« univers », définition dans le dictionnaire Littré

univers

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

univers

(u-ni-vêr ; l's ne se lie pas) s. m.
  • 1Le système illimité de planètes, de comètes, de satellites, de soleils, d'étoiles, disséminés dans l'espace, système qui semble tourner autour de nous. En mesurant les cieux sans bouger d'ici-bas, Il [Démocrite] connaît l'univers et ne se connaît pas, La Fontaine, Fabl. VIII, 26. En regardant l'homme sans lumière, abandonné à lui-même, et comme égaré dans ce recoin de l'univers, sans savoir qui l'y a mis, Pascal, Pens. XI, 8, édit. HAVET. L'univers est-il infini ? on me le dit, mais qui me le prouvera ? Voltaire, Princ. d'action, 4. L'univers est l'ensemble de tous les êtres créés ; cet ensemble est systématique ou harmonique ; il ne s'y trouve pas une seule pièce qui n'ait sa raison dans le tout, Bonnet, Paling. XXI, 8. L'univers est un espace immense où il n'y a point de désert, Condillac, Art de rais. v, 10. Il [Kepler] partageait l'univers en trois régions principales : la première est celle qu'occupe le corps du soleil… la seconde s'étend depuis le soleil jusqu'à Saturne … enfin la troisième commence à Saturne, et passe au delà des fixes, Bailly, Hist. astr. mod. t. II, p. 115. L'univers s'est prodigieusement agrandi pour nous ; et l'on peut, au gré de son imagination, en étendre indéfiniment les bornes, Delambre, Abr. astron. Leçon X.
  • 2Particulièrement, le système solaire, avec ses planètes et leurs satellites, dit aussi monde, quand on oppose le monde à l'univers. Qu'il [l'homme] se regarde comme égaré dans ce canton détourné de la nature, et que, de ce petit cachot où il se trouve logé, j'entends l'univers, il apprenne à estimer la terre, les royaumes, les villes et soi-même à juste prix, Pascal, Pens. I, 1, édit. HAVET. Notre corps, qui tantôt n'était pas perceptible dans l'univers, imperceptible lui-même dans le sein du tout, Pascal, ib. On veut que l'univers ne soit en grand que ce qu'une montre est en petit, et que tout s'y conduise par des mouvements réglés qui dépendent de l'arrangement des parties, Fontenelle, Mondes, 1er soir. Cet univers si vaste à notre faible vue, Et qui n'est qu'un atome, un point dans l'étendue, Voltaire, Épît. 44. Il y a cette différence entre le monde et l'univers, que l'univers est infini, Diderot, Opin. des anc. philos. (stoïcisme). Et le jeune univers commençant ses beaux jours, Et le premier hymen et les premiers amours, Delille, Imag. v.
  • 3La terre ou une grande partie de la terre. Au bout de l'univers. Colombo, frappé des entreprises des Portugais, conçut qu'on pouvait faire quelque chose de plus grand, et, par la seule inspection d'une carte de notre univers, jugea qu'il devait y en avoir un autre, Voltaire, Mœurs, 145. À quels maîtres, grands dieux, livrez-vous l'univers ! Voltaire, Triumv. I, 1. Faites régner le prince et le Dieu que je sers Sur la riche moitié d'un nouvel univers, Voltaire, Alz. I, 1.
  • 4Les habitants de la terre. Cette longue tranquillité [du règne de Cromwell] qui a étonné l'univers, Bossuet, Reine d'Anglet. Voilà, messieurs, les spectacles que Dieu donne à l'univers et les hommes qu'il y envoie, quand il y veut faire éclater, tantôt dans une nation, tantôt dans une autre, sa puissance et sa sagesse, Bossuet, Louis de Bourbon. J'ai vengé l'univers autant que je l'ai pu, Racine, Mithr. v, 5. L'univers ayant souffert ce monstre [Néron] pendant quatorze ans, Montesquieu, Goût, Surprise. Il faut un nouveau dieu pour l'aveugle univers, Voltaire, Fanat. II, 5. Hors le seul objet qui m'occupe, l'univers n'est plus rien pour moi, Rousseau, Confess. I. Depuis une heure, uniquement occupé de Julie, j'avais oublié l'univers, Genlis, Veillées du château t. I, p. 316.
  • 5 Par exagération, la société au milieu de laquelle on vit, le monde. Célimène : Mais de tout l'univers vous devenez jaloux. - Alceste : C'est que tout l'univers est bien reçu de vous, Molière, Mis. II, 1. À voir la sérénité qui reluisait sur son front auguste, eût-on soupçonné que ce grand roi [Louis XIV], en retournant à Versailles, allât s'exposer à ces cruelles douleurs où l'univers a connu sa piété, sa constance et tout l'amour de ses peuples ? Bossuet, Louis de Bourbon. Un déluge d'écrits, tant en prose qu'en vers, Qui vont à mes dépens réjouir l'univers, Destouches, Phil. marié, v, 1. Il [le P. Castel] a déjà écrit plusieurs brochures pour rassurer l'univers, pour éclairer l'univers ; imitez l'univers, monsieur, et ne lui répondez point, Voltaire, Lett. Rameau, mars 1738. Je déclare, non pas à l'univers à qui le P. Castel s'adressait toujours, mais à quelques gens de lettres qui font la plus petite partie de l'univers, que…, Voltaire, Odes, 12. Réponds donc : - L'univers doit venger mes injures, L'univers me contemple, et les races futures Contre mes ennemis déposeront pour moi. - L'univers, mon ami, ne pense point à toi, L'avenir encor moins, Voltaire, la Vanité. On peut faire une chanson sur elle ; Cela vaut mieux qu'un livre, et court tout l'univers, Gresset, le Méch. II, 3. Pour Mme de Miranda, elle voudrait marier tout l'univers, Riccoboni, Œuvres, t. VI, p. 29, dans POUGENS.
  • 6 Fig. Domaine matériel, intellectuel ou moral, comparé à l'univers. Les polypes sont placés sur les frontières d'un autre univers qui aura un jour ses Colombs et ses Vespuces, Bonnet, Contempl. nat. Œuv. t. VIII, p. 181, dans POUGENS. Les lieux que j'ai parcourus avec elle [Corinne], la musique que nous avons entendue ensemble, les tableaux qu'elle m'a fait voir, les livres qu'elle m'a fait comprendre, composent l'univers de mon imagination, Staël, Corinne, II, 2. Et pour lui [un campagnard] l'univers s'étendait de la pente Où sous ces peupliers son beau fleuve serpente, Jusqu'à ces monts voisins…, Lamartine, Harm. II, 12.

HISTORIQUE

XVe s. Au salut des universes terres, Christine de Pisan, Charles V, I, 5.

XVIe s. Au roy du ciel et du monde univers, Marot, I, 397. Et tant qu'ouy et nenni se dira, Par l'univers le monde me lira, Marot, II, 221. Un pretendant et aspirant à l'empire univers ne peut tousjours avoir ses aises, Rabelais, I, 33.

ÉTYMOLOGIE

Lat. universus, tout entier, universum, l'univers, de unus, un, et vertere, tourner : rassemblé, mis en un. Primitivement univers est adjectif, conformément à l'étymologie.