide ! Voltaire, Lett. la Chalotais, 28 février 1763.
  • 9 S. m. Ce qui a de la consistance. Il faut creuser jusqu'au solide, avant de faire les fondations d'un bâtiment.
  • 10Portion de l'étendue, considérée comme ayant les trois dimensions. La pratique de la géométrie des solides a été obligée de se borner à la mesure des grands corps et des corps réguliers, dont le nombre est bien petit en comparaison de celui des autres corps, Buffon, Ess. arithm. mor. Œuvr. t. X, p. 214. Il est certain qu'un solide qu'on plonge dans une liqueur, et qui est en même temps impénétrable à cette liqueur, occupe la place d'un volume de cette liqueur parfaitement égal au sien, Brisson, Traité de phys. t. I, p. 263.
  • 11 Fig. Ce qui est réel, durable, effectif. Je vous conte des bagatelles, je laisse le solide à M. le chevalier [de Grignan], Sévigné, 17 déc. 1688. Vanité des vanités, et tout est vanité ; et plus l'orgueil s'imagine avoir donné dans le solide, plus il est vain et trompeur, Bossuet, Concupisc. 17. Voulez-vous faire aimer vos riches fictions, Qu'en savantes leçons votre muse fertile Partout joigne au plaisant le solide et l'utile, Boileau, Art poét. IV. Le grand, le solide de la religion prend la place, dans un bon esprit, de tout le frivole qui l'avait amusé, Massillon, Carême, Mot. de conv.

    Familièrement. Le solide, l'argent, la position. Les louanges toutes pures ne mettent pas un homme à son aise ; il faut y mêler du solide, Molière, Bourg. gent. I, 1. Il faut du solide, et un honnête homme ne doit faire le métier de poëte que quand il a fait un bon fondement pour toute sa vie, Racine, Lettr. juin 1661.

  • 12 Au plur. Les solides, les parties solides du corps animal. Les solides et les liquides.

HISTORIQUE

XIIIe s. La terre, qui est li plus griez [pesant] elemens et de plus soude sustance, Latini, Trésor, p. 112.

XVIe s. Ô Pan, grand dieu, j'ay solide memoire Que…, Marot, I, 312. Je n'ay dressé commerce avecques aulcun livre solide, sinon Plutarque et Seneque, Montaigne, I, 154. Il est malaysé d'y establir aucun solide jugement, Montaigne, I, 158. À quelles marques on cognoist le vray et solide contentement, Montaigne, I, 172.

ÉTYMOLOGIE

Lat. sõlidus, de sõlum, le sol (voy. SOL 2). Solide a été refait sur le latin au XVIe siècle ; la forme ancienne et régulière est soude.