« hérétique », définition dans le dictionnaire Littré

hérétique

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hérétique

(é-ré-ti-k') adj.
  • 1Qui appartient à l'hérésie. Une proposition hérétique.

    Fig. Et, sans distinction, dans tout sein hérétique, Pleins de joie enfoncer un poignard catholique, Boileau, Sat. XI.

  • 2Qui professe, qui soutient quelque hérésie. C'est un grand mal d'être hérétique ; mais est-ce un grand bien de soutenir l'orthodoxie par des soldats et par des bourreaux ? Voltaire, Dict. phil. Hérésie, I.

    Fig. [Le faux honneur] Lui dit [à Claude, ministre protestant de Charenton] : si tu te rends, sais-tu ce qu'on va dire ? Dans son heureux retour lui montre un faux malheur, Lui peint de Charenton l'hérétique douleur, Boileau, Épît. III.

    Substantivement. Un hérétique. Cette jeune hérétique. Tertullien avait dit : Les hérétiques varient dans leurs règles, c'est-à-dire dans leurs confessions de foi ; chacun parmi eux se croit en droit de changer et de modifier par son propre esprit ce qu'il a reçu, comme c'est par son propre esprit que l'auteur de la secte l'a composé, Bossuet, Var. Préface. Théodose, seul empereur, fut la joie et l'admiration de tout l'univers ; il appuya la religion, il fit taire les hérétiques, il abolit les sacrifices impurs des païens, Bossuet, Hist. I, II. Ceux qui vous ont précédés… racontent qu'avant qu'il y eût eu des empereurs dont les lois eussent ôté les assemblées aux hérétiques, les sectes demeuraient unies, et s'entretenaient longtemps ; mais, poursuit Sozomène, depuis que Dieu suscita des princes chrétiens et qu'ils eurent défendu ces conventicules, la loi ne permettait pas aux hérétiques de s'assembler en public, Bossuet, le Tellier. Personne ne doute, dit Pegna, scolie 47, qu'il ne faille faire mourir les hérétiques ; mais on peut demander quel genre de supplice il convient d'employer, le supplice du feu est la peine due à l'hérésie, Voltaire, Dict. phil. Inquisition, I.

  • 3 Par extension et familièrement, il se dit de ceux qui ne sont pas d'accord avec le plus grand nombre sur certaines théories. Voilà [l'arrêt au septième vers dans les stances de dix] la plus grande contestation qu'il [Racan] a eue contre M. de Malherbe et ses écoliers, et pourquoi on a été près de le déclarer hérétique en poésie, Pellisson, Hist. de l'Acad. IV, Maynard. Contre ce docteur authentique, Si du jeûne [Bourdaloue] il prend l'intérêt, Bacchus le déclare hérétique, Et janséniste qui pis est, Boileau, Poés. div. IV.

    Substantivement. Vous verrez bientôt à Paris un de vos affectionnés qui va quitter cette ville ; il est de ces hérétiques qui croient que votre serviteur Poussin a, dans la peinture, quelque talent qui n'est pas commun, Poussin, Lett. 3 juin 1647.

    Il se dit quelquefois, dans le langage familier, pour incrédule, esprit fort.

    Hérétique en amour, se dit de celui qui a des habitudes honteuses, d'un pédéraste.

SYNONYME

1. HÉRÉTIQUE, HÉTÉRODOXE., L'hérétique est celui qui, différent dogmatiquement d'opinion avec une Église, s'en sépare et n'en reconnaît plus l'autorité. L'hétérodoxe est celui qui a, sur un point, une opinion différente de l'opinion de l'Église, sans pour cela vouloir ne plus y appartenir. L'hérétique est nécessairement hétérodoxe ; mais l'hétérodoxe n'est pas nécessairement hérétique.

2. HÉRÉTIQUE, SCHISMATIQUE., L'hérétique est nécessairement schismatique, mais le schismatique n'est pas nécessairement hérétique ; il suffit qu'il se sépare de la communion d'une Église. Ainsi, par rapport à l'Église romaine, les Grecs sont schismatiques, les protestants sont schismatiques et hérétiques.

HISTORIQUE

XIe s. Cel Sarazins me semble mout herite, Ch. de Rol. CXII.

XIIIe s. Il n'a en tout cest mont [ce monde] ne bougre ne herite, Ne fort popelican, vaudois ne sodomite, Se il vestoit l'abit où papelars s'abite, Qu'on ne le tenist jà à saint ou à ermite, Rutebeuf, 178. …Li herite cuident que Diex fist le bien, et li deables le mal, Latini, Trés. p. 16. Et lors fu la crestienne loi confermée, et fu dampnée la creance des hereges, Latini, ib. p. 83. Vous, noble roi [Philippe le Bel] sur tous autres princes, povez et devez et estes tenu requerre et procurer que ledit Boniface soit jugiez pour herege, Requeste, dans Hist. litt. de la Fr. t. XXIV, p. 233.

XVe s. Le dit frere Thomas fut mené devers notre saint pere le pape, lequel chargea pour l'examiner les cardinaux de Rouen et de Navarre, lesquels enfin le trouverent herese et coupable, Monstrelet, II, 127.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. heretge ; esp. herege ; ital. eretico ; du lat. hæreticus, de hæresis (voy. HÉRÉSIE). L'ancienne forme est herite, herese ou herege, formé d'après l'accentuation latine hæréticus ; au contraire, hérétique a été calqué sur le latin.