« étage », définition dans le dictionnaire Littré
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étage
- 1Proprement séjour, station.
Terme de droit féodal. Lige étage, ou, simplement, étage, obligation des vassaux liges de résider un certain temps chez le seigneur, afin de le défendre.
- 2 Par extension de l'idée de demeure, espace entre deux planchers, formant un ou plusieurs appartements de plain-pied.
Je me brisai hier d'une chute sur l'escalier, je roulai tout un étage
, Marivaux, le Legs, sc. 14.Maison à un étage, maison qui n'a que le rez-de-chaussée.
Le premier se dit de celui qui est au-dessus du rez-de-chaussée, et ainsi des autres.
Elle fuit, et, de pleurs inondant son visage, Seule pour s'enfermer vole au cinquième étage
, Boileau, Lutr. II.Le cardinal Dubois, arrivé comme lui [le cardinal de Fleury] au ministère suprême, et parti de bien plus loin, s'écriait souvent dans l'amertume de ses dégoûts : Je voudrais être à un cinquième étage avec une vieille servante et quinze cents livres de revenu
, D'Alembert, Art. du cardinal Dubois, Œuvres, t. X, p. 97, dans POUGENS.Leste et joyeux je montais six étages ; Dans un grenier qu'on est bien à vingt ans !
Béranger, Gren.Communément on sous-entend le mot étage, et l'on dit le premier, le second, le troisième, etc.
Étage souterrain, les pièces en contre-bas du sol.
Étage carré, celui où il ne paraît aucune pente de comble, comme un attique.
Étage en galetas, étage pratiqué dans le comble.
- 3 Par analogie, il se dit des choses disposées par rang les unes au-dessus des autres. Deux étages de redoutes.
Il suffit que cet arbre ait un seul étage de bonnes racines, c'est-à-dire qu'il y ait des racines sortant tout autour du pied, de sorte qu'il n'y en ait point de beaucoup plus hautes ni de beaucoup plus basses que les autres
, La Quintinye, t. I, dans RICHELET.Je coupais les cheveux du jeune homme par étages, et tout allait le mieux du monde
, Lesage, Estev. Gonzales, ch. 1.À double étage, à triple étage, se dit de ce qui présente deux, trois dispositions en étage. Une coiffure à triple étage.
Il avait pris pour ce voyage Sa calotte de maroquin ; Et cette loupe à double étage Dont il ne vit jamais la fin, Ornait le haut de son visage
, Chaulieu, Épît. de M. d'Hamilton.Par extension, à triple étage, de haute taille.
Sur l'animal à triple étage [un éléphant] Une sultane de renom, Son chien, son chat et sa guenon, Son perroquet, sa vieille et toute sa maison, S'en allait en pèlerinage
, La Fontaine, Fabl. VIII, 15.Fig. C'est un fou, un sot à triple étage, il est fou, sot au dernier point.
- 4Il se dit des différents plans d'un terrain qui monte. Un étage de collines conduisait à la montagne.
De colline en colline et d'étage en étage Les monts, dont le miroir fait onduler l'image, Descendent jusqu'au lit des mers
, Lamartine, Harm. I, 10. - 5Dans le style badin, sillon qui partage le menton chez les personnes très grasses.
Son menton sur son sein descend à double étage
, Boileau, Lutr. I.Et ton menton, l'honneur de ton chapitre, Aura bientôt deux étages de moins
, Voltaire, Ép. VI. - 6 Fig. Rang, condition.
Ils [les dieux] descendent bien moins dans de si bas étages [le vulgaire], Que dans l'âme des rois, leurs vivantes images
, Corneille, Hor. III, 3.Il tutoie en parlant ceux du plus haut étage
, Molière, Mis. II, 5.[Nature] que sa mortalité avait reléguée au plus bas étage de l'univers
, Bossuet, III, Annonc. 2.Et [de mauvais poëtes], fiers du haut étage où La Serre les loge, Avalent sans dégoût le plus grossier éloge
, Boileau, Épît. IX.Le duc de Biron, le marquis de Castries, et quelques autres du même étage composaient sa société
, Marmontel, Mém. IV. - 7Degré, espèce, genre. Il y a des esprits de tout étage.
Piller maison, brûler villages, Faire serments de tous étages
, Scarron, Virg. v.Monsieur, dans la faiblesse duquel il y avait bien des étages
, Retz, III, 153.Mon Dieu ! que votre esprit est d'un étage bas !
Molière, Femm. sav. I, 1.C'est un haut étage de vertu que cette pleine insensibilité où ils veulent faire monter notre âme
, Molière, Préf. de Tart.
HISTORIQUE
XIe s. Il me suirat ad Ais à mon estage
, Ch. de Rol. XII. En un emplain [plaine] il ont pris lur estage [poste]
, ib. CCXXVI.
XIIe s. Lorsque [je] la vi, lui laissai en hostage Mon cuer, qui puis i a fait lonc estage
, Couci, XI. Demain les ferai pendre par dessus cest rivage, Ou saillir de la tour du plus hautain estage
, Sax. XXVI. Si, come li murs monta et ces treis estages par trible entravure devisa, si que l'entravure le temple traversa
, Rois, 246. Une vis [escalier] par unt l'un muntat à l'estage meien et d'iluc al suverain [au plus haut]
, ib. p. 247. E se tu vols parler de mun povre lignage, Des citehains de Lundres fui nés en cel estage
, Th. le mart. 87.
XIIIe s. Et n'i avoit si haute tour qu'il n'i feissent deus estages ou trois de fust pour plus haucier
, Villehardouin, CI. Par dessus monte une fontaine De ci qu'amont al tierc estage
, Fl. et Bl. 1849.
XVe s. Un hault siege de l'estage [taille] d'un homme
, Perceforest, t. II, f° 39.
XVIe s. Quiconque a le sol appellé l'estage du rez de chaussée d'aucun heritage, il peut et doit avoir le dessus et dessouz de son sol
, Coust. génér. t. I, p. 1009. Une vertu du plus haut estage
, Montaigne, I, 245.
ÉTYMOLOGIE
Bourguig. étaige ; wallon, ostège ; provenç. estatge, estage ; anc. catal. estatge ; ital. staggio ; d'une forme fictive staticum (ce que prouvent le tg du provençal et le gg de l'italien, qui répondent au latin aticus), de stare, être debout, être fixe (voy. ESTER). Estage signifiait étage, station debout, résidence, position, rang (voy. STAGE).