« ternir », définition dans le dictionnaire Littré
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ternir
- 1Ôter ou diminuer l'éclat d'une chose.
Le centième décembre a les plaines ternies, Et le centième avril les a peintes de fleurs…
, Malherbe, II, 12.Ils entrèrent dans Rome… par un temps gris qui ternit et confond tous les objets
, Staël, Corinne, I, 4.Je vous revois, et le temps trop rapide Ternit ces yeux où riaient les amours
, Béranger, Déesse.Le soir retient ici son haleine expirante, De crainte de ternir la glace transparente Où se mire le firmament
, Lamartine, Harm. I, 10.L'Archipel tout à coup frappé d'ombre, Comme un vaste miroir qu'un souffle aurait terni
, P. Lebrun, Voy. de Grèce, III, 2.Fig.
Un seul doute, un seul mot la blesse [la foi] ; un souffle, pour ainsi dire, la ternit
, Massillon, Carême, Vérité de la relig. - 2 Par extension, éclipser, obscurcir.
À peine tu parais les armes à la main, Que tu ternis les noms du Grec et du Romain
, Corneille, Remerc. au Roi.Et comme ami je le prie et conjure, S'il veut ternir un ouvrage immortel, Qu'il fasse mieux
, Corneille, Rondeau.Si la gloire de César a terni celle de presque tous les grands capitaines de la république
, Helvétius, De l'esprit, discours IV, 1. - 3 Fig. Diminuer, ôter l'éclat des choses morales ou intellectuelles.
Jamais personne n'a été mieux persuadé que lui, que l'avarice, la sécheresse et l'orgueil ternissent les plus belles qualités des grands hommes
, Retz, Conjur. Fiesque.On voudrait, à quelque prix que ce fût, ternir la beauté de son action [la retraite du cardinal de Retz]
, Sévigné, 209.La fin de son règne [de Clovis] ternit la gloire des commencements
, Bossuet, Hist. I, 11.De peur que la contagion du siècle ne ternît, en quelque façon, la pureté de son innocence
, Fléchier, Panégyr. Franç. de Paule.L'hymen de Soliman ternit-il sa mémoire ?
Racine, Bajaz. II, 3.Sa mère Pénélope l'avait nourri malgré Mentor dans une hauteur et dans une fierté qui ternissaient tout ce qu'il y avait de plus aimable en lui
, Fénelon, Tél. XVI.[Louis XIV] n'ayant point encore éprouvé les malheurs qui ternirent les dernières années de son règne
, D'Alembert, Apolog. de Clerm. Tonn.L'ignorance a terni tes lumières sublimes [de l'Évangile]
, Lamartine, Harm. III, 5. - 4Se ternir, v. réfl. Devenir terne.
On approche un miroir ou une lumière de la bouche du malade : si le miroir se ternit, ou si la lumière vacille, on conclut qu'il respire encore
, Buffon, Hist. nat. hom. Œuv. t. IV, p. 378.Fig.
C'est d'ordinaire ainsi que ses pareils agissent ; à suivre leur devoir leurs hauts faits se ternissent
, Corneille, Nicom. II, 1.Que tout l'État périsse, Avant que jusque-là ma vertu se ternisse
, Corneille, Suréna, III, 1.
HISTORIQUE
XVe s. Toute la couleur luy ternit
, l'Amant ressuscité, p. 540, dans LACURNE. J'ay deuil que vieulx villains tarnys Soient d'or et d'argent si garnis ; Et mignons en ont tant besoin !
Villon, Baillev. et Malep.
XVIe s. Il n'y a que cette seule tache en tous ses haults faits d'armes, qui ternisse un peu son honneur
, Amyot, Alex. 100. Pourquoy est-ce que tu as les yeux si agus à voir le mal d'autruy, et si ternis à voir le tien propre ?
Amyot, De la tranq. d'âme, 14. Comme à ceste fleur, la vieillesse Fera ternir vostre beauté
, Ronsard, 384. Cet aspect lui fit paslir la conscience et ternir le teint
, D'Aubigné, Hist. I, 259. Je ne sçais ny plaire, ny resjouir, ny chatouiller ; le meilleur conte du monde se seiche entre mes mains et se ternit
, Montaigne, III, 37.
ÉTYMOLOGIE
D'après Diez, de l'anc. haut-all. tarni, caché, tarnjan, cacher, obscurcir. L'anglais to tarnish vient du français.