« ciseau », définition dans le dictionnaire Littré
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ciseau
- 1Instrument tranchant par un bout, et dont on se sert pour travailler les corps durs. Ciseau de maçon, de menuisier, d'orfévre. Faire émoudre un ciseau. Le ciseau d'un sculpteur.
Un bloc de marbre était si beau Qu'un statuaire en fit l'emplette ; Qu'en fera, dit-il, mon ciseau ? Sera-t-il dieu, table ou cuvette ?
La Fontaine, Fabl. IX, 6.Et je vais façonner la pierre Sous le dur tranchant du ciseau
, Voltaire, Lett. en vers et en prose, 40.Ouvrage de ciseau, ouvrage de sculpture.
Par extension.
S'égarant à mon gré, mon ciseau vagabond Achève à ce poëme ou les pieds ou le front
, Chénier, 192.Fig. La manière de travailler d'un sculpteur. Ce sculpteur a le ciseau hardi, délicat.
- 2Ciseau à froid, sorte de ciseau qui ne tranche pas ; la lame, qui est mousse, sert principalement à faciliter l'ouverture des caisses ou autres parties clouées.
- 3 S. m. plur. Instrument formé de deux lames tranchantes en dedans, réunies par une vis sur laquelle elles se meuvent. Une paire de ciseaux. Des ciseaux de tailleur.
On me place à côté du prêtre pour lui présenter les ciseaux [pour couper les cheveux à la future religieuse]
, Chateaubriand, René, 207.Il s'emploie quelquefois au singulier. On n'a point encore mis le ciseau dans cette étoffe.
Fig. Le ciseau ou les ciseaux de la censure, la main du censeur effaçant, dans un ouvrage, les passages qui pourraient choquer ou l'autorité ou la morale.
Je ne me console pas qu'un si beau génie [Diderot], à qui la nature a donné de si grandes ailes, les voie rognées par le ciseau des cafards
, Voltaire, Lett. Damilaville, 19 nov. 1760.Faire à coups de ciseaux, se dit des nouvelles diverses que l'on coupe avec des ciseaux pour les insérer dans un journal, et aussi de travaux analogues, choix de morceaux, compilations, etc.
- 4Le ciseau ou les ciseaux de la Parque, l'instrument avec lequel Atropos, une des trois Parques, coupait le fil de la vie filé par les deux autres.
Que le ciseau de la Parque tranche le fil de tes jours
, Fénelon, Tél. III.La plus belle vie… D'un prompt coup de ciseau se voit souvent tranchée
, Tristan, Mort de Chrispe, III, 1.Cependant un sanglier, monstre énorme et superbe, Tente encor notre archer… La Parque et ses ciseaux Avec peine y mordaient ; la déesse infernale Reprit à plusieurs fois l'heure au monstre fatale
, La Fontaine, Fabl. VIII, 27.Atropos au fatal ciseau Sur la table tombe endormie
, Béranger, Parques. - 5 Terme de marine. Orienté en ciseaux, se dit des voiles latines qui sont bordées l'une sur tribord et l'autre sur bâbord.
HISTORIQUE
XIIe s. Tant ont miné souz terre, chascuns à son cisel, Que des murs de Coloigne ont trait maint grant carrel
, Sax. IX.
XIIIe s. Et par desus mistrent un marbre, Si ont escrit le nom la dame, Et sa vie, et commandé s'ame, Ne sai à cisel ou à greffe [poinçon]
, Ren. 10119. Qui un rous peliçon portoit, Bien fet sanz cisel et sanz force [sorte de ciseaux]
, ib. 1447.
XIVe s. Trois paeres de ciseaux
, De Laborde, Émaux, p. 215. Uns ciseaux d'or pesans une once, neuf esterlins
, De Laborde, ib. À l'aide d'un sisel de fer et d'une vrille à tonnelier
, Du Cange, sciselum.
XVe s. Si yrons ouvrir la porte des champs en despit de tous, garnis de nos turquoises [tricoises], tenailles et ciseaux
, le Jouvencel, f° 25, dans LACURNE. Ceste subversion dont fortune nous fait ciseau de si près
, Chartier, Quadrilogue invectif.
XVIe s. Un petit ciseau de fer, d'os, ou de quelque bois dur et solide, sera l'instrument qu'on emploiera ici
, De Serres, 664. Le drap et les ciseaux lui sont delivrez [c'est-à-dire il a la disposition absolue de la chose]
, Cotgrave †
ÉTYMOLOGIE
Espagn. cincel ; portug. sizel ; ital. cesello, ciseau, cesoie, ciseaux ; angl. chisel, ciseau, scissors, ciseaux ; bas-lat. cisellus, sciselum. Mot difficile. Diez le tire de sicilix, sorte de petite lance ou de petit poignard, par un diminutif sicilicellus, silcellus. La forme du mot peut aller ; mais le sens n'est pas très favorable à cette étymologie. Ce qui porte Diez à rejeter caesus, c'est que caesus est un participe passé, d'où ne peut guère avoir été tiré un mot tel que caesillus avec le sens actif. Mais il y a aussi un substantif caesus, action de couper, de même qu'il y a un substantif scissus, qui a le même sens. On peut donc supposer que c'est de là que sont sorties ces diverses formes des langues romanes, confondant caesus et scissus comme l'indiquent les variations de l'orthographe ; l'espagnol a intercalé une nasale, ce qui arrive fort souvent. Dans l'ancien français, au singulier, nominatif cisels, cisex, cisaus ; régime, cisel ; au pluriel, nominatif cisel ; régime, cisels, cisex, cisaux.