« piper », définition dans le dictionnaire Littré

piper

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

piper

(pi-pé) v. n.
  • 1Faire entendre un petit cri, en parlant du poulet, d'un oiseau. Jusqu'à ce que le poulet casse sa coquille, après avoir pipé ; ce qui arrive ordinairement le vingt-unième jour, Buffon, Ois. t. III, p. 125.

    Activement. Siffler. Il [l'agouti] a la vue bonne et l'ouïe très fine ; lorsqu'on le pipe, il s'arrête pour écouter, Buffon, Quadrup. t. III, p. 89.

  • 2S'est dit pour jouer des pipeaux.

    Fig. Piper à… l'emporter, par une métaphore prise de l'habileté à jouer des pipeaux (cet emploi de piper, qui a donné pimpant, n'est plus usité). En matière de fourbe il est maître, il y pipe, Corneille, le Menteur, III, 3. Deviner des rébus, princesse, est où je pipe, Chaulieu, à la duchesse du Maine.

  • 3Fumer une pipe. On a pipé ici, Gavarni, Fourberies de femmes.
  • 4Contrefaire le cri de la chouette.
  • 5 V. a. Prendre à la pipée. Piper la bécasse.

    Absolument. Il n'a pas pipé un demi-quart d'heure que quatre ou cinq geais et autant de merles sont venus sur l'arbre où il pipait.

    Fig. En amour, il [Béranger] fut mon ouvrage ; J'ai pipé pour cet oiseleur, Béranger, Épit.

  • 6 Fig. Tromper, séduire, enjoler. [L'honneur] Nous fait suer le sang sous un pesant devoir, De chimères nous pipe, et nous veut faire accroire Qu'au travail seulement doit consister la gloire, Régnier, Sat. VI. Le présent ne nous satisfaisant jamais, l'espérance nous pipe, Pascal, Pens. VIII, 2, édit. HAVET. Le plus sage des législateurs [Socrate, dans la République de Platon] disait que, pour le bien des hommes, il faut souvent les piper, Pascal, ib. III, 8. C'était un minois à piper les plus fins, j'y aurais moi-même été attrapé, Lesage, Gil Bl. IV, 5.

    Piper des écus, les escamoter d'une façon quelconque. Rivière aime mieux aller piper quelques pistoles en Dauphiné, Patin, Lett. t. I, p. 239, dans POUGENS.

  • 7Piper des dés, les préparer pour tromper au jeu.

    Piper des cartes, faire à des cartes des signes de reconnaissance.

    Tromper au jeu. Vous pipâtes au jeu, pour douze mille écus, ce jeune seigneur étranger, Molière, Pourc. I, 4.

    Absolument. Au sortir du colysée Mazarin apprit à piper, ce qui lui attira des coups de bâton d'un orfévre de Rome appelé Moreto, Retz, II, 96.

  • 8Se piper, v. réfl. Se faire illusion, tromperie à soi-même. Ce n'est pas l'amusement seul qu'il [le joueur] recherche… il faut qu'il s'y échauffe et se pipe lui-même…, Pascal, Pens. IV, 2.

HISTORIQUE

XIVe s. La saison de piper [prendre à la pipée] au bois as oyseaulx si commence après la Saint-Michel archange et dure tant comme les feuilles sont es arbres, Modus, f° CXXXII, bis. Donques porras tu piper [siffler] de trois manieres : l'une d'une feuille de fau ou d'autre arbre ; l'autre si est d'erbe que on met entre ses levres ; la tierce est d'une pipée de bois, où l'on met une teille bien parée faite d'exglantier, ib. verso.

XVIe s. L'ame se pipe elle-mesme, se dressant un faulx subject, Montaigne, I, 21. Et nous allons quester par là une friande gloire, à piper le sot monde ! Montaigne, IV, 220. Les sens sont pipez par l'entendement, Charron, Sagesse, dans LACURNE. Cartes pipées et dez pipez, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Lat. pipare, siffler : comparez pipeau. Les significations sont : siffler, prendre les oiseaux en sifflant, en imitant leur cri, et, en général, tromper ; d'où piper les dés, les cartes, les falsifier.