« transir », définition dans le dictionnaire Littré

transir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

transir

(tran-sir) v. a.
  • 1Pénétrer et engourdir de froid. Le froid et les neiges d'Alsace les transissent [les amis de Paris, en songeant aux amis qui sont en Alsace], Voiture, Lett. 67.

    Absolument. Un air égal et doux, tiède haleine de l'onde, Règne ici quand la bise ailleurs transit ou gronde, Lamartine, Joc. II, 83.

  • 2 Fig. Il se dit de l'effet que produit la crainte, l'affliction, et même le respect et l'admiration. Cette nouvelle le transit de peur. Vous le voudriez voir en corps et en âme avec cette gravité qui transissait les peuples d'admiration, Guez de Balzac, les Romains. J'entre en une vénération qui me transit de respect envers ceux qu'il semble avoir choisis pour ses élus, Pascal, Lett. à Mlle de Roannez, 3.
  • 3V. n être saisi de froid. Or me voici d'un mal chu dans un autre ; Je transissais, je brûle maintenant, La Fontaine, Orais. Je sentis tout mon corps et transir et brûler, Racine, Phèdre, I, 3.

    Fig. Cette vaine pitié dont mon cœur est transi, Rotrou, Bélis. v, 5. Je n'ai fait que penser à votre état, à transir pour l'avenir, à craindre qu'il ne devienne pis : voilà ce qui m'a possédée, Sévigné, 333. J'ai transi de vous voir passer de nuit cette montagne que l'on ne passe jamais qu'entre deux soleils et en litière, Sévigné, 21.

HISTORIQUE

XIIe s. Charles comande les transiz [morts] enterrer, Ronc. p. 176. Car mult plus grief martyre suffri tant cum fu vis, Que ne fist el mustier là ù il fu ocis ; Car erramment transi [mourut] e en joie fu mis, Th. le mart. 156.

XIIIe s. Quant saint François transsi, Jesu Crist reclama, En cinq leus, ce m'est vis, le sien cors entama, Rutebeuf, 180.

XVe s. Et ainsi transist la gloire du monde, Christine de Pisan, Ch. V, II, 11. Si raconter convenoit les histoires Des mauvais tours qui sont assez notoires, Que femmes font aux amoureux transis, le Loyer des folles amours, p. 229, dans LACURNE.

XVIe s. La langue se transit et la voix se fige, Montaigne, I, 98. Le voyant transi de ces nouvelles et en silence, Montaigne, I, 129. Roides, transis et immobiles de froid, Montaigne, II, 262. Il s'estonnera, il se transira [d'admiration], Montaigne, I, 266. Estants revenus à eulx, ils en transissent d'estonnement les premiers, Montaigne, II, 22. Son œil morne et transi en voyant ne void pas, D'Aubigné, Tragiques, éd. LALANNE, p. 142.

ÉTYMOLOGIE

Génev. tranzi, transi ; du lat. transire, passer, de trans, au delà, et ire, aller. Le sens primitif de transir dans l'ancienne langue est mourir, qui se dit encore aujourd'hui passer ; de là les sens consécutifs.