« félon », définition dans le dictionnaire Littré
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félon, onne
- 1Traître et rebelle ; il se disait d'un vassal qui agissait contre la foi due à son seigneur. Un vassal félon.
- 2 Par extension, traître et méchant.
Faites marcher contre eux des Scythes, des Gelons, Et, s'il se peut encor, des monstres plus félons
, Tristan, Marianne, V, 2.Ainsi montraient leurs cœurs félons Les Saüls et les Absalons, Quand tu les as soumis à celui qui t'adore
, La Fontaine, Poésies mêlées, LXXIV.Il se dit aussi des choses.
L'air de ce pays [l'Afrique] m'a déjà donné je ne sais quoi de félon, qui fait que je vous crains moins, et, quand je traiterai désormais avec vous, faites état que c'est de Turc à More
, Voiture, Lett. 40.Insolence félone
, Du Ryer, Scévole, I, 1.À peine il est entré que les cruelles dents Et les ongles félons [de la lionne] s'impriment dans ses flancs
, La Fontaine, Captivité de St Malc. - 3 Substantivement.
Ne me répondez point, félonne ! j'ai de quoi vous confondre
, Lesage, Turcaret, II, 3.Par leur belle détrempée Les félons seront honnis
, Hugo, Odes, IV, 12.
HISTORIQUE
XIe s. Des plus feluns, dix [il] en ad apelez
, Ch. de Rol. v. Si vengez cels que li fels fist ocire
, ib. XI. Mais tout seit fel [qui] cher ne se vende primes [d'abord]
, ib. CXLI. Ce dist li reis : vous estes mi felun [félons à moi]
, ib. CCLXXVIII. Si come fel qui felonie fist
, ib. CCLXXIX.
XIIe s. Regart de felon
, Ronc. p. 20. Là vit li rois un estor [combat] mout felon
, ib. p. 113. Au mont [monde] n'a [n'y a], voir, si cruel traïson Qu'un bel semblant et courage felon
, Couci, IX. Diex ! quant crieront outrée, Sire, aidez à pelerin, Pour qui [je] sui espouvantée ; Car felon sont Sarrazin
, Dame de Faiel, dans Couci. Car felenesse gent a mult à guverner, Et pur ço li covient mult fier semblant mustrer
, Th. le mart. 107.
XIIIe s. Mout fit, cele journée, felon tems et cuivert
, Berte, XXXIV. Mais chardon felon et poignant M'en aloient moult esloignant
, la Rose, 1683. On ne doit pas tenir le bailli por sage, qui vers toz est fel et cruels
, Beaumanoir, 18. Et ce fesoie-je, pource que les danrées enchierissent en yver, pour la mer qui est plus felonnesse en yver que en esté
, Joinville, 267.
XIVe s. Nous appellons fors et felons ceulx qui se courcent [courroucent] et aïrent là où il ne convenist pas
, Oresme, Eth. 129.
XVe s. Et on dit, et voir est, qu'il n'est si felle guerre que de voisins et d'amis
, Froissart, I, I, 128. Vieillesse felonne et fiere, Pourquoi m'as si tost abattu ?
Villon, p. 29, dans LACURNE.
XVIe s. Le chargeant de felonnes paroles et contumelieuses
, Montaigne, I, 4. Les felons ou dysenteries
, Paré, v, 19.
ÉTYMOLOGIE
Wallon, fel, vigoureux, fort ; provenç. fel, felh, felon, felhon, fellon ; espagn. fellon ; ital. fello, fellone ; du bas-lat. felo, felonis, qui est dans un capitulaire de Charles le Chauve. On ne remonte avec certitude que jusque-là ; quant au reste, l'étymologie est incertaine. On remarquera tout d'abord que le bas-latin felo, felonis, est la bonne forme du mot, puisque le vieux français et le provençal disent au nominatif fel, et au régime felon ; il faut donc un mot où l'accent se déplace ; l'italien y concourt, puisque, disant fello, fellone, il traite ce mot comme il fait latro, latronem, dans ladro et ladrone. On a fait diverses conjectures. On a indiqué le latin fel, bile, d'où un adjectif signifiant bilieux, colère ; mais fel a donné le français fiel, l'italien fiele, l'espagnol hiel ; il est donc probable que, si fel, felon, venait de là, il aurait la forme fiel, fielon. Diez propose l'ancien haut allemand fillan, fouetter ; d'où un substantif fillo, flagellateur, bourreau ; cette étymologie a l'avantage de donner un nom en o, onis ; mais, outre que le sens n'est pas très bon, fillo est un substantif supposé, et on ne connaît que le verbe fillan. Duméril a signalé l'islandais fella, tuer, renverser, anglais to fell ; le sens n'est pas très favorable. Grandgagnage remonte à l'anglais fell, féroce, qui se retrouve dans le hollandais fel, et le vieux frison fal ; ce mot rend assez bien compte du felon des langues romanes, sauf qu'il y manque le sens de traître, sens qui sans doute a donné, par déduction, le sens de faible que, d'après Duméril, felle a en normand. Dans l'ancienne langue le féminin est felonesse ; c'est plus tard qu'on a fait félonne.