« safran », définition dans le dictionnaire Littré

safran

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

safran [1]

(sa-fran) s. m.
  • 1Plante bulbeuse, qui porte une fleur bleue mêlée de rouge et de purpurin, crocus sativus, L., iridées ; on y distingue deux variétés, le safran des fleuristes cultivé pour l'ornement, et le safran du Gâtinais ou d'automne, cultivé comme plante médicinale et économique. Le safran, culture importante dans le Gâtinais, était attaqué d'une maladie qui paraissait contagieuse : des oignons sains, placés à côté d'oignons infectés, éprouvaient bientôt le même dépérissement, Condorcet, Duhamel.
  • 2Stigmates de la fleur qui, réduits en poudre, donnent une couleur jaune à la liqueur où on les met, et qui servent en médecine, dans la teinture et comme assaisonnement. Couleur de safran. Colorer du beurre avec du safran.

    Être jaune comme du safran, avoir le teint jaune comme du safran, comme safran, être très jaune, avoir la jaunisse.

    Fig. et familièrement. Accommoder au safran, faire une infidélité conjugale (par allusion à la couleur jaune, qui est celle des maris trompés).

    Fig. et familièrement. Il est allé au safran, il est mal en ses affaires (par allusion à la jaunisse que donne le chagrin).

    Jaune safran, jaune comme le safran.

  • 3 Substantivement. Le jaune safran. Ce jaune safran ne peut guère appartenir à la femelle [du bruant], Buffon, Ois. t. VIII, p. 62.
  • 4 Poétiquement. Le safran, la couleur jaune et pourprée du jour qui se lève. Et déjà devant lui les campagnes se peignent Du safran que le jour apporte de la mer, Malherbe, I, 2. L'aurore s'ornant de safran et de roses, Régnier, Sat. II. Tu couvres… les vastes campagnes… de ton voile de safran et de vermillon, Bernardin de Saint-Pierre, Harm. liv. I, Tableau général.
  • 5 Fig. Safran du Pérou, l'or, à cause de sa couleur et de son abondance dans les mines de ce pays.
  • 6Il se dit abusivement de certaines plantes qui ont quelque rapport avec le safran

    Safran bâtard ou carthame, nom commercial de la racine du carthame tinctorial, synanthérées. Safran bâtard, le cent pesant estimé 45 livres, Déclar. du roi, nov. 1640, Tarif. Le safran-bourg ou safran bâtard n'étant ni bon ni utile à la teinture des laines, Instruct. génér. pour la teint. des laines, 18 mars 1671, art. 143.

    Safran bâtard est aussi un nom vulgaire par lequel on désigne le colchique d'automne, dit encore lis vert et safran des prés.

    Safran des Indes, voy. CURCUMA.

  • 7Safran se dit de quelques préparations faites avec du fer et de l'antimoine, à cause de leur couleur.

    Safran des métaux, l'oxysulfure d'antimoine, lavé et réduit en poudre ; ainsi dit à cause de sa couleur d'un brun marron.

    Safran de Mars apéritif, carbonate de fer.

    Safran de Mars astringent, le tritoxyde de fer.

HISTORIQUE

XIIIe s. Il devint vermaux et rouges comme saffranz, Guil. de Tyr, Continuation, p. 579.

XIVe s. Mettre des herbes, de l'eau et du saffran en un plat avecques la fraze [fraize], Ménagier, II, 5.

XVIe s. Le saffran y peut estre mis, souffrant et le trepis en herbe, et le cueillir de son poil, sans autre dechet que general, De Serres, 721. Il me fera tant de bien que je ne seray jamais reduit au safran, Sully, Écon. royales, ch. LXXXIV. Avoir mangé du safran [rire trop souvent et à propos de rien], Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 84. Le pauvre homme [un tailleur] par justice fut condamné à payer les estoffes de tous ses challans, et de present en est au safran, Rabelais, IV. 5. Les gents de village de ce pays, à touts accidents, n'employent que du vin le plus fort qu'ils peuvent, meslé à force safran et espice, Montaigne, III, 208.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, sofran ; provenç. safran, safra ; catal. safrá ; espagn. azafrano ; portug. açafrāo ; ital. zafferano ; de l'arabe az-za'ferän, qui vient du persan zaãfer.