« balancer », définition dans le dictionnaire Littré
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balancer
- 1Tenir en équilibre, au propre et au figuré. Un danseur de corde qui ne balance pas bien son corps risque de tomber.
Laissez à mes mains Le soin de balancer le destin des humains
, Voltaire, Tancr. V, 2.Terme de commerce. Balancer un compte, rendre égales les sommes du débit et du crédit.
En termes de peinture, se dit des masses, des groupes qui se répondent. Un groupe qui en balance un autre. Balancer une composition, faire que les masses, les groupes s'y balancent. Balancer une figure, en disposer les membres de manière que l'équilibre soit conservé par rapport au centre de gravité.
Terme de marine. Faire que les formes se correspondent ou qu'il y ait équilibre entre les poids et les puissances. Balancer les couples d'un navire, les fixer sur la quille de manière que leur axe se trouve dans le plan qui passe par le milieu de la quille, de l'étrave et de l'étambot.
- 2Mouvoir, agiter un corps tantôt d'un côté, tantôt de l'autre. Balançant son corps à droite et à gauche.
Superbe et pâle de courroux, Il balance dans l'air sa redoutable épée
, Delavigne, Vêp. sicil. V, 2.Dans les forêts que leur souffle balance, Les brises du matin célèbrent son retour [du soleil]
, Delavigne, Paria, I, 5.Terme de manége. Un cheval est dit balancer la croupe, quand son allure n'est pas ferme et que sa croupe vacille.
- 3 Fig. Peser, examiner. Balancer les avantages de la guerre et de la paix.
Après avoir tout balancé, on résolut… Le roi se mit à balancer tantôt son avis et tantôt celui de Parménion
, Vaugelas, Q. C. 255.[Il] Examine en secret sa joie et ses douleurs, Les balance, choisit, laisse couler des pleurs
, Corneille, Pomp. III, 1.Contre un tel attentat, rien n'est à balancer
, Corneille, Héracl. III, 2.Un homme qui ne balance aucune chose
, Molière, Mal. imag. III, 3. - 4Rendre incertain, faire balancer.
Et que son propre sang, en faveur de ces lieux, Balance les destins et partage les Dieux
, Corneille, Sertor. II, 1.Bérénice a longtemps balancé la victoire
, Racine, Bér. II, 2.Ainsi ce roi… Qui, dans l'Orient balançant la fortune, Vengeait de tous les rois la querelle commune
, Racine, Mithr. I, 1.… Les deux partis… Avaient plus d'une fois balancé les hasards
, Voltaire, Henr. I. - 5Égaler en poids, en force, compenser. Appius balançait déjà les tribuns. Les succès furent balancés. Jusqu'ici, dans cette guerre, les succès ont balancé les revers.
Les bienfaits dans un cœur balancent-ils l'amour ?
Racine, Baj. III, 7.Un respect qu'en son cœur rien ne peut balancer
, Racine, Iphig. I, 1.Tu balançais son Dieu dans son cœur alarmé
, Voltaire, Zaïre, V, 10.Lanfranc balançait la réputation de Bérenger
, Voltaire, Mœurs, 45.Hélas ! si tu ne veux qu'éprouver ma vertu, C'est trop me tourmenter ; je la sens qui chancelle : Le besoin la balance et va triompher d'elle
, Gilbert, le Malheureux.Condillac ne peut seul balancer Locke, Descartes, Malebranche et Leibnitz
, Chateaubriand, Génie, III, II, 3.Quels que soient ses forfaits, sa gloire les balance ; Ils sont grands, je le veux ; mais sa gloire est immense
, Arnault, Marius à Mint. III, 1. - 6 V. n. Osciller.
Toutes les causes physiques, tous les effets qui en résultent sont compris et balancent entre certaines limites plus ou moins étendues
, Buffon, Lièvre.Terme de chasse. Il se dit de la bête qui est courue et qui va çà et là, et du limier qui ne tient pas la voie juste.
Une part de mes chiens se sépare de l'autre, Et je les vois, marquis, comme tu peux penser, Chasser tous avec crainte, et Finaut balancer
, Molière, Fâch. II, 7.Il se dit aussi du faucon qui reste en place en observant sa proie.
Dans un métier, une lisse balance, quand elle se lève ou se baisse plus d'un côté que de l'autre.
En termes de danse, exécuter le pas qu'on nomme un balancé.
- 7 Fig. Hésiter, être en suspens. La victoire balançait. Tandis que le cœur balance entre ces objets. Voilà ce qui me fait balancer. Il balance à prendre le parti que vous lui conseillez.
Ce n'est pas que mon cœur… Balance pour t'offrir un encens qui t'est dû
, Boileau, Disc. au roi.Et ne balançons plus, puisqu'il faut éclater, à prévenir le coup qu'il cherche à vous porter
, Th. Corneille, Essex, I, 3.Tandis qu'à me répondre ici vous balancez
, Racine, Athal. V, 2.À ce silence Ne reconnais-tu pas un père qui balance ?
