« file », définition dans le dictionnaire Littré

file

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

file

(fi-l') s. f.
  • 1Suite, rangée de choses ou de personnes disposées une à une sur une même ligne, les unes derrière les autres. Dans une file d'objets disposés sur une ligne comme le sont, par exemple, les lanternes sur le chemin de Versailles en allant à Paris, Buffon, Homme, t. IV, p. 449, dans POUGENS. De mes quarante dents vois la file effroyable, Voltaire, Marseillais et Lion. Et la porte se referme incontinent après avoir laissé voir au spectateur deux longues files de prêtres et de prêtresses couronnés de fleurs, Voltaire, Lett. d'Argental, 24 févr. 1762. Il fallait bien laisser à la longue file des traîneurs et des malades le temps de joindre, les uns leurs corps, les autres les hôpitaux, Ségur, Hist. de Nap. V, 1. Le reste [de l'armée], dans une proportion effrayante, ressemblait à une horde de Tartares, après une heureuse invasion ; c'était, sur trois ou quatre files d'une longueur infinie, une confusion de calèches, de caissons, de riches voitures et de chariots de toute espèce, Ségur, ib. IX, 1.

    Prendre la file des voitures, mettre sa voiture à la queue des autres.

    Fig. J'emploie le peu [d'heures] qui me reste à vous souhaiter une longue file de prospérités, Voltaire, Lett. Catherine, 107. Dieu a voulu que cette file d'idées vous ait passé par la tête, pour vous donner apparemment quelque instruction dont vous ferez votre profit, Voltaire, Le blanc et le noir. Il y a là une file de tracasseries dans lesquelles je suis bien loin de vous prier d'entrer, et dont je n'ai pas une idée bien nette, Voltaire, Lett. Richelieu, 16 déc. 1771.

    À la file, l'un après l'autre. Les vertus devraient être sœurs, Ainsi que les vices sont frères ; Dès que l'un de ceux-ci s'empare de nos cœurs, Tous viennent à la file…, La Fontaine, Fabl. VIII, 25. Vingt carrosses bientôt arrivent à la file, Boileau, Sat. VI.

  • 2Rangée de soldats qui sont les uns derrière les autres. Il se trouva quatre-vingts files de soldats pesamment armés, chacune de cent hommes ou environ, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. IV, p. 199, dans POUGENS.

    Demi-file, la moitié d'une file ; se disait à l'époque où l'ordre profond était en usage.

    Serrer les files, se rapprocher à mesure qu'un homme manque dans les files. Mon Dieu ! que vous dites bien sur la mort de M. de la Rochefoucauld et de tous les autres ! on serre les files, il n'y paraît plus, Sévigné, 431.

    Doubler les files, augmenter la hauteur d'un bataillon, en en diminuant le front.

    Chef de file, celui qui est le premier d'une file.

    Fig. Je suis votre chef de file…, Bernardin de Saint-Pierre, Mort de Socrate.

    Dans les commandements : Par file à droite, par file à gauche !

    Terme de marine. Chef de file, le vaisseau qui est le premier de la ligne de bataille.

    Serre-file, voy. SERRE-FILE.

    Feu de file, feu d'une troupe où tous les hommes de file en file tirent l'un après l'autre et sans interruption. Dans le langage technique on dit : feu de deux rangs.

  • 3Se dit, vers les Pyrénées, d'arbres droits et élancés. On y coupe [dans les forêts d'Aran, Espagne] chaque année 18000 files propres à faire des chevrons et des soliveaux, Dralet, Traité des forêts d'arbres résineux, p. 188.

SYNONYME

FILE, RANG (dans le langage militaire). Un nombre d'hommes à côté les uns des autres dans une même ligne se nomme un rang ; des hommes mis un à un derrière les uns les autres se nomment une file.

HISTORIQUE

XVe s. Les gens du roy venoient à file par la forest, Commines, I, 3.

XVIe s. Ils entrerent file à file les uns après les autres, et bien tost après les lanskenets les suivirent pour avoir leur bonne part du butin, Castelnau, 241. En la pointe gauche, il ne fut pas ainsi, pource que les files du bataillon ne s'y peurent serrer de près, ny joindre escu contre escu, Amyot, Flamin. 13. Les bataillons passerent presque tous formez, et ce fut pourquoi on les fit oblonts, à la charge de faire front de file…, D'Aubigné, Hist. II, 392. Pour la file [l'envoi] de nos vivres, et pour la seureté du passaige de France en Allemaigne, Carloix, IV, 21. Tantost elles [mes rêveries] se pressent en foule [dans la composition], tantost elles se traisnent à la file, Montaigne, II, 99. …Les hommes devant souloyent mener sans peine La file de leurs ans ; depuis ils vont passant Leurs jours en mille ennuis, soudain envieillissant, Am. Jamyn, Poésies, p. 224, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Fil ; provenç. espagn. et ital. fila.