« pâtir », définition dans le dictionnaire Littré
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pâtir
- 1Éprouver une souffrance. Il a été longtemps malade, il a bien pâti avant de mourir.
Chacun tremble et frémit à ce spectacle horrible, Et celui qui pâtit paraît seul insensible
, Du Ryer, Scévole, V, 4.Ce sont des sentiments dont vous pâtissez, peut-être…
, Maintenon, Lett. à d'Aubigné, 27 sept. 1684.Pâtir de quelque chose, en souffrir du dommage.
On dit bien vrai que les petits pâtissent toujours des chagrins des grands
, Gherardi, Théât. ital. t. I, p. 291 (le Phénix).Hélas ! on voit que de tout temps Les petits ont pâti des sottises des grands
, La Fontaine, Fabl. II, 4.Les petits pâtissent du malheur des grands, et quelquefois même de leur bonheur
, Voltaire, Lett. Richelieu, 29 avr. 1771.Il n'est pas juste que vous pâtissiez des frivolités de ma jeunesse ; cependant il faut que je vous propose de daigner partager un peu mes faiblesses
, Voltaire, Lett. d'Argental, 12 juin 1776.Pâtir pour quelqu'un, souffrir d'une faute qu'il a faite, d'un tort qu'il a eu.
- 2Avoir du mal, éprouver des privations.
J'ai une tendresse pour mes chevaux qu'il me semble que c'est moi-même, quand je les vois pâtir ; je m'ôte tous les jours pour eux les choses de la bouche
, Molière, l'Avare, III, 5.C'est à force d'expérience, en pâtissant beaucoup, qu'à la fin vous en acquerrez quelque petite lumière [de la vérité]
, Bossuet, Polit. X, II, 7.Quand on a un peu pâti, le plaisir en semble meilleur
, Marivaux, Double inconst. I, 12.Si vous laissez pâtir les enfants, vous exposez leur santé
, Rousseau, Ém. II. - 3Il se dit aussi des choses qui souffrent de l'altération, du mal. Il a fait des excès, sa santé on a pâti. Cet arbre a pâti.
Sous un chêne aussitôt il va prendre son somme, Un gland tombe : le nez du dormeur en pâtit
, La Fontaine, Fabl. IX, 4.Il est vrai, mon oncle, qu'une oreille un peu délicate pâtit furieusement à entendre prononcer ces mots-là
, Molière, Préc. 5.Il se dit, dans un sens analogue, des sentiments qui sont froissés.
Ciel ! que mon cœur pâtit !
Molière, Éc. des femm. II, 2.Ma fierté pâtissait à retourner chez des gens qui m'avaient si mal reçu
, Rousseau, Conf. XI.Près de beauté touchante Mon cœur en vain pâtit
, Béranger, Voc.Nature pâtit, se dit en parlant d'une personne qui se fait violence pour cacher les sentiments pénibles qu'elle éprouve.
- 4 Terme des mystiques. Être dans l'inaction, dans une contemplation paisible et passive.
Il faut expliquer que ce qu'on appelle pâtir et souffrir ou endurer en cette matière [l'oraison passive] n'est pas le pâtir et le souffrir qui est opposé à la joie et accompagné de douleur, mais le pâtir et le souffrir qui est opposé au mouvement propre et à l'action qu'on se peut donner à soi-même
, Bossuet, États d'orais. VII, 2. - 5Endurer, avoir patience (sens qui vieillit).
Mais je ne puis pâtir de me voir rejeté
, Régnier, Sat. II.Avez-vous de la peine à pâtir dans vos traverses, envisagez Jésus-Christ
, Bossuet, Sermon sur le silence, 3.PROVERBE
Les bons pâtissent pour les méchants, se dit quand les actes des méchants attirent sur les bons un mal quelconque, et aussi quand on refuse quelque service à un honnête homme, parce qu'on a été dupe de fripons.Les mutins de Rennes se sont sauvés, il y a longtemps ; ainsi les bons pâtiront pour les méchants
, Sévigné, 20 oct. 1675.Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.
HISTORIQUE
XVIe s. Les dyables ne peuvent par coupz d'espée mourir ; mais ilz peuvent patir solution de continuité
, Rabelais, Pant. III, 23. Si bien que, sans ses grands services, il en eust paty ; tant ce roy estoit grand observateur de la justice
, Brantôme, Duc d'Albe. Il se montra attaint des cruautés qu'il avoit faict en Flandres, et monstra une grande apprehension que son ame en patist
, Brantôme, ib. Il en patit qui n'en peut mais
, Cotgrave †
ÉTYMOLOGIE
Wallon, pati ; provenç. patir ; ital. patire ; d'une forme non latine patiri ou patire, du latin pati, de même radical que le grec παθεῖν. L'espagnol dit padecer, d'une forme non latine patiscere.