« aigrir », définition dans le dictionnaire Littré
aigrir
Définition dans d'autres dictionnaires :
Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)
aigrir
(è-grir) v. a.
- 1Rendre aigre. La chaleur aigrit le lait. Le temps n'aigrit pas toutes sortes de vins.
- 2 Fig. Irriter.
Je parlais pour l'aigrir, et non pour me défendre
, Corneille, Cinna, V, 2.Mais sans doute, seigneur, ma présence l'aigrit
, Corneille, Nicom. IV, 2.Si le mal vous aigrit, que le bienfait vous touche
, Racine, Esth. III, 1.Les reproches ne faisaient qu'aigrir les esprits
, Bossuet, Hist. III, 3.Sa mauvaise fortune avait aigri son esprit
, Sévigné, 345.Connaissez donc Titus, voyez toute son âme, Le courroux qui l'aigrit, le poison qui l'enflamme ; Il brûle pour Tullie…
, Voltaire, Brut. I, 4.Je vous plains de servir sous ce maître farouche, Que le mérite aigrit, qu'aucun bienfait ne touche
, Voltaire, ib. II, 2. - 3En parlant des choses.
Seigneur, trop d'amertume aigrirait vos reproches
, Racine, Iphig. III, 7.… Vient de son désespoir aigrir l'inquiétude
, Racine, Brit. V, 8.Aigrir les soupçons de quelqu'un
, Racine, ib. I, 2.La vraie vertu a pour les princes quelque chose d'âpre ; elle leur paraît trop austère et trop indépendante ; elle les effraye et les aigrit ; ils se tournent vers la flatterie
, Fénelon, Tél. XXIV.Une douceur que rien n'émeut ni aigrit, dont rien ne trouble la paix, et qui s'applique partout à la maintenir
, Bourdaloue, Pensées, t. I, p. 90.Ceux même dont ma gloire aigrit l'ambition
, Bourdaloue, Iphig. I, 1.Rougissez d'un silence Qui de vos maux encore aigrit la violence
, Bourdaloue, Phèd. I, 3.Pourquoi venir encore aigrir mon désespoir ?
Bourdaloue, Bér. V, 5.Allons, suivons ses pas, aigrissons ses ennuis
, Voltaire, Brutus, II, 3.Ils ont aigri les maux, loin d'y remédier
, Massillon, Écueils.Vous dirai-je les noms de ces grands personnages Dont j'ai dépeint les morts pour aigrir les courages ?
Corneille, Cinna, I, 3.AIGRIR, v. n. Devenir aigre. Le vin aigrit dans un tonneau malpropre. Ce lait a aigri par l'influence du tonnerre.
Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.
S'AIGRIR, v. réfl.
- 4Devenir aigre. Le vin s'aigrit à l'air.
Le vin s'aigrit dans mon gosier Chez un traiteur maussade
, Béranger, Éloge de la Rich.Les nourritures végétales donnent un lait plus prompt à s'aigrir
, Rousseau, Ém. 1.La voix se durcit ou s'amollit, elle s'enfle ou se rétrécit, elle va même jusqu'à s'aigrir
, D'Olivet, Prosodie franç. - 5S'irriter. Il s'aigrissait de jour en jour contre son frère.
Vous savez que sa bile assez souvent s'aigrit
, Molière, l'Étour. I, 2.Il s'aigrit et s'irrite contre la vertu
, Fénelon, Tél. III.Je crains… Que son courroux ému ne s'aigrisse à me voir
, Corneille, Pomp. IV, 2.
HISTORIQUE
XVIe s. Telle douceur t'adoucira, Et ton aigreur ne l'aigrira
, Marot, II, 416. Les cueurs ne s'en aigrirent à l'encontre de Pericles
, Amyot, Péricl. 66. Lui voyant que le peuple en estoit indigné, l'aigrit et irrita encore davantage
, Amyot, Alc. 22.
ÉTYMOLOGIE
Aigre. L'ancien français a le verbe aigrier, qui veut plutôt dire tourmenter.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
AIGRIR. Ajoutez : - HIST. XVe s. … Mais quant [Mathilde] plus longuement Eut regardé l'endroict de sa besongne, à tant s'esgrit en menasse et vergongne
, René Macé, Suyte de l'hist. de France, p. 3, verso.