« lecteur », définition dans le dictionnaire Littré

lecteur

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

lecteur, trice

(lè-kteur, tri-s') s. m. et f.
  • 1Celui, celle qui lit à haute voix et devant d'autres personnes. C'est un excellent lecteur. De leurs vers fatigants lecteurs infatigables, Molière, Femmes savantes, III, 5. Je suis, de plus, sa lectrice ordinaire ; Ma manière de lire a le don de lui plaire, Collin D'Harleville, Chât. en Esp. III, 2.

    Dans les maisons religieuses, lecteur, lectrice, celui, celle qui fait la lecture pendant le repas.

    Dans les maisons d'éducation, lecteur ou lectrice de semaine, celui, celle qui lit au réfectoire pendant une semaine.

    Chez les princes, celui, celle qui a la fonction de leur faire la lecture à haute voix. Lecteur du roi. Lectrice de la reine. On dit qu'avec cette charge d'écuyer il en vaque une de lecteur ; je suis bien sûr que ce n'est pas un bénéfice simple chez Mme du Maine comme chez le roi, Voltaire, Lett. Mme du Deffant, 1732.

  • 2Celui qui lit seul et des yeux quelque ouvrage. Cet ouvrage a peu de lecteurs. Cet homme est un grand lecteur. Un auteur à genoux, dans une humble préface, Au lecteur qu'il ennuie a beau demander grâce, Il ne gagnera rien sur ce juge irrité, Boileau, Sat. IX. Un lecteur sage fuit un vain amusement, Et veut mettre à profit son divertissement, Boileau, Art p. IV. Rien n'apaise un lecteur toujours tremblant d'effroi, Qui voit peindre en autrui ce qu'il remarque en soi, Boileau, Sat. IX. Un lecteur en use avec les livres comme un citoyen avec les hommes : on ne vit pas avec tous ses contemporains ; on choisit quelques amis, Voltaire, Mél. litt. Cons. à un journal. Je prétends soulever les lecteurs détrompés Contre un auteur bouffi de succès usurpés, Gilbert, Mon apologie. Leurs ouvrages [des Anglais], qu'on ne lit pas sans fruit, sont trop souvent dépourvus de charmes, et le lecteur y trouve toujours la peine que l'écrivain ne s'est pas donnée, Rivarol, Dict. univ. de la langue franç. p. 19.

    En ce sens, il peut se dire d'une femme. Je suis charmé d'avoir pour lecteur cette femme aussi aimable qu'estimable, qui vous a échu en partage dans la grande loterie de la vie humaine, Bonnet, Lett. div. Œuv. t. XII, p. 465, dans POUGENS.

    Mais cet emploi ne peut que s'excuser, et on doit dire lectrice. Les lectrices de cet ouvrage sont plus nombreuses que les lecteurs.

    Avis au lecteur, espèce de petite préface. Si l'on ôte de beaucoup d'ouvrages de morale l'avertissement au lecteur, l'épître dédicatoire, la préface, la table, les approbations, il reste à peine assez de pages pour mériter le nom de livre, La Bruyère, I.

    Fig. Avis au lecteur, c'est un avis au lecteur, se dit d'un conseil ou d'un reproche exprimé d'une manière indirecte et générale. Vous entendez bien ce qu'il vient de dire, c'est un avis au lecteur.

    Il se dit aussi de quelque chose qui peut servir d'avertissement. C'est bien assez… que… à si bon compte encor je m'en sois trouvé quitte ; Ceci doit s'appeler un avis au lecteur, Molière, l'Ét. III, 4. Je suis bien aise de voir votre amitié, et d'avoir entendu le beau panégyrique que vous avez fait de moi ; voilà un avis au lecteur qui me rendra plus sage à l'avenir, Molière, Mal. imag. III, 18. Bientôt se ralluma la discorde civile [à Capoue], Et bientôt l'étranger, s'emparant de la ville, Mit sous un même joug et peuple et sénateurs ; Français, ceci s'appelle un avis aux lecteurs, Andrieux, le Procès du sénat de Capoue.

  • 3Chez quelques ordres religieux, régent, professeur enseignant la théologie, la philosophie.
  • 4Lecteur royal, nom donné autrefois aux professeurs du Collége de France. Joseph Privat de Molières, prêtre, lecteur et professeur de philosophie au Collége royal, Mairan, Éloge de Molières.
  • 5 Terme de musique. Celui qui lit aisément la musique, qui l'exécute à livre ouvert. C'est un fort bon lecteur. Il n'est pas lecteur.
  • 6 Terme de correction typographique. Celui qui lit les épreuves et les corrige. M. Sommer passait pour un excellent lecteur.
  • 7 Terme d'Église. Nom d'un des quatre ordres mineurs de la prêtrise. Sisinne, qui n'était encore que lecteur dans leur Église [des novatiens], Fléchier, Hist. de Théod. III, 19.
  • 8Se dit, dans les universités d'Allemagne et des Pays-Bas, d'un fonctionnaire qui occupe un rang inférieur à celui de professeur.

HISTORIQUE

XIVe s. Je crois que Regnard a esté lecteur [professeur] as ordres des trois estas ; car clers, nobles et gens de labour usent de sa doctrine, je ne dis pas tous, mais les plus, Modus, f° LXVII.

XVIe s. Amy lecteur, Paré, XX, Préf. Un lecteur studieux, Du Bellay, M. Prolog.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. lectre, lector ; espagn. lector ; portug. leitor ; ital. lettore ; du lat. lectorem, de legere, lire. Le provençal lectre est le nominatif, de léctor ; lector est le régime, de lectórem. Ce nominatif serait en français litre, dénomination qui s'était conservée dans une église : Litre ou lecteur, espèce d'officier dans la cathédrale d'Auxerre, Lebœuf, Hist. des évêques d'Auxerre, p. 800, dans LACURNE.