« démener », définition dans le dictionnaire Littré

démener

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démener (se)

(dé-me né. La syllabe me prend l'accent grave, quand elle est suivie d'une syllabe muette : je me démène, je me démènerai) v. réfl.
  • 1S'agiter violemment. Un lutteur… Qui, se tordant les bras, tout en soi se démène, Régnier, Sat. I. Toute la nuit tu cours, tu te démènes, La Fontaine, Berc. En se démenant d'une manière si peu discrète, Hamilton, Gramm. 10. S'agite, se démène et s'use le cerveau, Boileau, Épît. X. Rustan suait, se démenait, se désespérait, Voltaire, Blanc et noir. Tandis que le moine se démène pour se débarrasser du chien, Diderot, Salon de 1765, Œuvres, t. XIII, p. 181, dans POUGENS.
  • 2 Fig. S'émouvoir, s'irriter. Se démener contre les vices du siècle. Elle a raison : démenez-vous donc un peu, parlez-lui, Dancourt, Vend. Surènes, sc. 10.

HISTORIQUE

XIe s. Par toutes terres [il] a son cors demenet, Ch. de Rol. XXXIX. Plurent et crient, demeinent grant dolur, ib. CXC.

XIIe s. Grant bruit demenent li baron chevalier, Ronc. p. 62. Li emperere va tel duel [deuil] demenant, ib. p. 151. N'aiez pas freor [frayeur] ; Que tresqu'à jor [car jusqu'au jour] [vous] Poez demener joie, Romancero, p. 68. Quant les voit l'empereres, moult grant joie [il] en demaine, Sax. XX. Cel qui mesfait, deit l'um à sun prelat livrer ; Par tel lei cum il vit, le deit l'um demener, Th. le mart. 30.

XIIIe s. Ha ! comme il s'estoient loiaument demené [comportés] jusque à celui jour ! Villehardouin, CVIII. Il avoit tous jors en porpens De demener [faire] les grans despens, Et el [richesse] les pooit bien soffrir, Et tous ses despens maintenir, la Rose, 1128. Et aussi, en le [la] cort laie, sont li apel de degré en degré, du souget as seigneurs et des segneurs en segneurs dusques au roy en cas qui ne sont pas demené par gage de bataille, Beaumanoir, 60. Et celi qui ainsi se demeinne [se conduit], doit l'en appeler preudomme, pource que ceste proesse lui vient du don Dieu, Joinville, 275.

XVe s. Il [le cheval] s'escueillit et se demena tant qu'il fut maistre du seigneur qui le chevauchoit, et l'emporta…, Froissart, I, I, 91. Je n'ai que faire de demener cette matiere trop longuement, Froissart, I, I, 101. [Le roi Anglois regarda que] tant qu'il avoit guerroyé par les Allemands et les Flamands, il n'avoit rien fait fors que frayé et dependu grandement et grossement ; et l'avoient mené et demené les seigneurs de l'Empire, qui avoient pris son or et son argent, ainsi qu'ils avoient voulu, Froissart, I, I, 152. Si fut touteffois tant demenée ceste matiere que après plusieurs années elle fut conclue, Commines, I, 5. Doubtant [craignant] qu'il ne dist de luy ce qu'il sçavoit touchant le demené dudit conte [ses offres de trahison], Commines, V, 6. Il lui en conta largement et bien au long tout le demené, Louis XI, Nouv. XXXIII.

XVIe s. Que ce fol monde hault et bas se demaine, Et qu'à son vueil il se tourne et tempeste, Marot, I, 305. …Ains tellement ennuy le pourmenoit, Que sans repos piteux cris demenoit, Marot, I, 309. Au bon vieux temps un train d'amour regnoit, Qui sans grand art et dons se demenoit, Marot, II, 21. Il appelle le roy d'Assyrie verge de sa fureur, et la hache qu'il demeine en sa main, Calvin, Instit. 161. Voyez demener et agiter Platon : chascun le couche du costé qu'il le veult, Montaigne, II, 354. Venant mesler son advis à certain legier propos qui se demenoit tout laschement en sa table, Montaigne, IV, 54. Adonc luy, et ceulx qui estoient en sa compaignie, demenans grand bruit, tirerent en diligence vers la ville, Amyot, Thés. 26. Ilz le retrouverent à la fin, à grand peine, soubz des monceaux d'autres armes et de corps morts, dont ilz demenerent grande joie, Amyot, P. AEM. 35. Après avoir fait semblant de combattre, en demenant leurs espées parmy l'air vague, Amyot, Lucull. 70. Ne renforcer pas sa passion, comme une maladie, à force de crier hault, et de se demener, et tourmenter, Amyot, Comm. refréner la colère, 8.

ÉTYMOLOGIE

Dé… préfixe, et mener ; provenç. demenar ; ital. dimenare. Démener était, dans l'ancien français, un verbe complet qui se conjuguait à l'actif et au passif ; aujourd'hui il est réduit à la forme réfléchie.