« accroire », définition dans le dictionnaire Littré
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accroire
usité seulement à l'infinitif et avec faire.
- 1Faire accroire, faire croire ce qui n'est pas vrai.
Non qu'il y fût par un désir de gloire, Comme possible alors il vous l'a fait accroire
, Mairet, Sol. II, 2.Quand on voudrait faire accroire une chose fausse
, Pascal, Prov. 9.J'aurais assez d'audace pour faire accroire à votre père que…
, Molière, l'Avare, II, 4, 1.On lui fera accroire toutes choses, dès qu'elles seront à sa louange
, Bourdaloue, Pensées, t. II, p. 229.Faire accroire à tout un peuple que ce sont là les livres anciens
, Bossuet, Hist. II, 13. - 2En faire accroire, conter des sornettes à quelqu'un, le tromper par de belles paroles.
Ce n'est pas vous, Monseigneur, à qui on en peut faire accroire
, Guez de Balzac, liv. VI, lett. VI. - 3S'en faire accroire, présumer trop de soi-même, s'attribuer un mérite qu'on n'a pas.
Comme gens entendus [ils] veulent s'en faire accroire
, Régnier, Sat. II.Vous savez mieux que personne au monde si je m'en fais accroire dans ce que je viens de vous dire
, Scarron, Rom. com. 2e part. 14.Je ne m'en fais pas accroire…
, Marmontel, Cont. mor. I, 295.
HISTORIQUE
XIIe s. Si idunkes fu ocis et al coeu [cuisinier] fu livrez ; Li keus manja le cuer ; quant li fu demandez, Fist al seignur acreire que senz cuer esteit nez
, Th. le Mart. 31.
XIIIe s. Et li rois li carga [lui chargea] sa lettre de proiere et d'acroire, s'il en avoit mestier
, Chr. de Reins, 244. Nus ne vos devoit tant deçoivre, Que ne deüssiez aperçoivre Qui mensonge vous fait acroire Et qui vous conte chose voire
, Ren. 13709.
XVe s. Adonc fit le comte de Bouquinghen asavoir parmi la cité que, si ses gens avoient rien acru [pris à crédit], on se traïst avant, et on seroit payé
, Froissart, II, II, 83. Et quand à l'accroire [à faire crédit] on ne leur faisoit bonne chere, ils disoient : Que nous demandez-vous ? encore vaut il trop mieux que nous despendons les biens de ce pays que les François les trouvent et aient aise
, Froissart, II, II, 36. Je irai ; mais il fait mal d'accroire ; Ce savez-vous bien à l'estraine
, le Patelin.
XVIe s. Ferons nous accroire à nostre peau que les coups d'estriviere la chatouillent ?
Montaigne, I, 301. Les propres condamnations sont tousjours accrues, les louanges mescrues
, Montaigne, IV, 34. Ilz ont feinct d'avoir communication avec les dieux, fiction utile et salutaire à ceulx mesmes à qui ilz le faisoient à croire
, Amyot, Numa, 8. Numa leur faisoit à croire qu'il avoit veu quelques visions estranges
, Amyot, Numa, 13. C'estoient hommes qui pouvoient facilement persuader et faire à croire tout ce qu'ilz vouloient
, Amyot, Caton, 47. Les armes prent, et d'un hardy courage Passe les monts pour venger cest outrage ; Cent ans d'accru [pris à crédit] à une heure se paye
, Marot, J. V, 87.
ÉTYMOLOGIE
À et croire ; Berry, accreire et ancreire ; wallon, acreûre, faire crédit (comme dans Froissard) ; provenç. acreire ; espagn. acreer. La langue ancienne a souvent confondu acroire avec à croire, écrivant faire acroire ou faire à croire, surtout dans un temps où les accents n'existaient pas ; mais il est certain qu'il y a eu un verbe acroire, et qu'il vaut mieux écrire dans les anciens textes faire acroire que faire à croire.