« commandement », définition dans le dictionnaire Littré

commandement

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

commandement

(ko-man-de-man) s. m.
  • 1Action de commander. Par vos commandements Chimène vient vous voir, Corneille, Cid, I, 5. Cet amour qui m'expose à vos ressentiments N'est point le prompt effet de vos commandements, Corneille, Cinna, V, 2. Des vaisseaux dans Ostie armés en diligence N'attendent pour partir que vos commandements, Racine, Bérén. I, 3. M. le comte de Guichen, qui venait lui rendre compte du commandement d'une grande flotte et de trois batailles glorieuses qu'il avait livrées, Condorcet, Maurepas.

    Ordre. Messieurs les maréchaux, dont j'ai commandement, Vous mandent de venir les trouver promptement, Molière, Mis. II, 6.

    Jussion. Le roi a envoyé un commandement exprès au parlement de vérifier tel édit. Hors qu'un commandement exprès du roi me vienne De trouver bons les vers dont on se met en peine, Molière, Mis. II, 6.

    Secrétaire des commandements, le principal secrétaire d'un prince. On m'a mandé qu'il [Fréron] allait être secrétaire des commandements de la reine, Voltaire, Lett. en vers et en prose, 144.

    Dans l'ancienne monarchie, secrétaires d'État et des commandements, les quatre secrétaires d'État.

    Lettres signées en commandement, lettres signées par un secrétaire d'État.

    Terme militaire. Ordre bref pour faire exécuter certains mouvements. Attention au commandement !

    Terme de marine. Bâtiment commandé. Cet officier va rejoindre son commandement.

    Terme de civilité. Je n'ai pas voulu partir pour Lyon, sans recevoir vos commandements. Je suis venu à votre commandement dès que vous m'avez averti de venir.

    Avoir quelque chose à son commandement, pouvoir s'en servir à volonté. J'ai dix langues, Cliton, à mon commandement, Corneille, le Ment. IV, 3.

    Avoir une chose à commandement, l'avoir à souhait. S'énoncer clairement et avoir toujours le mot propre à commandement, Voltaire, Lett. en vers et en prose, 37. On n'a pas toujours des idées à commandement ; c'est un coup de la grâce : elle vient quand il lui plaît, Voltaire, Lett. d'Argental, 27 juillet 1763.

  • 2Manière de commander. Il a le commandement doux, rude, bref.

    Avoir le commandement beau, se dit d'un officier qui commande de bonne grâce ; et, ironiquement, d'un homme hautain et despotique qui commande une chose sans en avoir le droit, ou de celui qui commande des choses difficiles ou impossibles à exécuter.

  • 3 Terme de jurisprudence. Acte d'huissier à la requête d'un créancier, par lequel on commande au débiteur de satisfaire à son obligation, en vertu d'un titre authentique ou exécutoire.
  • 4Loi, précepte. Les commandements de Dieu. Les commandements de l'Église. Cette pratique est de commandement, Bossuet, Var. 14. L'état monacal n'est pas de commandement, Bossuet, Projet.
  • 5Pouvoir de commander, autorité. Aspirer au commandement. Prendre le commandement. Il ajouta qu'il était d'avis qu'on lui donnât, comme on avait fait à Pompée, le commandement général sur toutes les flottes de la république, Vertot, Révol. rom. liv. XIV, p. 287. Vous comptez maintenant le nombre de vos campagnes, la distinction de vos commandements, Massillon, Avent, Mort du pécheur. Tel a été à la mode pour le commandement des armées et la négociation, ou pour l'éloquence de la chaire, ou pour les vers, La Bruyère, XIII.

    Bâton de commandement, bâton qui est pour certains officiers le signe du commandement.

  • 6On dit qu'une place a plusieurs commandements, c'est-à-dire qu'elle peut être battue du canon par des hauteurs qui la dominent. Commandement de front, celui d'une hauteur qui est opposée à un poste, qui le bat par devant. Commandement de revers, celui qui bat le poste par derrière. Commandement d'enfilade, celui qui bat d'un seul coup toute une ligne droite.

