« fièvre », définition dans le dictionnaire Littré

fièvre

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

fièvre

(fiè-vr') s. f.
  • 1État maladif caractérisé par l'accélération du pouls et l'augmentation de la chaleur du corps. Un accès de fièvre. La saison des fièvres. Convertissez-vous de bonne heure ; n'attendez pas que la maladie vous donne ce conseil salutaire ; que la pensée en vienne de Dieu et non de la fièvre, Bossuet, 4e sermon, Car. Pénit. 3. Cependant, à l'entendre, il se soutient à peine, Il eut encore hier la fièvre et la migraine, Boileau, Sat. X. Dès la nuit qui précéda cette bataille décisive, on a vu qu'une fièvre fatigante brûla son sang [de Napoléon], agita ses esprits, et qu'il en fut accablé pendant le combat, Ségur, Hist. de Nap. VII, 13.

    Familièrement. Une bonne fièvre, une fièvre forte. Mme de Rochefort est changée à n'être pas connaissable, avec une bonne fièvre double-tierce, Sévigné, 291.

    Populairement. Avoir les fièvres, être atteint d'une fièvre intermittente.

    Familièrement. Sentir la fièvre, répandre une odeur aigre et légèrement nauséabonde qui sort du corps de la plupart des fiévreux. D'honneur, il sent la fièvre d'une lieue ; allez vous coucher, Beaumarchais, Barb. de Séville, III, 11.

    Familièrement. Avoir une fièvre de cheval, une fièvre très violente.

    Fig. Tomber de fièvre en chaud mal, tomber d'un état fâcheux en un pire. Mais de fièvre en chaud mal son cœur par là tombé, Th. Corneille, Comtesse d'Orgueil, I, 2. Se dit par une sorte d'imprécation dans les phrases suivantes : Si vous y manquez, votre fièvre quartaine ! Molière, l'Ét. IV, 8. Que la fièvre te serre, chien de vilain, à tous les diables, Molière, l'Av. II, 6.

  • 2Fièvre arthritique, fièvre symptomatique qui accompagne quelquefois la goutte.

    Fièvre bilieuse, voy. BILIEUX.

    Fièvre catarrhale, synonyme de fièvre muqueuse, et quelquefois de catarrhe pulmonaire.

    Fièvre cérébrale, voy. CÉRÉBRAL.

    Fièvre charbonneuse, réunion de symptômes fort graves, ayant une grande analogie avec ceux du charbon.

    Fièvre chaude, un des noms vulgaires du délire fébrile.

    Fièvre continue, voy. CONTINU.

    Fièvre décimane, fièvre intermittente, qui revient tous les dix jours.

    Fièvre dépuratoire, celle qui s'accompagne d'un exanthème, parce qu'on suppose que cet exanthème est une dépuration.

    Fièvre jaune, voy. JAUNE.

    Fièvre larvée, voy. LARVÉ.

    Fièvre de lait, voy. lait.

    Fièvre pernicieuse, voy. PERNICIEUX.

    Fièvre pestilentielle, voy. PESTILENTIEL.

    Fièvre pourprée, voy. POURPRÉ.

    Fièvre pseudo-continue, voy. PSEUDO-CONTINU.

    Fièvre rémittente, voy. RÉMITTENT.

    Fièvre rhumatismale, voy. RHUMATISMAL.

    Fièvre traumatique, voy. TRAUMATIQUE.

    Fièvre de vaisseaux, voy. VAISSEAU.

    Fièvre vitulaire, voy. VITULAIRE.

  • 3 Fig. Émotion, trouble violent de l'âme. Un souffle, une ombre, un rien, tout lui donnait la fièvre, La Fontaine, Fabl. II, 14. Quand ma fièvre d'espérance fut un peu calmée, j'eus peur de cette résolution, Staël, Corinne, XIV, 3. Crois-tu que cette fièvre inextinguible, ardente, Soit 'effet passager d'un caprice ou d'un jour ? Arnault, Oscar, IV, 1. Une fièvre d'hésitation s'empare de lui [Napoléon] ; ses regards se portent sur Kief, Pétersbourg et Moscou, Ségur, Hist. de Nap. VI, 9. Depuis huit mois, vos airs de république Donnent la fièvre à tout bon courtisan, Béranger, Belges. Seul avec l'inspiration, cette fièvre divine, Ch. de Bernard, la Chasse aux amants, § III.

    Agitation des esprits. Cette fièvre de rébellion n'était pas encore apaisée. Durant ces jours de commotion, Paris avait la fièvre. Ne craignant point de redire après un impie, que c'étaient [les croisades] des fièvres du temps et des maladies populaires, Guez de Balzac, De la cour, 5e disc.

PROVERBES

Quand on ne jouerait que des fièvres quartaines, chacun les veut gagner (on dit plutôt aujourd'hui : quand on jouerait des coups de bâton).

Il a la fièvre de veau, il tremble quand il est soûl, se dit d'un paresseux ou d'un poltron.

Cela est employé comme fièvre en corps de moine, se dit d'un homme qui mérite le mal qu'il souffre.

Avoir une fièvre de renard qui se guérirait en mangeant une poule, se dit des convalescents revenus à l'appétit.

HISTORIQUE

XIIe s. N'out el païs nul homme si plain de fievre…, Th. le mart. 95.

XIIIe s. Jà [que ma dame] ne m'ait en grant vilté Pour la fievre qui m'est prise, Auboins de Sezanne, Romancero, p. 12. Tel peor ot coarz li lievres Que il en ot deus jors les fievres, Ren. 10050. Sire, fait-il, se diex me saut, Bien voi vos avés fievre ague, J'ai la poison [potion] qui bien la tue, ib. 19525.

XIVe s. Abstinence et repos sont profetables à celui qui est en fievre, Oresme, Eth. 328.

XVIe s. Comme est il possible d'aller un pas avant sans fiebvre [frayeur] ? Montaigne, I, 72. [Le voleur] fut incontinent représenté devant M. de la Voulte, homme qui a fait passer les fievres en son temps à maintes personnes [fait exécuter], Despériers, Contes, LXXXII. Ils sont subjets aux fievres tierces, et aux ardantes fievres quartes, continues, intermittentes, et frequentes, quintaines, sextaines, Paré, Intr. 6. Lupolde, de son costé, se fascha d'estre ainsi interrompu par ce muguet qui toujours estoit en fievre comme les singes, Contes d'Eutrap. p. 138, dans LACURNE. Au lieu d'une fievre chaude, j'entre en une continue, puis encore en double quarte, et finalement en une quintaine qui estoit que de cinq jours l'un j'avois la fievre, Pasquier, Lettres, t. II, p. 666, dans LACURNE. D'où vient qu'entre François on souhaite la fievre quarte pour grant maudisson ? Pasquier, ib. t. I, p. 615. Il n'y a rime ne raison, Quand on a telles fievres blanches [le mal d'amour], l'Am. rendu cordel. p. 540, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Berry, fieuvre, fieuve ; picard, les fièves, la fièvre ; provenç. febre : catal. febra ; espagn. fiebre ; portug. febre ; ital. febbre : du lat. febris, que les étymologistes rattachent à φέϐομαι, trembler, craindre.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FIÈVRE. Ajoutez :
4 Arbre à la fièvre, un vismia, Baillon, Dict. de bot. p. 247.
5Fièvre des bois, fièvre intermittente ou rémittente que, dans les Indes, on contracte en parcourant les bois. Là [à Monay, en Birmanie], le capitaine Fau, atteint par une affection que les indigènes appellent fièvre des bois, avait succombé en peu de jours, Journ. offic. 27 oct. 1874, p. 7228, 3e col.