« filou », définition dans le dictionnaire Littré

filou

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

filou

(fi-lou) s. m.
  • 1Voleur qui emploie l'adresse. Je me chauffai là, moi troisième, ayant pour compagnie mon laquais et un filou qui s'y arrêta, Francion, liv. VI, p. 257. On ne peut faire un pas que l'on ne trouve un piége ; Partout quelque filou m'investit et m'assiége, Regnard, Ménechmes, II, 2. Il y aura toujours dans une armée des officiers et des goujats, et, dans une grande ville, des magistrats et des filous, Voltaire, Comm. sur Corn. Avertissement. Je fus volé, en arrivant, de tout ce que j'avais par des filous, à la foire de Saint-Germain, Voltaire, Candide, 21.

    Fig. Je renonce aux vers burlesques, aux romans comiques et aux comédies, pour aller dans un pays où il n'y aura ni faux béats, ni filous de dévotion, ni inquisition, ni hiver qui m'assassine, Scarron, Œuvres, t. I, p. 170, dans POUGENS.

    Adj. Un Dieu filou [Mercure] n'est pas propre à corriger les hommes sur la mauvaise foi en affaires d'argent, Fénelon, t. XIX, p. 219. C'est de quelque cousine, Pour vous tirer chez soi, sans doute un trait filou, Les deux arlequins (1691), II, 5, dans Théâtre ital. de Gherardi, t. III, p. 285.

  • 2Il se dit aussi de celui qui trompe au jeu. Je ne veux pas jouer avec lui, c'est un filou.
  • 3Poisson de la mer des Indes, l'épibule insidiateur (acanthoptérygiens), qui est le spare trompeur de certains auteurs.

ÉTYMOLOGIE

Mot d'origine incertaine. M. Fr. Michel, dans son livre de l'Argot, a réuni quelques indications : Il existe, dit-il, un arrêt du parlement de Paris, en date du 16 août 1623, dans lequel les voleurs sont qualifiés d'hommes hardis se disant filous. Puis il cite une série d'exemples du XVIIe siècle où filou a un autre sens : Belles-oreilles et Poltronesque ayant dit à Joly Barby, qui vient de chanter une chanson : Tu n'en sçay pas davantage ? Celui-ci répond : Si fay ; mais c'est un second gueridon et un autre filou, voy. Le carabinage et matoiserie soldatesque, p. 76. N'ont-ils plus souvenance du filou et de la vache à Collas, etc. ? La deffense des outrages faites au sieur Gueridon, etc. p. 4. Nous entendrons chanter et bruire tes prouesses sur le filou, le Paranymphe de la vieille. Le filou, ajoute M. Fr. Michel, était donc une chanson ou plutôt un air de musique, comme le gueridon, ainsi appelé du nom de son auteur. » Ce mot paraît être entré dans la langue durant le XVIIe siècle avec un sens et une forme moins arrêtée qu'aujourd'hui. Cette introduction si tardive ne paraît pas permettre de rattacher filou au bas-latin fillo ou filico, vaurien, qui se trouve dans de très vieux textes ; et, provisoirement du moins, l'étymologie reste ignorée. Voici quelques rapprochements et conjectures : le piémontais a filon, filou ; mais rien ne le rattache au mot français. Ménage dit que filou a signifié un petit bâton à six pans marqué comme un dé à chaque face et servant à un certain jeu, et que, comme il était facile de tricher à ce jeu, on appela filous ou filoutiers ceux qui escroquaient en quelque lieu que ce fût ; mais il ne donne aucun texte à l'appui de son dire. Diez met en avant l'ancien haut allemand fîlon, limer, dit que l'anglais file, lime, a été employé pour dire un filou, et que la métaphore a pu se faire ; il indique le français affiler, et en lorrain aiffilei, qui veut dire donner le fil et tromper. Enfin il signale l'anglais fellow, compagnon, qui dans le midi de l'Angleterre est un terme injurieux. Mais tout cela n'est que conjecture. Il en est de même pour l'anglais to filch, filouter, et du latin feliculus, petit chat. Quant au grec φήλητης ou φιλήτης, voleur, φηλόω, tromper, on ne sait pas comment ils auraient pu entrer dans le français au XVIIe siècle sous la forme de filou. En définitive, il n'est pas impossible que filou soit un terme populaire ou d'argot venu directement de filer.