« flotte », définition dans le dictionnaire Littré

flotte

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

flotte [1]

(flo-t') s. f.
  • 1Réunion d'un certain nombre de bâtiments marchands ou de vaisseaux de guerre, destinés à naviguer ensemble. …Lorsque, les chassant du port qui les recèle, L'Aulide aura vomi leur flotte criminelle, Racine, Iphig. V, 4. Que ferait-on du vin et de l'eau-de-vie, depuis que les Hollandais et les Anglais n'en vont point charger des flottes entières à Bordeaux, à la Rochelle, à Nantes, si les femmes, devenues grandes buveuses, n'en faisaient une horrible consommation ! Bayle, Lett. à l'abbé Dubois, 3 janv. 1697. Ce sont les Anglais qui les premiers ont rangé leurs forces navales en bataille dans l'ordre où l'on combat aujourd'hui ; et c'est d'eux que les autres nations ont pris l'usage de partager leurs flottes en avant-garde, arrière-garde et corps de bataille, Voltaire, Louis XV, 8. Les flottes guerrières sont sur l'océan ce que sont les forteresses et les remparts pour les citoyens des villes, Raynal, Hist. phil. XVIII, 49.

    Aller de flotte, aller de conserve, ou en compagnie.

    On a dit autrefois métaphoriquement : la flotte est arrivée, pour signifier qu'on a reçu de l'argent après avoir attendu quelque temps ; par allusion aux flottes des Indes.

  • 2La force navale d'une nation. C'est un des meilleurs officiers de la flotte.
  • 3Dans le langage populaire, il signifie quelquefois grand nombre. Il en est arrivé une flotte. Ils étaient là une flotte de badauds. C'est un sens archaïque.

HISTORIQUE

XIIIe s. As noces vint bien atornée, Et des autres i ot grant flote [foule], Et Renart lor chante une note, Ren. 12657.

XIVe s. Tant comme le cheval se pouvoit efforcer, se plongoit dedans les grans flottes de ses ennemis, Chr. de St Denis, t. I, f° 244, dans LACURNE.

XVe s. Adonc demanda le roi : Dites-moi, chevauchent-ils tous en flotte ? - Nennil, sire, ils sont en deux batailles, Froissart, II, III, 19. Arriverent à Bordeaux sur Gironde, toutes d'une flotte, bien deux cens voiles et nefs de marchands du royaume d'Angleterre qui alloient aux vins, Froissart, t. I, p. 433, dans LACURNE. Après avironna [rama] le suppliant, et mena la flette du costé du port, Du Cange, avirunatus.

XVIe s. …Et à flotte [troupe] petite De combatans, par moy fut desconfite… Thebes cité antique, et ses vassaux, Marot, IV, 128. Les Carthaginois guettoient leurs armées au passage avec une grosse flotte de vaisseaux, Amyot, Timol. 9. Ilz firent des deux une seule armée, puis tous d'une flotte voguerent vers la ville, Amyot, Anton. 98. Lesquels passerent la riviere tous de flotte, en eau jusqu'à la ceinture, Montluc, Mém. t. I, p. 95, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Espagn. flota, multitude et flotte ; portug. frota, multitude et flotte ; ital. fiotta, frotta, multitude, flotta, flotte. Flote, dans le vieux français, ainsi que les mots congénères des langues romanes, signifie multitude, et vient, par changement de genre (on trouve aussi dans l'italien, au masculin, fiotto, frotto), du latin fluctus, flot, pris métaphoriquement pour abondance. L'ancien français ne se servait pas de ce mot pour signifier une réunion de vaisseaux, mais de estoire. On a dit flotte de nefs comme flotte de gens. Mais les langues germaniques ont un mot qui signifie réunion de vaisseaux : holland. vloot ; suéd. flotta ; angl.-sax. fliet ; angl. fleet. Ce dernier mot a fourni flete directement comme on peut voir à l'historique ; et, dans tous les cas, ainsi que le remarque Diez, les mots germaniques ont agi sur flotte, multitude, pour y déterminer le sens de réunion de vaisseaux.