« erreur », définition dans le dictionnaire Littré
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erreur
- 1Action d'errer çà et là.
L'autre soleil d'une erreur vagabonde Court inutilement par ses douze maisons
, Malherbe, v, 25.Sur son voyage et ses longues erreurs, On aurait pu faire une autre odyssée
, Gresset, Vert-Vert, I.Contez-moi d'Ilion les terribles assauts, Et vos longues erreurs sur la terre et sur l'onde
, Delille, Én. I.Il se pourrait que vous m'eussiez écrit, car, dans mes longues erreurs, j'ai perdu des lettres
, Courier, Lett. I, 322.Ne se dit, en ce sens, que dans le style élevé ou dans les emprunts faits à ce style.
- 2Action d'errer moralement ou intellectuellement ; état d'un esprit qui se trompe.
Je connais bien l'erreur que l'amour m'a fait faire
, Malherbe, v. 30.L'erreur n'est pas une pure négation, c'est-à-dire n'est pas le simple défaut ou manquement de quelque perfection qui n'est point due, mais c'est une privation de quelque connaissance que je devrais avoir
, Descartes, Médit. IV, 4.Qui chérit son erreur ne la veut pas connaître
, Corneille, Poly. III, 3.Les plus courtes erreurs sont toujours les meilleures
, Molière, l'Étour. IV, 4.Josèphe tomba dans une semblable erreur
, Bossuet, Hist. II, 10.Ce que l'âme connaissait l'induisait à erreur
, Bossuet, ib. II, 6.Je sais sur leurs avis corriger mes erreurs, Et je mets à profit leurs malignes fureurs
, Boileau, Épît. VII.Quelle était mon erreur !
Racine, Bérén. I, 4.Je reconnais l'erreur qui nous avait séduits
, Racine, Iphig. III, 1.Je t'en ai dit assez pour te tirer d'erreur
, Racine, Phèdre, II, 5.Il reconnut son erreur
, Fénelon, Tél. IX.Par l'erreur d'un moment ne jugez pas ma vie
, Gresset, Méchant, IV, 5.Laisser dans l'erreur, ne pas redresser quelqu'un qui se trompe.
Mais ne le laissez pas dans l'erreur davantage
, Corneille, Héracl. IV, 5.Mettre en erreur, faire que quelqu'un se trompe.
Elle, que vos mépris ayant mise en fureur, Rendent opiniâtre à vous mettre en erreur
, Corneille, Perthar. IV, 3.Illusion. L'erreur des sens.
Chacun songe en veillant… Une flatteuse erreur emporte alors nos âmes ; Tout le bien du monde est à nous
, La Fontaine, Fabl. VII, 9.Des ennemis de Dieu la coupable insolence Accuse trop longtemps ses promesses d'erreur
, Racine, Athal. I, 2.Il faut que l'erreur de l'avenir nous soutienne
, Massillon, Car. Prosp.De ce soupçon jaloux écoutez-vous l'erreur ?
Voltaire, Zaïre, I, 5.Où manque un bien réel, la douce erreur abonde
, Delille, Imagin, II. - 3Fausse doctrine, fausse opinion.
Et cette vieille erreur que Cinna veut abattre Est une heureuse erreur dont il [le peuple romain] est idolâtre
, Corneille, Cinna, II, 1.L'erreur et la nouveauté se faisaient entendre dans toutes les chaires
, Bossuet, Reine d'Anglet.Ce dieu, maître absolu de la terre et des cieux, N'est point tel que l'erreur le figure à vos yeux
, Racine, Esth. III, 4.Aller à l'erreur par la vérité et établir de nouveaux abus en voulant rétablir les anciens usages
, Massillon, Confér. Vocat. à l'ét. ecclés. 1.Si l'erreur les dicta, cette erreur m'est utile ; Elle occupe le peuple et le rend plus docile
, Voltaire, Orphel. II, 5.L'erreur n'est pas un crime aux yeux de l'Éternel
, Chénier M. J. Fénelon, III, 1.Erreur populaire, fausse opinion accréditée parmi le vulgaire.
Les erreurs populaires en physique, en médecine, en astrologie, en histoire, telles que le phénix, le rémora, le chant du cygne, le tombeau de Mahomet…
, Du Marsais, Vérit. princ. de la gramm. Œuvres. t. I, p. 228.Elliptiquement, erreur, c'est-à-dire c'est une erreur, vous vous trompez. Vous vous imaginez cela : erreur.