SYNONYME

COMMANDEMENT, ORDRE, INJONCTION. Étymologiquement, le commandement est l'action de recommander ; l'ordre, l'action de disposer ; l'injonction, l'action d'imposer une obligation. De là découlent les nuances de l'usage. Commandement tantôt incline du côté du sens de précepte, comme les commandements de Dieu, de l'Église, où ordre ne peut pas se dire, tantôt exprime une action directe, comme dans les commandements qu'un officier fait à ses soldats ; ici encore ordre ne conviendrait pas. Au contraire, toutes les fois qu'il s'agira d'un ensemble de dispositions, on emploiera ordre et non pas commandement : le régiment, la troupe reçut l'ordre de partir, et le commandement du colonel la mit en mouvement. Injonction, qui, d'ailleurs, appartient de préférence au langage du pouvoir judiciaire et à l'administration, impose une obligation : Dieu, dit Bourdaloue, enjoint au riche d'entretenir le pauvre. C'est dans ce sens que l'autorité fait des injonctions à ses agents.

HISTORIQUE

XIe s. Ademplir [je] vuil vostre comandement, Ch. de Rol. XXII.

XIIe s. Pour ce est ele [Eve] en son commandement [de l'homme], Ronc. p. 152. Or faites, belle, vostre comandement, ib. p. 172. Mais ma dame servir et honorer, Et faire adès à son commandement, Couci, XII. As reis d'antiquité devriez reguarder, Qui les comandemens Deu ne voldrent guarder, Th. le mart. 78.

XIIIe s. Et il firent tantost son commandement, Villehardouin, LXXVIII. Il ne savoient quant Dieu feroit son commandement d'aus [d'eux], Villehardouin, LXX. La royne s'en va au Dieu commandement [à la recommandation de Dieu], Berte, IX. Et comment tu accompliras Nuit et jour les commandemens Que ge commande as fins amans, la Rose, 2051. Sire, tel vient devant vos come devant son seignor, et vos fait assaveir que Dieu a fait son comandement de tel…, Ass. de J. I, 232. … Si comme aucuns hons de poesté connoit une dete et on li fet commandement qu'il ait paié dedans sept jors et sept nuis, Beaumanoir, XXIII, 2. Et pour ce ne font force li assacis [assassins], se l'en les occist, quant il font le commandement du Vieil de la Montaigne, Joinville, 230. Vous me jurerez, que vous tendrés mes commandemens, Joinville, 263.

XIVe s. Du commandement de très noble et très excellent prince Charles quint de ce nom, par la grace de Dieu, roy de France, Oresme, Prol.

XVe s. Pour ce qu'il avoit trespassé le commandement de son seigneur le roi, Froissart, I, I, 154. Nostre roy qui avoit bien la parolle à commandement, Commines, IV, 10. Plusieurs femmes ont larmes à commandement, Louis XI, Nouv. XII. Comment vous va ? - Et bien vrayement, Tout à vostre commandement, Patelin.

XVIe s. Pleust or à Dieu, pour fuir mes malheurs, Que je vous tinse à mon commandement ! Marot, II, 333. Robertet, secrettaire des commandemens, Lanoue, 565. Il n'a point cerché ambitieusement les commandemens et honneurs, Lanoue, 703. Ilz allerent loger en lieu où ilz eussent l'eau plus à commandement, Amyot, Arist. 38. Mais son commandement fut tard entendu de chascun, Amyot, Nicias, 50. Il a ses gageures de cent pistoles fort à commandement, D'Aubigné, Faen. III, 6. Cette ville est commandée d'un costeau de vignes, où les assiegeans logerent leurs moindres pieces et firent breche à la faveur du commandement, D'Aubigné, Hist. I, 219. Ville en très heureuse assiette, franche de tous commandemens, D'Aubigné, ib. II, 257. La ville fortifiée de brique, et, quoi que près des montagnes, hors de grand commandement, D'Aubigné, ib. III, 405. Ils perd rent 24 hommes, parmi ceux-là six de commandement, D'Aubigné, ib. III, 403.

ÉTYMOLOGIE

Commander ; Berry, c'mandement ; provenç. comandamen ; anc. catal. comandament ; anc. espagn. comandamiento ; ital. comandamento.