« remords », définition dans le dictionnaire Littré
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remords
- Reproche que le coupable reçoit de sa conscience.
Un vertueux remords n'a point touché mon âme : Pour perdre mon rival, j'ai découvert sa trame
, Corneille, Cinna, V, 3.D'effroyables remords, mégères éternelles, Invisibles bourreaux des âmes criminelles
, Rotrou, Antig. V, 5.Quand le moment viendra d'aller trouver les morts, J'aurai vécu sans soins, et mourrai sans remords
, La Fontaine, Fabl. XI, 4.Vous savez comme je hais les remords ; ce m'eût été un dragon perpétuel, que de n'avoir point rendu les derniers devoirs à ma pauvre tante
, Sévigné, 149.Siècle vainement subtil, où l'on veut pécher avec raison… où tant d'âmes insensées… ne font d'effort contre elles-mêmes que pour vaincre, au lieu de leurs passions, les remords de leur conscience
, Bossuet, Anne de Gonz.Le remords de conscience que nous sentons après le péché est une grâce intérieure
, Bourdaloue, 9e dim. après la Pentecôte, Dominic. t. III, p. 142.L'un [le juge méchant] pèche avec connaissance, et il est inexcusable ; l'autre [le juge ignorant] pèche sans remords, et il est plus incorrigible
, Fléchier, Lamoignon.Tes remords te suivront comme autant de furies
, Racine, Brit. V, 6.La peur d'un vain remords trouble cette grande âme : Elle flotte, elle hésite ; en un mot, elle est femme
, Racine, Ath. III, 3.On n'est plus ingénieux que pour se tromper et pour étouffer ses remords
, Fénelon, Tél. VII.Le remords qui, dans le langage de l'Écriture, est appelé le ver de la conscience, n'est proprement qu'une honte portée à l'excès
, Boulainvilliers, Réfut. de Spinoza, p. 309.Secrets persécuteurs des cœurs nés vertueux, Remords, qu'exigez-vous ?
Crébillon, Atrée et Th. IV, 1.Qu'on appelle la raison et les remords comme on voudra, ils existent, et ils sont le fondement de la loi naturelle
, Voltaire, Loi nat. préface.[Au théâtre] J'ai cru m'apercevoir que les remords et la religion faisaient toujours un très grand effet sur le public
, Voltaire, Lett. Mme de Fontaine, 4 janv. 1761.Le remords s'endort durant un destin prospère et s'aigrit dans l'adversité
, Rousseau, Confess. II.Il connut qu'un seul remords suffit pour empoisonner la félicité la plus pure
, Genlis, Veillées du château t. II, p. 87, dans POUGENS.Même avant le forfait on connaît le remords
, Chénier M. J. Ch. IX, IV, 1.Le remords quelquefois fait mieux que la vertu
, Delille, Pit. II.En vers, on peut au singulier supprimer l's.
Oui, je veux… laisser, à ma mort, Dans ton cœur qui m'aima le poignard du remord
, Voltaire, Tancr. IV, 7.Tous à leur infortune ajoutant le remord, Séparés par l'effroi, sont rejoints par la mort
, Delille, Pitié, III.Souvenirs expirants, regrets, dégoûts, remord ; Si du moins ces débris nous attestaient sa mort [de la passion] !
Lamartine, Méd. I, 18.
REMARQUE
REMORDS, REPENTIR. Le remords est plus fort et s'adresse aux grosses offenses contre la morale. Le repentir est moins spécial ; il s'applique aussi bien aux fautes qui blessent l'utilité qu'aux fautes qui blessent la morale.
HISTORIQUE
XIIIe s. Jusqu'au remors de consciance
, Rutebeuf, 82.
XIVe s. Et se tu dis : las ! je suis mors ; Car j'ay plus de mille remors Et plus de cent mille pensées Diversement entremelées
, Machaut, p. 98.
XVIe s. Quand le duc de Glocestre vit le convenent de ces gens assemblés contre lui, si lui vint un remords de conscience
, Froissart, II, III, 79.
XVIe s. Mon ame, de sa complexion, refuyt la menterie, et nait mesme à la penser ; j'ai une interne vergongne et un remords picquant, si parfois elle m'eschappe
, Montaigne, III, 52.
ÉTYMOLOGIE
Lat. remorsum, supin de remordere (voy. REMORDRE) ; le d est, comme on voit, le résultat d'une orthographe faussement savante. Il y avait dans l'ancienne langue un autre remors, ou mieux remort, qui signifiait souvenir et qui se rattachait à rememorer : Encor en sont biel li remort [des croisades] Et li fait plaisant à reprendre
, Baudouin de Condé, t. I, p. 7.