- 4 Au plur. Déréglement dans les mœurs. Il reviendra tôt ou tard de ses erreurs.
De ses jeunes erreurs maintenant revenu, Par un indigne obstacle il n'est pas retenu
, Racine, Phèdre, I, 1. - 5Faute, méprise. Erreur de rédaction.
Erreur de calcul, faute commise dans une supputation.
- 6 Terme d'astronomie. Différence entre le calcul et l'observation.
Erreur d'un quart de cercle, la quantité qu'il faut ajouter aux hauteurs qu'il indique.
Erreur d'une lunette méridienne, la quantité dont elle s'éloigne du véritable méridien.
Erreurs systématiques, erreurs régulières ayant une ou plusieurs causes définies, par exemple des causes qui agissent sur les observations, comme l'imperfection de certains instruments, etc.
- 7 Terme de jurisprudence. Opinion contraire à la vérité sur le fait ou sur le droit, qui détermine à agir. Erreur de fait. Erreur de droit.
Erreur dans la personne, erreur qui consiste à prendre une personne pour une autre.
Lorsqu'il y a erreur dans la personne, le mariage ne peut être attaqué que par celui des deux époux qui a été induit en erreur
, Code Nap. art. 180.Erreur sur la substance, chose prise pour une autre.
L'erreur n'est une cause de nullité que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet
, Code Nap. art. 1110.Erreur commune, erreur partagée par la plupart.
- 8 Terme de médecine. Erreur de lieu, ancienne hypothèse d'après laquelle on admettait que les globules sanguins pouvaient s'engager dans des capillaires trop petits pour les recevoir.
PROVERBE
Erreur n'est pas compte, c'est-à-dire on peut toujours revenir sur une erreur.
REMARQUE
« Erreur est du masculin, » dit Marg. Buffet, Observ. p. 191, en 1668. Erreur, en effet, a été masculin au XVIe siècle, alors qu'on refit du masculin, d'après le latin, les substantifs en eur qui venaient de noms latins en or, qui étaient tous féminins dans l'ancienne langue et qui ont presque tous repris leur genre ancien, excepté quelques-uns, par exemple, amour, honneur, labeur, etc.
HISTORIQUE
XIIe s. Que il ne laissent la voie par error, ou, brisié par lassement, perdent la deserte [le mérite] du travail qui devant est alés
, Job, p. 448. Mais de ce [je] sui en error [troublé], Qu'onques n'amai sans poor [peur]
, Couci, I.
XIIIe s. Et s'il ne les veut croire, ançois se veut tenir en se [sa] malvese erreur, il soit justiciés comme bougres [hérétique] et ars
, Beaumanoir, XI, 2.
XIVe s. Et si est chose perilleuse vivre par innocence en celles humaines erreurs
, Bercheure, f° 28, recto.
XVe s. Si elle avoit fait quelque erreur, le chastis [le châtiment] ne luy en appartenoit pas en public
, Commines, v, 17. Pour eviter tout erreur fabuleux
, J. Lemaire, 3° livre, Prologue, dans PALSGRAVE, p. 166 (qui blâme le masculin).
XVIe s. Afin de retirer tous fideles de cest erreur pestilent
, Calvin, Instit. 323. Là fut soubs toy Moyse ton amy chef de ta gent, qui murmuroit parmy Les longs erreurs de ce desert sauvage
, Du Bellay, J. III, 93, recto. Nous sommes touts en cette erreur
, Montaigne, I, 172. Lors tourna son mespris de la religion en trop craintifve superstition ; et encores infecta il davantage les autres de ce contagieux erreur, par l'inconvenient qui luy advint à sa mort
, Amyot, Numa, 37. Les prestres affermoient qu'il y avoit eu erreur [vice] en leur creation, et qu'ilz avoient esté induement esleus contre les signes et prognostiques des oiseaux
, Amyot, Marcell. 4. Le commun estimoit qu'il fist erreur [eut tort] de laisser l'Attique, qui est païs aspre et malaisé pour gens de cheval
, Amyot, Sylla, 34.
ÉTYMOLOGIE
Provenç. et espagn. error ; ital. errore ; du latin errorem (voy. ERRER).