« croquer », définition dans le dictionnaire Littré
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croquer
- 1 V. n. Faire un bruit sec, en parlant des choses que l'on broie en mâchant. Les macarons croquent sous la dent.
- 2 V. a. Manger des choses croquantes. Croquer des pralines.
- 3 Par extension, dévorer.
Le monarque des dieux leur envoie une grue Qui les croque, qui les tue, Qui les gobe à son plaisir
, La Fontaine, Fabl. III, 4.Croquons-les ; le galant ne fit pas à demi
, La Fontaine, ib. V, 18.… Vous leur fîtes, seigneur, En les croquant, beaucoup d'honneur
, La Fontaine, ib. VII, 1.Aussitôt qu'à portée il vit les contestants, Grippeminaud, le bon apôtre, Jetant des deux côtés la griffe en même temps, Mit les plaideurs d'accord en croquant l'un et l'autre
, La Fontaine, ib. VII, 16.Les députés [lapins] retournèrent dire à leurs frères que cet étranger [le chat] n'avait garde de croquer les lapins, puisqu'il croyait en bon bramin à la métempsycose
, Fénelon, t. XIX, p. 52.Fig. et familièrement. N'en croquer que d'une dent, être loin d'avoir obtenu ce qu'on désirait.
Mais ils n'en croqueront, ma foi, que d'une dent
, Regnard, Démocr. IV, 3.Je leur jurerais, de mon côté, que les Thiriot et autres n'en croqueraient que d'une dent
, Voltaire, Lett. d'Argental, 13 juillet 1763.Il a rompu tout net le contrat, à cause de l'aversion qu'il a pour la famille de Cléante… par là vous voyez que ce Cléante n'en croquera que d'une dent
, La Chapelle, Carrosses d'Orl. sc. 10. - 4 Fig. Croquer une fille, un jeune cœur, obtenir les faveurs d'une femme.
[Le jeune homme] Trop bien croyait, ces sœurs étant peu sages, Qu'il en pourrait croquer une en passant
, La Fontaine, Mazet.Par où le drôle en put croquer, Il en croqua ; femmes et filles, Nymphes, grisettes, ce qu'il put, Toutes étaient de bonne prise
, La Fontaine, Pâté.Il eût de la pomme d'Ève, Ah ! Croqué jusqu'au dernier pepin
, Béranger, Turlupin.Turpin d'abord trouve lui-même Cœur de vingt ans non profané ; Mais un bon moine de Télème Le croque à l'instant sous son né
, Béranger, M. de Charl. - 5Faire l'esquisse d'un tableau, d'un portrait.
Croquer le marmot, maugréer en attendant quelqu'un qui ne se presse pas.
Monsieur le nouveau secrétaire, me disais-je pendant ce temps-là, prenez, s'il vous plaît, patience, vous croquerez bien le marmot, avant que vous le fassiez croquer aux autres
, Lesage, Gil Blas, VIII, 3.Croquer le marmot, dit Furetière, attendre longtemps sur les degrés, dans un vestibule, et, en général, en un lieu quelconque ; locution venue de ce que les compagnons peintres, quand ils attendent quelqu'un, s'amusent à faire sur les murailles le croquis de marmots.
Enfant gentil à croquer, d'une gentillesse extrême.
Cela se dit aussi d'une jeune personne très jolie ou très agréable. Elle est jolie à croquer, gentille à croquer, ou, simplement, elle est à croquer.
- 6Faire l'esquisse, l'abrégé d'un discours, d'un récit.
C'est un fait qui mérite d'être un peu expliqué pour réparer ce que j'ai trop croqué en parlant du retour du père [Villeroy]
, Saint-Simon, 170, 13.Je gâte cette pièce par la grossièreté dont je la croque ; c'est comme si un barbouilleur voulait toucher à un tableau de Raphaël
, Sévigné, t. VIII, Lett. 761, p. 31, dans POUGENS.Terme de musique. Croquer des notes, ne pas faire entendre toutes les notes d'un morceau, d'un trait. Croquer un passage, un trait, les passer.
- 7À la croque au sel, loc. adv. Sans autre assaisonnement que du sel. Manger du poulet à la croque au sel. Des artichauts, des radis à la croque au sel.
Populairement et par menace, en parlant d'un homme à qui on se croit très supérieur, je le mangerais à la croque au sel.
HISTORIQUE
XVe s. Or vous retournerez si povres et si nuds que les poux vous estrangleront, et vous les croquerez entre vos ongles
, Froissart, I, III, 18. Il aperçut sur le bord de la cuve un très beau diamant qu'elle avoit osté de son doigt, doutant de l'eau le gaster : si le croqua si souplement qu'il ne fut d'ame aperçu
, Louis XI, Nouv. III.
XVIe s. Vrai est que ces os lui croquoient parfois sous les dents ; mais ils passoient nonobstant
, Despériers, Contes, LXXV. Ils le serroient, le tournoient, le viroient en la foule, pour trouver moyen de croquer [escroquer] cette gibeciere
, Despériers, ib. LXXXI. Il y a aussi de la noblesse, qui pour des querelles qu'elle prend sans propos, ou pour croquer la depouille d'un gros benefice, fait des ports d'armes
, Lanoue, 106.
ÉTYMOLOGIE
Croc, onomatopée.