« gronder », définition dans le dictionnaire Littré
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gronder
- 1Faire entendre une voix sourde et menaçante, en parlant des animaux. Le chien se mit à gronder.
- 2 Par extension, murmurer, se plaindre entre ses dents, en parlant des hommes.
Grondant entre mes dents, je barbote une excuse
, Régnier, Sat. x.Tandis que dans un coin, en grondant je m'essuye, Souvent, pour m'achever, il survient une pluie
, Boileau, Sat. VI.Tant que le jour est long, il gronde entre ses dents
, Regnard, Fol. am. I, 1.Mais le sévère satirique [Boileau] Embrassait, encore en grondant, Cet aimable et tendre lyrique [Quinault], Qui lui pardonnait en riant
, Voltaire, Temple du Goût.Activement.
Grondant quelques paroles
, Régnier, Sat. x.Souvenez-vous bien de venir avec cet air qu'on nomme le bel air, peignant votre perruque, et grondant une petite chanson entre vos dents, la, la, la, la
, Molière, Impr. sc. 3. - 3Faire un bruit sourd, en parlant des choses.
Ce n'est pas en vain qu'il [Dieu] lance le foudre, ni qu'il fait gronder son tonnerre
, Bossuet, 2e serm. Purific. 1.Les vents grondent, les flots se soulèvent
, Bossuet, Sermons, Église, 1.Dieu permit aux vents et à la mer de gronder et de s'émouvoir, et la tempête s'éleva
, Fléchier, le Tellier.La mer grondait sourdement
, Fénelon, Tél. VI.Un bruit redoutable Gronde dans les airs ; Un voile effroyable Couvre l'univers
, Rousseau J.-B. Cantate, Circé.Adieu, chansons ! mon front chauve est ridé ; L'oiseau se tait ; l'aquilon a grondé
, Béranger, Adieu chansons.Au milieu de ces préparatifs et dans l'instant où Napoléon passait en revue, dans la première cour du Kremlin, les divisions de Ney, tout à coup le bruit se répand autour de lui que le canon gronde vers Winkowo
, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 11.Fig.
Durant ces troubles [les guerres des Hussites], des gens de métier qui commençaient à gronder dès le règne précédent, se mirent plus que jamais à parler entre eux de la réforme de l'Église
, Bossuet, Var. XI, 173.Dès qu'on ouït gronder l'orage qui vient de fondre sur l'Empire et la Hongrie, n'ajouta-t-elle pas à ses dévotions ordinaires une heure d'oraison par jour ?
Fléchier, Mar.-Thér. - 4 V. a. Réprimander avec quelque humeur dans le ton, dans les paroles.
Hé, ma fille, comme vous voilà faite ! Mme de la Fayette vous grondera comme un chien : coiffez-vous demain pour l'amour de moi
, Sévigné, 124.Je repassai chez Mme de Coulanges ; on me gronde de m'en revenir
, Sévigné, 307.Une mère qui l'observe, qui la gronde, qui croit la bien élever en ne lui pardonnant rien
, Fénelon, Éduc. filles, chap. 2.Je vous ai toujours aimé, et ne vous ai jamais manqué ; je suis en droit, par mon amitié, de vous gronder vivement, de vous reprocher votre humeur avec moi
, Voltaire, Lett. Maupertuis, 28 mai 1741.J'aime mieux gronder mes jardiniers que de faire ma cour aux rois
, Voltaire, Lett. Thiriot, 9 août 1756.Absolument.
Cependant laisse ici gronder quelques censeurs
, Boileau, Épît. VII.Dites-leur combien il y a de petitesse d'esprit et de bassesse à gronder pour un potage mal assaisonné, pour un rideau mal plissé, pour une chaise trop haute ou trop basse
, Fénelon, Éduc. filles, chap. 11. - 5Se gronder, v. réfl. Se faire à soi-même une réprimande.
Je me gronde bien de ma paresse, mon cher et aimable ami ; mais j'ai été si indignement occupé de prose depuis un mois, que j'osais à peine vous parler de vers
, Voltaire, Lett. Helvétius, 20 juin 1741.Laissez-le seul [le mécontent], il se gronde lui-même
, Delille, Conversation, II.Se gronder, se gronder l'un l'autre. Ils sont toujours à se quereller, à se gronder.
HISTORIQUE
XIIe s. Ne faire eissillier [ruiner] le païs, Que sans contraire as tot conquis ; Ne trouveras jà qui t'i gronde, E qui le tot ne t'i esponde [remette]
, Benoit de Sainte-Maure, II, 14796. Isnelement font sans effroi Tout son comant li escuier, Mais sans grondre et sans enuier, De ce qu'il rueve s'entremettent
, la Charrette, 6758.
XIIIe s. Ne set li las un mot repondre, Ne contre lui nen ose groindre
, Ren. 12590. Chascun a la teste enchinée ; N'i ot un seul qui osast grondre, Li uns lest à l'autre respondre
, ib. 17926. Si que il [les maris] n'osent un tout seul mot grondir
, Hist. lilt. de la Fr. t. XXIII, p. 525. Une fontaine nest en mon champ ; je la met par mon champ et li done à boivre ; mi voisin desoz en grondent ; et l'en dit que ne le puis fere
, Livre de just. 142. Une roche est en mer seans, Contre qui la mer gronde et tance
, la Rose, 5947.
XIVe s. [Je] Ne sai comment il mort, mais bien sai qu'il scet grondre
, Girart de Ross. V. 1115.
XVIe s. Ne marmottoit-elle pas des oraisons à l'oreille de l'enfant. …L'enfant ne disoit que ce qu'elle lui grondoit dans l'oreille
, D'Aubigné, Faen. II, 10. Les chiens de garde que nous voyons souvent gronder en songeant
, Montaigne, II, 200.
ÉTYMOLOGIE
Provenç. grondir ; du lat. grundire, forme parallèle à grunnire, grogner. On trouve aussi dans le XIIe siècle grundiller
, Lib. psalm. p. 55.