« moutarde », définition dans le dictionnaire Littré
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moutarde
- 1Composition faite de graine de sénevé broyée avec du moût, du vinaigre, ou quelque autre liquide.
De trois choses Dieu vous garde, Du bœuf salé sans moutarde, D'un valet qui se regarde, D'une femme qui se farde
, Dicton dans RICHELET.Pour faire les moutardes fines dont la saveur est sucrée, on emploie, au lieu de vinaigre, du vin muté fait avec du moût dont on a empêché la fermentation par le moyen du soufrage, et qui par ce moyen reste toujours doux et sucré
, Dict. des arts et mét. Vinaigrier.Fig. Sucrer la moutarde, adoucir une réprimande, quelque chose de fâcheux.
Cependant il vaut mieux sucrer notre moutarde : L'homme pour un caprice est sot qui se hasarde
, Régnier, Sat. II.Fig. S'amuser à la moutarde, s'occuper à des bagatelles, perdre son temps, attendu que la moutarde n'est dans un repas qu'un accessoire, un assaisonnement.
Il est fin comme moutarde, plus fin que moutarde, se dit d'un homme rusé.
La moutarde monte au nez, se dit au propre d'une sensation particulière qu'on éprouve dans le nez quand on prend un peu trop de moutarde ; et fig. la moutarde lui monte au nez, il commence à s'impatienter de ce qu'on lui dit ou de ce qu'on lui fait.
Fig. C'est de la moutarde après dîner, cela vient lorsqu'on n'en a plus besoin.
Je lui ai envoyé le Cri du sang innocent, et cette diatribe dont vous me parlez ; tout cela est un peu de la moutarde après dîner ; le jeune homme qui faisait crier le sang innocent [condamné par les juges d'Arras] n'a plus à crier ; le roi [de Prusse] l'appelle auprès de sa personne…
, Voltaire, Lett. Laharpe, 15 août 1775.Fig. Le reste en moutarde, se dit quand un homme ne peut justifier à quoi il a employé de l'argent qu'il a reçu.
Les enfants en vont à la moutarde, se dit de quelque affaire qui est complétement ébruitée.
Mais on ne laissa pas de publier ceci par tout ce pays, car mon compère ne fut pas secret, tellement que les enfants en vont aujourd'hui à la moutarde
, Francion, liv. VIII, p. 331.Avec son mariage qu'elle dit qui sera secret, et tout le monde en va à la moutarde
, Dancourt, le Charivari, 14.Par une plaisanterie grossière, le baril de moutarde, le derrière.
En le lançant, il dit : prends garde ! Je vise au baril de moutarde
, la Suite du Virgile travesti, liv. X. - 2La graine de sénevé (sinapis nigra, L.).
Farine de moutarde, graine de moutarde pulvérisée, avec laquelle on fait les sinapismes.
Moutarde blanche, la graine ou semence du sinapis alba, qui est le double en grosseur de la noire, et n'en a pas la saveur âcre et piquante.
Nom donné quelquefois à la plante même.
Il y a des plantes comme la moutarde, les choux, etc. qui fournissent du sel ammoniac
, Buffon, Min. t. III, p. 454.
HISTORIQUE
XIIIe s. Car aquerre, s'il n'i a garde, Ne vaut pas un grain de moutarde
, la Rose, 14658.
XVe s. En icelluy temps chantoient les petits enfans au soir, en allant au vin ou à la moustarde…
, Journ. d'un bourgeois de Paris, an 1413. Mais quant ce vint au fait de la despence, Il restraignit eufs, chandelle et moustarde, Et oublia pain, vin, char et finance : Tout se detruit et par defaut de garde
, Deschamps, Administration de l'hôtel du prince. La demoiselle estoit plus fine que moustarde ; car, la merci Dieu, elle avoit rodé et couru le pays tant, que du monde ne savoit que trop
, Louis XI, Nouv. LXXVI.
XVIe s. Et en feut faicte une chanson, dont les petits enfans alloyent à la moustarde
, Rabelais, II, 21. Baveur comme un pot à moustarde
, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 303. Moi qui m'en vois, resignerois facilement à quelqu'un qui veinst, ce que j'apprends de prudence pour le commerce du monde : moustarde aprez disner ; je n'ay que faire du bien duquel je ne puis rien faire
, Montaigne, IV, 156.
ÉTYMOLOGIE
Bourguig. moutade ; wallon, mostâde ; Hainaut, moustage ; provenç. mostarda ; catal. mostassa, mostalla ; espagn. mostaza ; portug. et ital. mostarda ; du lat. mustum, moût, et différents suffixes ; ce condiment est fait avec du moust.