Racine, Iphig. IV, 1.Je ne balance point, je vole à son secours
, Racine, Androm. I, 4.Il n'y avait plus à balancer, s'il voulait sauver sa femme
, Hamilton, Gramm. 8.Elle est aimable et on l'aime sans balancer
, Sévigné, 156.Il n'y a pas à balancer sur votre retour
, Sévigné, 526.Entre l'utile et l'agréable, il n'y a pas à balancer
, Regnard, Sérénade, 1.M. Tronchin a déclaré qu'il y allait de votre vie, mais que vous ne balanceriez pas de la risquer
, Voltaire, Lettr. Mlle Clairon, 16 septembre 1765. - 8Se balancer, v. réfl. Balancer son corps. Se balançant, en marchant, tantôt à droite, tantôt à gauche
Aller sur la balançoire ou sur l'escarpolette.
- 9 Fig. Être compensé, être égal. Pour que les recettes et les dépenses se balancent. Les avantages et les pertes se balançaient. D'abord les succès se balancèrent. L'avantage se serait balancé. Les succès se balançant.
Terme de commerce. Se solder. Ce compte se balance par mille francs au crédit ou au débit.
- 10 Terme de peinture. Se balancer, se correspondre. Ces groupes se balancent.
REMARQUE
Balancer, v. n., suivi d'un infinitif, se construit avec la préposition à : il ne balança pas à partir ; mais on se sert aussi de la préposition de (voy. l'exemple de VOLTAIRE).
Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.
SYNONYME
BALANCER, HÉSITER. Bien que dans l'usage ces mots s'emploient aisément l'un pour l'autre, néanmoins ils présentent à l'esprit une image complétement différente. Celui qui balance est porté alternativement d'un côté et puis d'un autre ; c'est pour cela qu'il ne se décide pas. Celui qui hésite est attaché, arrêté à un certain point ; il ne va pas en avant ; c'est pourquoi il ne prend pas de parti. On hésite devant un obstacle ; on balance entre divers objets. En général, celui qui balance a plusieurs partis à prendre ; celui qui hésite peut n'en avoir qu'un. Je balance à répondre veut dire : je ne sais si je dois me taire ou parler ; j'hésite à répondre veut dire : je sens qu'il faut parler, mais je suis embarrassé pour le faire.
HISTORIQUE
XIIIe s. Toz les degrés [il] aval descent ; Le tierz boçu [il] a descarchié [déchargé], Dedenz l'eve l'a balancié [jeté]
, Fab. et Contes, édit. MÉON, t. III, p. 251. L'un des chiés [bouts] en met en sa bouche, Puis la balance, si la couche Desor son dos…
, Ren. 2278.
XIVe s. [Les Anglois] Ont par dessus François getée et balancie Chaude eaue, vive chaux et aussi poix bouilie
, Guesclin. 19734.
XVIe s. Comme un asne balançant Deux grands oreilles pointues
, Du Bellay, J. II, 38, recto. Les parlemens… Où d'un contrepois loyal Les sainctes loix on balance
, Du Bellay, J. II, 39, verso. Ce seul icy a fleschi ma pensée, Ce seul icy mon ame balancée A esbranlé
, Du Bellay, J. IV, 7, recto. Tout aultre animal est ou vers terre tourné, Ou caché dessoubs l'onde, ou d'aile ballancée Est pendu parmy l'air
, Du Bellay, J. IV, 81, recto. Ballancer tous ses mots, respondre de la teste, Avec un Messer non ou bien un Messer si
, Du Bellay, J. VI, 25, verso. Les philosophes ont voulu considerer tout, balancer tout
, Montaigne, II, 243. Un esprit balancé justement entre deux pareilles envies
, Montaigne, II, 389. Pour empescher de faire le saut à ceux qui balançoient encores
, D'Aubigné, Hist. II, 62. Desjà les habitans faisoient ballancer le pont, quant Guitri saute avec un cheval d'Espagne dessus
, D'Aubigné, ib. II, 67. Quand bien ce seroit une faute au souverain de balancer [pencher, favoriser] plus d'un costé que de l'autre
, Castelnau, 14.
ÉTYMOLOGIE
Balance ; Berry, berlancer ; picard, baloncher ; génev. se galancer ; provenç. balansar ; ital. bilanciare.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
BALANCER. Ajoutez :Le fond de l'affaire, à ce que j'imagine, c'est que sa petite fierté veut avoir sa revanche et se donner le plaisir de te tenir le bec dans l'eau ; tu l'as balancée, elle te balance… ne prends pas cet air déconfit, V. Cherbuliez, Rev. des Deux-Mondes, 15 févr. 1876, p. 739.