« carrefour », définition dans le dictionnaire Littré

carrefour

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

carrefour

(ka-re-four) s. m.
  • L'endroit où se croisent plusieurs rues, voies ou chemins. Le lieu de la scène était pour l'ordinaire un carrefour d'une forêt, Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virg. Ce que les beaux génies de la Grèce ont trouvé par un dernier effort de raison s'enseigne aux carrefours de nos cités, Chateaubriand, Génie, I, VI, 6. … J'ai fui la ville aux muses si contraire, Et l'écho fatigué des clameurs du vulgaire ; Sur les pavés poudreux d'un bruyant carrefour Les poétiques fleurs n'ont jamais vu le jour, Chénier, Él. 14.

    Fig. Vous devez marcher droit pour n'être pas berné ; Et s'il faut que sur vous on ait la moindre prise, Gare qu'aux carrefours on ne vous tympanise, Molière, Éc. des femmes, I, 1.

    Un langage, des injures de carrefour, la langue des carrefours, se dit de propos grossiers.

HISTORIQUE

XIIe s. Et derompre [eux] à chevaux entre deux carrefors, Saxons, XXVII. Lors il ont en un quarrefor Une dameisele trovée, la Charette, 606.

XIIIe s. Et crioit à cescun quartfour des rues, Chr. de Rains, 107. Et se li vallés ne sont comandé, cil doivent aler en la place jurée à l'aigle, ou quarrefour des chans pour eus alouer, Liv. des mét. 132. Et li crieur tout ensemble doivent crier le vin le roi au mein et au soir par les quarrefours de Paris, ib. 26. Il fleutera nos paroles Par quarrefours et par escoles, Selon le langage de France, la Rose, 106778. Coustume est en moult de liex c'on fet crois de pierre ou de fust es quarrefors des chemins ou en autres liex, Beaumanoir, XXV, 24. Le roy le fist volentiers, et les heberga en une rue appelée le quarrefour du Temple, qui ore est appelée la rue Sainte-Croix, Joinville, 299.

XIVe s. Li Romain fesoient liz auci come à reposer, à coissins et oreilliers, parmi les carrefours, pour honneur de leurs diex, Bercheure, f° 2, verso. Droit à un quarrefour, se l'histoire ne ment, Li salirent au dos quinze laron pullent. Beaud. de Seb. XI, 105.

XVe s. En villes et en carrefours, Chartier, Espérance des trois vertus.

XVIe s. Adonc veissiez par carrefours et places Gens se retraire…, Marot, J. V, 183. Il n'y avoit place, canton, carrefour ni carroy qui ne fust garni ou d'un theatre ou d'un arc, Carloix, III, 20. Il y avait aux carrefours de Rome des vaisseaux et demy-caves pour y apprester à pisser aux passants, Montaigne, I, 372.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. carrefor ; provenç. carreforc ; de quadrifurcus, qui a quatre fourches ou divisions, de quadri, qui a le même radical que quatuor, quatre (voy. QUATRE), et furca (voy. FOURCHE). C'est le provençal qui montre que dans l'étymologie est furca et non forum.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CARREFOUR. Ajoutez : - REM. Corneille écrit carfour. Comment ? - De ce carfour j'ai vu venir Philinte, Corneille, Lexique, éd. Marty-Laveaux. Théante approche-t-il ? - Il est en ce carfour, Corneille, ib.

ÉTYMOLOGIE

Ajoutez : L'orthographe par re se trouve aussi dans les textes français ; le Dict. de la conversation de Wahlen, édité en Belgique, cite, dans un glossaire latin-français du XIIIe siècle, theatrum traduit par carrefourc ; au XVe s. : Illec dessus a un quarre fourc, dans Lancelot du Lac ; au XVIe s. : à l'entour des villages, bourgs et carrefourcs, dans une traduction de Polydore Virgile, imprimée en 1521.