« destrier », définition dans le dictionnaire Littré

destrier

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destrier

(dè-stri-é l'r ne se lie jamais ; au pluriel, l's se lie : des dè-stri-é-z agiles) s. m.
  • Dans le langage de la chevalerie et des guerres du moyen âge, cheval de bataille. J'errais de plaine en plaine Au gré du destrier, Beaumarchais, Mar. de Fig. II, 4.

HISTORIQUE

XIe s. En Tachebrun son destrer [il] est montez, Ch. de Rol. LXXXVIII. Puis sont montez sur leur couranz destrers, ib.

XIIe s. Il lui donna un merveillos destrier, Ronc. p. 30. On lui amene un destrier de Ongrie, ib. p. 55. En dementres s'armerent là fors li chevalier, E osterent les cotes, ceinstrent les branz d'acier ; Car tuit vindrent armé, chascun sur son destrier, Th. le mart. 144. Ne unkes ne volt un sul de ses chevals mener, Mais quatre fors destriers fist là fors amener, Cum s'il fussent as ostes qui deüssent errer, ib. 48. Il les alla veoir sur un destrier gascon, Sax. XXII. Messires Gauvains fu armez, Et si fist à deus escuiers Mener en destre deus destriers, la Charrette, 254. Vostre sera cis [ce] destriers sejornez [cheval frais], Et cis haubers et cis elmes jemez, La bonne espée, li bons escus listés, Raoul de C. 169.

XIIIe s. Lors veissiés maint chevalier avoec maint bel serjant issir des nés [navires], et maint biau destrier traire des huissiers [sorte de vaisseaux], Villehardouin, XLV. Sachiez, ce jour [il] i ot maint grant destrier couru, Berte, CXXXVII. Atant guerpissent les palefrois, si sont es destriers monté, H. de Valenciennes, VII. Qui achapte un destrier cent livres, Paie les, si en iert delivres, la Rose, 10811. Et de vous promener ne fine, Si cum l'en fait destrier à vendre, Et prent et vous enseigne à prendre, ib. 9395. Et encoste [à côté de] les nés menoit on les grans destriers, Joinville, 210.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. destrier, destre ; ital. destriere, destriero ; du bas-latin dextrarius, de dextra, dextre, main droite, à cause que l'on conduisait ces chevaux avec la main droite avant de les monter pour la bataille. Destrier était, dans l'ancienne versification, de deux syllabes ; on peut conjecturer que, dans les mots de ce genre, une des consonnes qui précèdent l'r ne se prononçait pas : detrier, ou que l'i ne se prononçait pas : des-trer ; du moins certains dialectes n'écrivaient pas cet i. Dans tous les cas, ce n'est que vers le milieu du XVIIe siècle, comme on le voit dans le Traité de poésie française du père Mourgues (2e part. ch. 1) qu'il fut décidé que les deux liquides l et r désuniraient l'i d'avec l'e qui le suit, lorsqu'elles seraient précédées d'une consonne dans la même syllabe. Le fait est que, pour nous, elles sont si bien désunies, qu'il nous est impossible de prononcer destrier, ouvrier en deux syllabes.