« tragique », définition dans le dictionnaire Littré

tragique

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tragique

(tra-ji-k') adj.
  • 1Qui appartient à la tragédie. Un acteur tragique. Des succès fortunés du spectacle tragique, Dans Athènes naquit la comédie antique, Boileau, Art p. III. Le comique, ennemi des soupirs et des pleurs, N'admet point en ses vers de tragiques douleurs, Boileau, ib. Les personnages tragiques, Racine, Baj. Préface. Le poëme tragique vous serre le cœur dès son commencement, vous laisse à peine, dans tout son progrès, la liberté de respirer et le temps de vous remettre, La Bruyère, I. Oui, monsieur, je regarde Racine comme le meilleur de nos poëtes tragiques, sans contredit ; comme celui qui le seul a parlé au cœur et à la raison…, Voltaire, Lett. Somarokof, 26 févr. 1769. Pour les comédiens, je ne m'en mêlerai pas ; je ne suis qu'animal tragique, Voltaire, Lett. d'Argental, 1er sept. 1752. Phèdre est peut-être le seul ouvrage de ce grand homme [Racine] où l'amour soit vraiment terrible et tragique, D'Alembert, Lett. à J. J. Rouss. J'aime à voir… de l'Eschyle anglais évoquant la grande ombre, Ducis tremper de pleurs son vers tragique et sombre, Chénier M. J. la Calomnie. Mais, bonjour ; Clytemnestre m'appelle … J'arrange pour demain mes tragiques douleurs, Delavigne, les Comédiens, I, 6.

    Fig. et familièrement. Un ton tragique, un air tragique, un ton, un air qui affecte quelque chose d'alarmant. Je lui dis cela d'un air un peu tragique, Hamilton, Gram. 9.

  • 2 Fig. Funeste. Tragique fureur, Mairet, M. d'Asdr. I, 3. Quittez, quittez, madame, un dessein si tragique, Corneille, Cid, III, 3. Et moi, tout effrayé d'un si tragique sort, J'accours pour vous en faire un funeste rapport, Corneille, Rod. v, 4. N'attendez pas… que j'ouvre ici une scène tragique, que je représente ce grand homme étendu sur ses propres trophées, Fléchier, Tur. L'un ou l'autre fit-il une tragique fin ? Boileau, Sat. VII. Quittez, au nom des dieux, ces tragiques pensées, Racine, Théb. IV, 3.

    Ame tragique, homme occupé de noirs desseins. Ô toi… Dieu… Verras-tu concerter à ces âmes tragiques Leurs funestes pratiques, Et tonneras-tu point sur leur impiété ? Malherbe, VI, 26.

  • 3 S. m. Le genre tragique. Ce poëte s'est voué au tragique. Œdipe, les yeux crevés et encore sanglants, était souffert sur un théâtre immense ; sur nos petits théâtres il eût révolté ; le tragique, en s'affaiblissant, a observé les lois de la perspective, Marmontel, Œuvres, t. v, p. 37.

    Le tragique bourgeois, le drame. Souvent je bâille au tragique bourgeois, Aux vains efforts d'un auteur amphibie Qui défigure et qui brave à la fois Dans son jargon Melpomène et Thalie, Voltaire, Pauvre diable.

    Ce qu'il y a de tragique dans une composition. Je regarde Cinna comme un chef-d'œuvre, quoiqu'il ne soit pas de ce tragique qui transporte l'âme et qui la déchire, Voltaire, Lett. Duclos, 25 déc. 1761. N'est-il pas vrai que le grand tragique ne se rencontre que dans la dernière scène de Rodogune ? mais ce sublime sur quoi est-il fondé ? sur quatre actes bien défectueux, Voltaire, Lett. la Harpe, 25 mai 1764.

    Fig. Prendre les choses au tragique, les considérer d'une manière trop sérieuse, d'une façon triste, alarmante. Il a pris la chose au tragique et m'a fait ôter mon emploi, Beaumarchais, Barb. de Sév. I, 2. Après cet accident, il se retira du monde, tomba en consomption, et mourut ; c'est prendre les choses au tragique, vous en conviendrez, Genlis, Théât d'éduc. Méchant par air, I, 7.

    L'affaire tourne au tragique, menace d'avoir des suites funestes.

  • 4Auteur de tragédies. Personnage [P. Corneille] véritablement né pour la gloire de son pays, comparable, je ne dis pas, à tout ce que l'ancienne Rome a eu d'excellents tragiques, puisqu'elle confesse elle-même qu'en ce genre elle n'a pas été fort heureuse…, Racine, Rép. au disc. de réception de Th. Corneille.

HISTORIQUE

XVIe s. Quand le peuple gemit soubs le faix tyrannique, Quand ce siecle n'est rien qu'une histoire tragique, D'Aubigné, Tragiq. édit. LALANNE, p. 81.

ÉTYMOLOGIE

Lat. tragicus, de τραγιϰὸς, de τράγος, bouc, parce qu'un bouc fut le prix des premiers chœurs tragiques dans l'Attique.